B. La protection du libre-échange par le
règlement des différends
L'instauration de règles dont le non-respect serait
sanctionné uniquement par des contre-mesures264
qu'adopteraient, sans contrôle, les Etats qui se prétendent
victimes, conduiraient
mentionnons les paiements internationaux, l'activité
diplomatique, le statut des personnes physiques ou morales et leurs
activités, le transport, la propriété intellectuelle ou
encore la justice.
264 Pour une analyse plus détaillée cf.
Laurence BOISSON DE CHAZOURNES, les contre-mesures
dans les relations internationales, Pedone, 1992. p. 5 et ss.
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très vite à une guerre commerciale
généralisée. Il était donc nécessaire de
mettre en place un système, qui, tout en préservant le dialogue
constructif, permet de donner un caractère juridictionnel265
à son intervention en imposant si besoin est, sa décision.
Ainsi que l'indiquait Hélène RUIZ-FABRI, la
création de l'ORD apparaissait alors comme l'une des innovations
principales attachées à la création de l'OMC266
dans la mesure où il garantit l'effectivité des accords
commerciaux multilatéraux267.
La procédure de règlement des différends
est prévue dans le Mémorandum règlement des
différends (MRD), annexé à l'Accord instituant l'OMC.
Notons que c'est l'ORD qui reçoit les plaintes émanant
généralement des acteurs du commerce international et
portées devant lui par l'intermédiaire des Etats dont
dépendent ces acteurs. Dans la première partie, la
procédure, prévue pour durer 60 jours, est essentiellement
conciliatoire. En l'absence de consensus, on passera à la seconde phase
qui, quant à elle, est contradictoire et dure au maximum six mois. Les
parties pourront alors faire appel à un organe de recours dont la
décision s'imposera. Il s'agit de mettre en place un groupe
spécial qui établira un rapport préliminaire qui vaudra,
sauf rejet par consensus, décision définitive. Cependant en cas
de désaccord sur la solution proposée l'organe d'appel est alors
saisi. Constitué de sept membres, dont trois nécessaires pour un
recours, il ne se prononce que sur les aspects juridiques de la décision
du groupe spécial. Sa décision qui doit intervenir dans les 60
jours, ou au plus tard, dans les 90 jours, sera soumise à l'ORD. Si la
décision est adoptée les recommandations du groupe spécial
devront être appliquées par la partie dans un « délai
raisonnable ». Dans le cas contraire, la partie victime pourra être
autorisée à prendre des mesures de rétorsion dans un
délai limité à titre de compensation.
Depuis la création de l'OMC, le nombre de litiges a
connu une forte progression268 participant ainsi à la
formation d'une jurisprudence internationale en matière du commerce
multilatéral. La raison de ce succès tient à
l'augmentation du nombre des Etats membres de
265 Certes, le langage « politiquement correct » de
l'OMC préfère parler de système «
quasi-juridictionnel », pourtant, à y voir de plus près,
toutes les conditions sont remplies pour une conclusion beaucoup plus ferme en
faveur du caractère juridictionnel.
266 Hélène RUIZ-FABRI, « le
règlement des différends dans le cadre de l'OMC », JDI,
1997, p.2 et ss.
267 voir de même Eric CANAL-FORGUES,
Le règlement des différends à l'OMC, Bruxelles
Bruylant , 2008, p. 3 et ss.
268 Ainsi au 8 Novembre 2015, avec l'affaire
WTO/2015/DS500/Afrique du Sud -- Droits antidumping provisoires visant les
importations de ciment Portland en provenance du Pakistan (Plaignant:
Pakistan), l'OMC a atteint t la barre symbolique des 500 demandes de
consultation et plus de 350 ont été rendues témoignant
ainsi du succès de son mécanisme de règlement des
différends.
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l'OMC, l'extension et complexité des accords,
l'assistance fournie gratuitement ou à coût réduit aux PED
pour ester devant l'ORD.
Ainsi, grâce à son ingénieux
mécanisme de régulation, l'OMC veille au respect de
l'effectivité du libre-échange. Le MRD quant à lui, a
permis de désamorcer les escalades conflictogènes nées des
tensions commerciales. Il a aussi donné la possibilité aux PED de
contraindre juridiquement les puissances économiques dans les conditions
où les rapports de force étaient clairement en défaveur de
ces pays. On pourra utilement se référer à la
célèbre affaire des bananes269 ou encore à la
récente affaire -- WTO/2012/DS442 des Mesures antidumping visant les
importations de certains alcools gras en provenance d'Indonésie
marquée par la plainte de l'Indonésie à l'encontre
l'UE.
Si l'OMC réussit à obtenir des résultats
suffisants, c'est avant tout grâce à un fonctionnement ouvert
à l'adaptation permanente. Capable de résilience, l'OMC est en
plus une organisation véritablement efficace.
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