B. Le droit réel de jouissance des occupants et
exploitants des dépendances du domaine national au 4 août 1974
L'article 17 de l'ordonnance fixant le régime foncier
dispose ainsi : « Les dépendances du domaine national sont
attribuées par voie de concession, bail ou affectation dans des
conditions déterminées par décret.
Toutefois, les collectivités coutumières,
leurs membres ou toute autre personne de nationalité camerounaise qui,
à la date d'entrée en vigueur de la présente ordonnance,
occupent ou exploitent paisiblement des dépendances de la
première catégorie prévue à l'article 15,
continueront à les occuper ou à les exploiter. Ils pourront sur
leur demande obtenir des titres de propriété conformément
aux dispositions du décret prévues à l'article 7.
»
L'article 15 évoqué dans cette disposition est
relatif à la catégorisation du domaine national en deux
dépendances, la première est celle occupée ou
exploitée alors que la seconde est libre de toute occupation. Les terres
concernées par le deuxième alinéa de l'article 17
sus-cité sont donc les terres exploitées ou occupées
à l'entrée en vigueur de l'ordonnance fixant le régime
foncier. Il est clair qu'au profit desdites collectivités et personnes,
un droit réel de jouissance est reconnu. Un droit de jouissance qui plus
est susceptible d'être transformé en droit de
propriété à la simple demande de l'occupant ou de
l'exploitant.
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Jouissance des terres et garantie
Le droit dont sont titulaire les exploitants et occupants du
domaine national avant le 05 août 1974 est susceptible de garantie et
notamment d'hypothèque. Au moment de constituer cette hypothèque,
le Notaire doit requérir l'immatriculation des terres occupées et
exploitées au profit de la personne qui les occupent et exploitent et
entend donc les mettre en garantie. Ainsi, l'ordonnance fixant le régime
foncier a consacré un droit réel de jouissance prêt
à se transformer en droit de propriété lorsque l'occupant
ou l'exploitant demande l'immatriculation.
L'admission de ce droit de jouissance comme pouvant faire
l'objet de l'hypothèque est juste pour au moins deux raisons. La
première raison tient au fait que le droit de jouissance ainsi
consacré n'est en lui-même que temporaire, la difficulté
propre à une personne de procéder à cette conversion ne
doit donc pas occulter le fait que son occupation et son exploitation valent
d'importants investissements ou plutôt le fait que la
disponibilité du crédit permettrait lesdits investissements. Il
n'est pas faux que la reine des garanties étant l'hypothèque, un
immeuble ou des terres immatriculées lui seront demandés pour
l'octroi dudit crédit. Avec la possibilité d'utiliser un simple
droit de jouissance, les diligences nécessaires peuvent être
faites et le crédit octroyé.
Le domaine national regorge, au regard de ce qui
précède, l'essentiel des droits de jouissance des terres
susceptibles d'être mis en garantie de remboursement des crédits.
Les divers baux, la concession provisoire et les droits des exploitants ou
occupants du domaine national avant le 05 août 1974 sont les droits dont
bénéficient la grande majorité des camerounais.
En conclusion, quelques démembrements du droit de
propriété conférant jouissance des terres et
présentant préalablement des caractères
d'aliénabilité et de saisissabilité peuvent constituer
l'assiette d'une garantie de remboursement des crédits. Il en est de
même des droits réels que le législateur a bien voulu
conférer dans les terres des domaines à travers les
mécanismes sus évoqués. Le territoire camerounais est
largement constitué du domaine national, c'est la raison pour laquelle
les droits de jouissance conférés à ceux qui l'exploite
mènent majoritairement à l'acquisition de la
propriété. C'est le cas des droits des exploitants et occupants
du domaine national avant le 05 août 1974. Leur droit de jouissance doit
au préalable être transformé en droit de
propriété et les terres occupées ou exploitées
peuvent être hypothéquées. La nature de la garantie portant
sur ce droit est identifiée ; il s'agit de l'hypothèque. Portant
également sur les terres, la question se pose de savoir si les autres
droits réels de jouissance entrent-ils également dans l'assiette
de l'hypothèque.
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Jouissance des terres et garantie
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