Organisation mondiale du commerce à l'épreuve de multiples crises. Perspective du système de régulation du commerce international.par Kossi Kafui SAMBOE Université de Lome - Master 2 droit public fondamental 2017 |
PARTIE I. UNE ORGANISATION A BOUT DESOUFFLE12 | P a g e Fondamentalement tournée vers l'ouverture des marchés, l'OMC fait de la libéralisation des échanges la règle73 et de la protection des marchés l'exception. De ce fait, l'Organisation participe par ses normes, ses procédures et ses organes à l'enracinement de la doctrine libérale, autant à la paix qu'à la prospérité dans le monde74. Pourtant, en dépit des progrès réalisés depuis sa mise en place, sur le plan de l'ouverture des marchés, le système commercial multilatéral « comporte encore beaucoup d'insuffisances, de zones grises ou d'exceptions »75. En effet, ces dernières années ont été marquées par des tensions permanentes dans le système commercial multilatéral. Ces tensions s'accroissent, à cause de la multiplication des mesures protectionnistes depuis la grande récession de 2008 dont les séquelles sont encore bien présentes aujourd'hui. Ces mesures protectionnistes ont été encouragées par les mouvements autarciques76. A cela, s'ajoute l'émergence d'une tendance du droit international économique appelée à s'inscrire dans le long terme, à savoir le régionalisme, axé sur les accords commerciaux préférentiels (ACPr) dont la prolifération remet en cause le principe fondamental de la non-discrimination77 et amène certains à se demander s'il y a « encore un pilote dans l'avion »78 du système commercial multilatéral. Aussi, cette remise en cause des principes cardinaux que sont la clause de la nation la plus favorisée (CNPF)79 et la clause du traitement national (CTN) fragilise-t-elle l'OMC et remet-elle alors en question son avenir80. C'est ainsi qu'une partie de la doctrine ne manquera pas de souligner que « le système commercial multilatéral est en souffrance »81. Et d'autres de se demander si l'OMC n'est pas déjà en danger82. Si l'avenir de l'OMC est aujourd'hui en cause, c'est parce que non seulement son cadre juridico-institutionnel semble présenter des signes d'essoufflement (Chapitre I), mais aussi parce que l'Organisation est ébranlée par une vague de contestations (Chapitre II). 73 Le terme « échanges » doit être pris dans un sens large. Les échanges intègrent le commerce des marchandises, les services ou les propriétés intellectuelles. 74 On retrouvera sur le site de l'OMC une plaquette présentant les dix avantages du système commercial multilatéral, disponible sur https://www.wto.org/french/news_f/pres95_f/pr024_f.html 75 Christian DEBLOCK, « le régionalisme commercial, y a-t-il un pilote dans l'avion ? » op. cit., p.2. 76 Il s'agit d'une tendance générale de protectionnisme, observable actuellement dans plusieurs pays où une partie de l'opinion publique préconise la fin du libre-échange comme une solution aux problèmes tels que les délocalisations d'entreprises, les pertes massifs d'emplois, les déflations salariales etc. 77 Ce principe occupe une place centrale dans le dispositif normatif du système commercial multilatéral. Il interdit non seulement toute discrimination entre les Membres de l'OMC (ce qui recouvre la clause de la nation la plus favorisée) mais aussi entre les produits quelque soit leurs origines. 78 Christian DEBLOCK, « le régionalisme commercial, y a-t-il un pilote dans l'avion ? » op. cit., p.1. 79 Boris NOLDE, La clause de la nation la plus favorisée, op.cit, 1932, tome 39, p.125 et ss. 80 Romain BENICCHIO, Céline CHARVERIAT, « L'avenir compromis de l'OMC », op. cit., 2007, p. 55. 81Habib GHERARI, « Organisation mondiale du commerce et accords commerciaux régionaux: le bilatéralisme conquérant ou le nouveau visage du commerce international », op.cit., p.255. 82 Zaki LAIDI, « Après Cancun l'OMC en danger ? », op.cit., p.13. 13 | P a g e |
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