Les stratégies camerounaises de gestion des conflits en Afrique centrale. Enjeux et défis.par Ghislain Marceau BANGA Université de Yaoundé 2 - Master 2 en sciences politiques 2015 |
B - INTERET DE L'ETUDECette réflexion revêt un double intérêt : un intérêt scientifique et un intérêt pragmatico-politique. L'intérêt scientifique de ce travail réside dans le fait qu'il apporte une autre lecture de la gestion des conflits en Afrique Centrale par le Cameroun, donc une compréhension complémentaire à l'encadrement du dispositif textuel sur le plan de sa responsabilité et de l'étendue des interventions des acteurs étatiques en matière de gestion des conflits. L'intérêt pragmatico-politique, et même stratégique de cette étude, repose sur le fait qu'elle pourra permettre d'évaluer le dispositif sécuritaire camerounais, mais surtout, son dispositif de prévention et de gestion des conflits conformément aux engagements juridiques internationaux y relatifs7(*). Scientifiquement, cette étude permet de ressortir la portée des actions prises par le Cameroun sur les questions de gestion des conflits, faire une relance du débat à ce niveau ;sans invalider les travaux antérieurs sur la question. Il s'agit donc de s'inscrire à la suite des débats en cours, tout en y apportant notre vision de la situation. Les décideurs camerounais peuvent, s'ils le jugent important, faire des ajustements sur le plan managérial, en créant un nouvel agenda des politiques publiques de leurs stratégies de gestion des conflits en Afrique centrale, basé sur les analyses et recommandations émises dans le cadre de ce travail. Il est question ici de mettre en lumière les dysfonctionnements des stratégies de gestion des conflits du Cameroun en Afrique centrale, afin de mieux les viabiliser. C - CLARIFICATIONS CONCEPTUELLESLa recherche en sciences sociales et tout particulièrement en science politique, pose le problème fondamental de la maîtrise des concepts qui, généralement donnent lieu à plusieurs interprétations de la réalité sociale. Les concepts sont des objets complexes, construits et produits pour rendre compte d'une réalité. Pour comprendre et expliquer le fondement de la recherche en science politique, toute étude gagnerait avant d'être engagée, de satisfaire à une exigence de clarification des mots et vocables clés. Ceci permet une bonne lisibilité ainsi qu'une bonne compréhension du sujet et de sa thématique, opérationnalise les concepts, tout en fixant par les différentes définitions qu'elle propose, le lectorat sur le sens sous lequel lesdits concepts seront compris dans le cadre d'un travail scientifique. Ainsi, c'est dans un souci de limiter toutes confusions, que la définition de chaque concept opératoire s'impose à nous. Emile DURKHEIM ne soulignait-il pas déjà que « la première démarche du sociologue ( et de tout homme de science ) doit être de définir les choses dont il traite, afin que l'on sache et qu'il sache de quoi il est question? »8(*). Pour cet auteur en effet, c'est la première et la plus indispensable condition de toute vérification. C'est pourquoi en accord avec ces quelques prescriptions d'ordre méthodologique, nous avons jugé nécessaire, voire indispensable, de clarifier les concepts de « stratégie », de « gestion des conflits », « l'Afrique centrale » mais aussi les notions d'« enjeux » et de « défis » . 1 - Le concept de « stratégie »Le Général français André BEAUFRE9(*), pense que la stratégie est la dialectique des volontés employant la force pour résoudre un conflit. Mais le dictionnaire des relations internationales10(*), présente la stratégie comme étant la partie de la science militaire qui concerne la conduite générale de la guerre et l'organisation de la défense d'un pays ; opérations de grande envergure, élaboration des plans offensifs et défensifs en fonction des effectifs, des moyens logistiques, du potentiel industriel, des données géographiques à grande échelle, des facteurs diplomatiques, politiques, etc. La question que pose la plupart des stratèges militaires est : comment parvenir, au moindre coût et le plus rapidement possible, à mettre hors de combat - ce qui ne signifie pas nécessairement détruire - les forces armées adverses ? Il faut néanmoins dire que ce concept n'a pas qu'une dimension politico-militaire. En réalité, on parle de stratégie dans plusieurs autres domaines tels que l'industrie, l'entreprise, la finance. On parle également de stratégie électorale, industrielle, commerciale etc. Force est donc de constater que la stratégie a subi à chaque fois une adaptation en fonction des divers champs où l'on l'utilise. Thierry DE MONTBRIAL quant à lui, définit la stratégie comme« la science (si l'on choisit de mettre l'accent sur le savoir et sur la méthode,) ou l'art (si l'on privilégie l'expérience) de l'action humaine finalisée, volontaire et difficile »11(*). On perçoit ici une forte dimension politique qui renvoie à une « ligne de conduite, c'est-à-dire un enchainement de prises de positions et une séquence cohérente d'actions et comportements »12(*), en vue de la réalisation d'un objectif précis et déterminé. Dans notre travail, nous allons considérer la stratégie comme une manière d'organiser, ou de mener une action pour arriver à un résultat probant. * 7 Convention de Vienne, 18 avril 1961 et protocoles additionnels ; Agenda des Nations Unies pour la paix, 17 juin 1992. * 8 Emile DURKHEIM, Les règles de la méthode sociologique, Paris, PUF, 13ème éd, 2007, p.34 * 9 André BEAUFRE, Introduction à la stratégie, Paris, ECONOMICA, 4e éd, 1985, P.16 * 10 Marie Claude SMOUTS, Dario BATTISTELLA, Pascal VENESSON, Dictionnaire des relations internationales, Paris, DALLOZ, 2ème éd, 2006, p.515 * 11 Thierry DE MONTBRIAL, L'action et le système du monde, Paris, Quadrige, 2e éd, 2008, p.129 * 12 Philippe BRAUD, Sociologie politique, 4e éd, Paris, L.G.D.J, 1998, p.15 |
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