4.4.2. La survie en fin d'hospitalisation et les facteurs
associés
La létalité est élevée dans notre
étude. La survie en fin d'hospitalisation (57,6%) est comparable
à celle rapportée par différents auteurs d'Afrique
subsaharienne et du Maghreb avec notamment 58,4% à Bangui (Centrafrique)
en 2001, 62,2% à Brazzaville (Congo) en 2014, 63,4% à
Yaoundé en 2011 (Cameroun), 56,6% à Tlemcen (Algérie) en
2013, 59% à Fès (Maroc) en 2008 [22, 23, 33, 34,
37]. Cependant, des taux plus élevés ont
été rapportés par certains auteurs à Bamako au Mali
en 2005 (68,3%), Lomé au Togo (69,9%), Kisangani et Kinshasa en RDC en
2014 (respectivement 72% et 81,8%) et Yaoundé au Cameroun en 2013
(82,7%) [35, 41-43, 47]. Notre taux est par ailleurs plus
élevé que celui de DIAGNE et al à Dakar
(Sénégal) en 2000 où la survie était de 39%
[12]. Notre résultat, comme dans la plupart des pays
africains, reste nettement inférieur à celui des pays
européens et souligne les difficultés des pays à
ressources limitées à assurer une prise en charge optimale des
prématurés [9, 25, 44, 45, 48].
La plupart des décès dans notre étude
(90,4%), comme dans la plupart des études sous d'autres cieux,
surviennent dans la période néonatale précoce
caractérisée le plus souvent par la survenue des détresses
vitales et soulignent l'intérêt d'une prise en charge initiale
rapide et coordonnée [12, 23, 33, 42, 47].
La survie reste dépendante de l'âge gestationnel.
En effet, elle était de 9,5% chez les extrêmes
prématurés, 54,6% chez les grands prématurés et
88,4% chez les prématurés moyens. Notre résultat stipule
aussi que le prématuré peut survivre dans notre contexte à
partir de 26 semaines d'aménorrhée au prix d'une prise en charge
adéquate et d'un séjour hospitalier plus long. La survie
était de 32% à 28 SA, 80% à 33 SA et atteignait 96%
à 34SA avec des points de flexion à 31, 35 et 36 SA imputables au
faible effectif des prématurés enregistré à ces
âges dans notre étude. De nombreux auteurs africains rapportent
que la survie est exceptionnelle avant 28 SA et qu'elle est nettement meilleure
lorsque la prématurité est proche du terme [12, 22, 23,
27, 41, 42]. Cependant, les études réalisées
à l'hôpital gynéco-obstétrique et pédiatrique
de Yaoundé ont mis en évidence une survie des
prématurés même avant 25 SA [33, 43]. De
ce qui précède, il importe de revoir la limite de la
viabilité dans les pays à ressources limitées et cela
passerait par la réactualisation des données dans nos pays
à travers des études codifiées à l'échelle
sous-régionale voire continentale. Si la survie des extrêmes
prématurés est encore faible dans notre contexte (10% à
N'djaména et 16-23% à Yaoundé), les pays européens
enregistrent eux une évolution notoire dans la survie des
prématurés. Les études EPIPAGE I et II et l'étude
de Clermont en France, EPIBEL en Belgique et EPICURE en Grande Bretagne ont
notés une survie de 31-58% à 24 SA et celle-ci atteignait 75-77%
à 26 SA [9, 25, 39, 44, 45, 48]. Ces taux qui semblent
hors de notre portée ne sont cependant pas impossibles à
atteindre ; un investissement plus conséquent dans le domaine de la
santé en général et de la médecine
périnatale en particulier permettrait d'avoir de meilleurs
résultats.
Parmi les autres facteurs associés à la survie
du prématuré nous avons noté l'accouchement par
césarienne, la naissance « inborn », l'admission
précoce au cours de la première heure de vie, la
corticothérapie anténatale, l'absence de détresse
respiratoire et une
absence d'indication de réanimation à la
naissance. Ces résultats soulignent l'intérêt des soins
basés sur l'évidence et la faiblesse de la réanimation
néonatale dans notre milieu. L'accouchement par césarienne, le
score d'APGAR normal, l'absence de détresse respiratoire sont aussi
rapportés par divers auteurs comme facteurs de bon pronostic
[37, 41, 43,48]. L'intérêt des soins basés
sur l'évidence (corticothérapie anténatale, transfert in
utero, lutte contre l'hypothermie et utilisation du surfactant) a
été démontré dans l'étude EPICE en
Europe qui a noté une augmentation significative de la
survie globale en fin d'hospitalisation et de la survie sans handicap majeur
lorsqu'une des composantes des soins basés sur l'évidence est
administrée [40]. Le faible poids de naissance est
aussi rapporté par de nombreux auteurs comme un facteur de mauvais
pronostic [37, 41, 43, 49]. Dans notre étude, la survie
était plus élevée lorsque le prématuré avait
un poids normal pour son âge gestationnel mais la différence
n'était pas statistiquement significative. Une étude
réalisée en Afrique de l'Est a mis en exergue l'impact de
l'association hypotrophie et prématurité sur la survie des
prématurés. Selon cette étude, le prématuré
hypotrophe était 20 fois plus à risque de décéder
que le prématuré eutrophique [50].
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