Les stratégies camerounaises de gestion des conflits en Afrique centrale. Enjeux et défis.par Ghislain Marceau BANGA Université de Yaoundé 2 - Master 2 en sciences politiques 2015 |
B - L'APPROCHE CAMEROUNAISE DE GESTION DES REFUGIESL'approche camerounaise de gestion des réfugiés peut se comprendre sous le prisme de son adhésion à la déclaration universelle des droits de l'homme, et à celle de la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples. Il n'est donc pas étonnant de voir que le Cameroun tente de gérer tant bien que mal, le flux de réfugiés qui, de plus en plus est important du fait des guerres et conflits qui frappent les pays avoisinants. Par ailleurs, on peut faire une autre lecture de cette disponibilité du Cameroun à recevoir les réfugiés étrangers, par la nécessité d'engranger des retombées symboliques sur le plan international en tant qu'Etat stable et « protecteur » des réfugiés. Il y a donc une dimension stratégique à la réception de ces hommes, femmes et enfants qui, chaque jour, arrivent par centaines, aux frontières du Cameroun (2), des entrées qui demandent une action particulière de la part des autorités camerounaises (2). Ainsi, le Cameroun a un certain nombre de devoirs vis-à-vis de ces gens qui relèvent dès lors qu'ils sont installés au Cameroun, de sa responsabilité. 1 - L'action de l'autorité administrative et du HCRLa gestion des réfugiés au Cameroun relève principalement de la compétence de deux ministères à savoir : le MINATD et le MINREX. Toutefois, ces deux institutions reçoivent l'appui d'autres institutions telles que le MINSANTE ; le Ministre chargé de mission, le Secrétaire Permanent du Conseil National ; le Secrétaire d'Etat auprès du Ministre de la Défense, chargé de la Gendarmerie Nationale et le Directeur de la Recherche Extérieure. Cette configuration a été adoptée officiellement après la signature par le Chef de l'Etat camerounais, de l'Arrêté N° 269 du 13 mars 2014, portant création d'un comité interministériel ad hoc chargé de la gestion des situations d'urgence concernant les réfugiés au Cameroun. Ce comité est notamment chargé d'examiner les défis humanitaires, socio-économiques, sanitaires et sécuritaires découlant de la présence massive des réfugiés au Cameroun, à l'effet de proposer au Gouvernement les mesures appropriées pour y faire face. Le comité sert également de cadre de concertation entre le Gouvernement et les institutions internationales pour une gestion harmonieuse de la situation des réfugiés, tenant dûment compte des préoccupations légitimes des communautés locales d'accueil. Il est aussi chargé de proposer toutes autres mesures utiles dans le cadre de la gestion des situations d'urgence concernant les réfugiés au Cameroun. L'autorité administrative n'est pas seule partie dans la gestion des afflux des réfugiés, elle est accompagnée dans cette mission par les institutions internationales, à l'instar du HCR. La coopération entre le Cameroun et le HCR commence en 1978. En effet, cette année marque l'arrivée massive des milliers de ressortissants équato-guinéens, fuyant le régime de Macias NGUEMA139(*). Favorisé par l'arrivée en 1979 à KOUSSERI, de plus de 100. 000 réfugiés tchadiens fuyant la guerre civile, l'accord de siège du HCR au Cameroun interviendra en 1982. La même année, le HCR installe au Cameroun une délégation à Yaoundé, et une sous-délégation à Garoua. Les missions du HCR au Cameroun sont les suivantes : · La protection internationale des réfugiés et demandeurs d'asile conformément aux normes et principes internationaux ; · La promotion des droits des réfugiés ; · Le rapatriement librement consenti des réfugiés ; · La réinstallation vers des pays tiers ; · L'intégration sur place ; · L'amélioration de la gestion des programmes en faveur des réfugiés à travers la formation du partenaire de mise en oeuvre aux séminaires organisés par le HCR. Bien qu'apprécié à cause de sa relative sécurité par les réfugiés et les demandeurs d'asile de la sous-région et de la région des Grands Lacs, le Cameroun reste dans un contexte juridique dominé par l'absence d'une législation nationale garantissant les droits des réfugiés et fixant la procédure d'éligibilité au statut de réfugiés. « Le Cameroun a ratifié tous les principaux textes internationaux et régionaux relatifs aux questions de réfugiés notamment la convention de Genève de 1951 et son protocole de 1967 d'une part, et la convention de l'O.U.A de 1969 sur les aspects spécifiques sur les réfugiés en Afrique d'autre part. Mais, sur le plan interne, le Cameroun ne dispose ni d'une législation spécifiquement consacrée aux réfugiés ni d'une Commission Nationale d'Eligibilité au statut de réfugié. Certes la loi de 1997 sur les conditions d'entrée, de séjour et de sortie des étrangers contient des dispositions sur la carte d'identité du réfugié valant carte de séjour. En effet, ce décret prévoit, l'octroi d'une carte d'identité au réfugié garantissant le droit de séjour sur le territoire camerounais, mais reste muet sur les aspects liés à la Détermination du Statut de Réfugié (DSR), au principe de non refoulement, et autres droits des réfugiés garantis par les normes internationales. En outre, le gouvernement a créé par décret N° 91/262 du 30 mai 1991, un service des Affaires Spéciales et des Réfugiés au sein du Ministère des Relations Extérieures, ministère de tutelle. Ce service est chargé d'assurer le suivi des problèmes des réfugiés en liaison avec le HCR. Toutefois, son impact sur la gestion des réfugiés reste très limité »140(*). * 139 Francisco Macias NGUEMA, (1924-1979), fut le premier Président de la République de Guinée Equatoriale, (1968-1979). * 140 Plan d'opérations par pays de l'UNHCR, 2006. |
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