Section 2 : Le dispositif institutionnel de la gestion de
la diversité culturelle en Afrique centrale
Le dispositif juridico-institutionnel de la gestion de la
diversité culturelle fera l'objet d'une analyse succincte qui ressort
d'une part les mesures institutionnelles à l'intérieur des
Etats
128 Minority Rights Group International,
Communication au Comité pour l'élimination de la discrimination
raciale - Rwanda (2011).
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Les politiques publiques de gestion de la diversité
culturelle dans les processus de construction de la paix en Afrique centrale
d'une part (Paragraphe 1), et les outils du dispositif
communautaire ou un plaidoyer est de plus en plus fait en faveur des
stratégies et l'implémentation de la diversité culturelle
d'autre part (Paragraphe 2).
Paragraphe 1 : Le dispositif institutionnel de la
gestion de la diversité culturelle en Afrique Centrale
Les mesures institutionnelles mises sur pied en vue d'assurer
une saine gestion des politiques de la diversité culturelle concernent
aussi bien celles qui sont édictées à l'intérieur
des Etats de la sous-région (A), qu'au niveau communautaire de la CEEAC
où des outils de gestion commencent à prendre forme (B).
A- Le dispositif institutionnel à
l'intérieur des Etats
Au Cameroun, la mise sur pied d'une Commission Nationale pour
la Promotion du Bilinguisme et du Multiculturalisme (CNPBM), a
été la réponse institutionnelle faite par le Chef de
l'Etat camerounais aux revendications sur la diglossie linguistique et la
marginalisation subie par la minorité anglophone. Dans le paysage
socio-culturel camerounais, la création d'une telle commission est une
reconnaissance tacite du malaise longtemps clamé par les ressortissants
originaires de ces deux régions. Selon le décret qui la
crée et l'organise, elle en charge entre autres la promotion du
bilinguisme et du multiculturalisme, la dénonciation de toutes
discriminations fondées dur l'irrespect des dispositions
constitutionnelles relatives au bilinguisme et au multiculturalisme, et en
rendre compte au Président de la République129.
Au Rwanda, la Commission nationale de la lutte contre le
génocide a été établie en application de la
Constitution de 2003. Elle n'a commencé ses travaux qu'en 2008.
Conformément à son mandat, la Commission est chargée
notamment de concevoir et de mettre en oeuvre des stratégies de lutte
contre le génocide et l'idéologie du génocide, de
coordonner les activités de commémoration et de préserver
les sites de mémoire, et d'apporter une assistance aux survivants du
génocide. Elle est également habilitée à
entreprendre des activités éducatives en milieu scolaire et
à oeuvrer à la préservation de la mémoire du
génocide parmi les
129 Décret n02017/013 du 23 Janvier 2017
portant création, organisation et fonctionnement de la Commission
Nationale pour la Promotion du Bilinguisme et du Multiculturalisme.
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Les politiques publiques de gestion de la diversité
culturelle dans les processus de construction de la paix en Afrique centrale
nouvelles générations. La Commission nationale
pour l'unité et la réconciliation a officiellement
réintroduit ce système afin de favoriser la coexistence pacifique
des différentes communautés après le
génocide130.
La Commission nationale des droits de la personne a
été établie en application de la Constitution avec pour
mission, notamment, d'examiner les violations des droits de l'homme commises
par toute personne sur le territoire national au Rwanda et au Cameroun. La
Commission est chargée de sensibiliser la population aux droits de
l'homme et d'organiser des programmes de formation dans ce sens, de
préparer et diffuser des rapports annuels relatifs aux droits de l'homme
ou autres, et d'engager des procédures judiciaires à l'encontre
de tout auteur de violations de ces droits. Les rapports sont transmis au
Parlement au Rwanda, et au Président de la République au
Cameroun, ainsi qu'à d'autres organes de l'État et sont rendus
publics. La même mission a été confiée par la
Commission intersectorielle d'élaboration des rapports nationaux sur les
droits de l'homme (CIERNDH) en Angola131.
Le Bureau de l'Ombudsman132 au Rwanda
également a pour mandat de lutter contre les injustices et la
corruption, ce qui recouvre les obligations imposées au titre de la
Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de
discrimination raciale. Pendant ce temps, en Angola il y a le médiateur,
entité publique et indépendante dont l'objectif est de
défendre les droits, les libertés, et les garanties des citoyens
en garantissant par des moyens informels la justice et la
légalité de l'administration publique. En termes
généraux, le statut du Médiateur de l'Angola est conforme
aux principes de Paris sur les compétences, les responsabilités
et la disposition constitutionnelle. Comme dans d'autres pays, le
Médiateur angolais joue le rôle d'Institution Nationale des Droits
de l'homme133.
Un type d'organisme indépendant
généralement mis en place de façon exceptionnelle est la
Commission Vérité et réconciliation. Elle vise à
offrir une tribune publique inhabituelle pour
130 Commission nationale pour l'unité et la
réconciliation, Rwanda Reconciliation Barometer.
131 CIERDH -Commission intersectorielle pour la
préparation des rapports sur les droits de l'homme créée
par la Résolution n° 121/09 du 22 décembre 2011,
coordonnée par le Ministère des Affaires Étrangères
et assistée par le Ministère de la Justice, actuellement
coordonnée par le Ministère de la Justice et des Droits de
l'Homme, conformément à l'arrêté présidentiel
n° 29/14 du 26 mars 2017.
132 Établi en application de l'article 182 de la
Constitution de 2003 et par la loi no 25/2003 du 15 août 2003.
133 Sixième et septième rapport sur la mise en
oeuvre de la charte africaine sur les droits de l'homme et des peuples et le
rapport initial du protocole sur les droits de la femme en Afrique 2011-2017,
Luanda, République d'Angola, janvier 2017.
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Les politiques publiques de gestion de la diversité
culturelle dans les processus de construction de la paix en Afrique centrale
exposer les griefs et faire connaître les
allégations d'abus antérieurs et en cours ainsi que des cas de
discrimination de groupe et de violations des droits de l'homme. Il s'agit
généralement d'offrir ainsi l'occasion d'une gestion constructive
et démocratique de la diversité par le biais de la
réconciliation et de la restitution. Ces commissions ont
été mises en place en République démocratique du
Congo, en République centrafricaine et au Tchad134.
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