Les stratégies camerounaises de gestion des conflits en Afrique centrale. Enjeux et défis.par Ghislain Marceau BANGA Université de Yaoundé 2 - Master 2 en sciences politiques 2015 |
2 - La sécurisation des investissements économiquesDans sa politique nationale d'investissement, le Gouvernement camerounais a fixé le cap de son « émergence » à l'année 2035. C'est une vision qui implique de gros efforts pour être bien menée de bout en bout ; et la sécurité sur les sites de ces grands chantiers, une question d'intérêt national. Il s'agit entre autre, des projets hydroélectriques de Lom-Pangar ; Mekin ; Memve'ele, mais aussi des projets tels que le port en eau profonde de Kribi, la construction du pont sur le fleuve Wouri à Douala qui est le garant d'une compétitivité économique, la centrale à gaz naturel de Ndogpassi etc... Outre cette vision de l'émergence en 2035 des dirigeants camerounais, il y a la sécurisation des échanges économiques entre le Cameroun et les pays voisins qui est un véritable problème. En effet, le Cameroun possède une façade maritime qui le place au centre de l'économie de sa zone géographique d'Afrique centrale, et lui donne par la même occasion un poids économique majeur comparativement à la Centrafrique et au Tchad. Un conflit sous régional durable serait de nature à déstructurer l'activité économique sous régionale qui est tributaire d'un réseau d'échanges entre les différents Etats de la sous-région, et notamment entre le Cameroun et la RCA ; mais aussi entre le Cameroun et le Tchad. Le Transcamerounais est un corridor qui a été construit pour desservir le Tchad et la RCA, en leur offrant un accès à la mer à travers le port de Douala. Ce corridor « part de N'Djamena (Tchad) ou Bangui (Centrafrique) pour aboutir à Douala. Le corridor comprend un itinéraire entièrement routier et un itinéraire mixte route-fer. Voie ferrée entre Douala et Belabo (pour la RCA) ou entre Douala-N'Gaoundéré (pour le Tchad). Par ailleurs, un oléoduc d'une longueur de 1.070 km (et d'un diamètre de 760mm) entièrement enterré, a été construit pour transporter les produits pétroliers extraits des champs pétrolifères du bassin de Doba au sud du Tchad jusqu'à Kribi au Cameroun »50(*). C'est un corridor qui montre l'importance des échanges entre le Cameroun et ses voisins. Il faut également dire que ces échanges vont au-delà du simple passage portuaire. En effet, il existe une importante activité transnationale commerciale qui peut à tout moment subir un ralentissement et d'importantes pertes économiques en cas d'instabilité. Tel a été le cas lors de la crise politique survenue en RCA en mars 2013. Selon le Bureau de Gestion du Fret Terrestre (BGFT), les pertes mensuelles ont été estimées à près de 4 milliards de francs CFA. Par ailleurs, le BGFT a annoncé que cette instabilité a été néfaste pour le commerce entre les deux pays, car elle a mis « [...] en péril les 55 milliards de marchandises qui circulent chaque année entre les deux pays, selon les statistiques de la douane Camerounaise »51(*).De ce qui précède, force est de remarquer qu'une instabilité sous régionale prolongée et même passagère, a un impact sur le Cameroun, à travers des pertes économiques directes. * 50 Philippe CABANIUS, « Amélioration du transport de transit dans la région d'Afrique Centrale », première session du comité intergouvernemental préparatoire de la conférence ministérielle internationale sur la coopération en transport de transit, 7 avril 2003, p. 5. * 51 J. HAMAN, cité par MEVONO NGOMBA, « commerce illicite, des produits détruits à N'Gaoundéré », Cameroun Tribune n° 10383/6584 du 15 juillet 2013, p. 13. |
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