2. Un contexte de conflit armé
Les classes passerelles interviennent à la suite de
deux conflits armés. Celui de 2002 et la crise post-électorale de
2010/2011. Ces contextes de conflit armé se caractérisent par des
effets néfastes sur le système scolaire, notamment sur ses
249 Gouvernement de Côte d'Ivoire et al, 2016, op.
cit, p. 119
250 ibidem
251 ibidem
252 idem, p. 132
187
infrastructures, ses acteurs et le climat scolaire. Cette
section montre les différentes étapes de l'évolution du
système scolaire ivoirien face aux deux crises, en l'absence de «
mécanisme formel de mitigation. »
2.1. Un environnement scolaire politisé par les
belligérants
Evaluant les effets néfastes des conflits successifs
sur le système scolaire, le gouvernement de Côte d'Ivoire et al
(2016) affirment que :
suite à la crise de 2002, le système
éducatif ivoirien a été la scène de confrontations
étendues, impliquant les forces belligérantes, les enseignants et
les élèves, (...). Les résultats des élections
présidentielles de 2000, tenues sur une toile de fonds de coup
d'état, ont été fortement contestés par une frange
de la population, donnant lieu en 2002 à un conflit militarisé
qui a coupé de fait le pays en deux. L'ensemble du tissu social a
été affecté par cette crise, et les écoles sont
alors devenues un forum d'expression des tensions politiques qui pouvaient
s'observer au niveau local (Chelpi den Hamer, 2013). Les problématiques
concernées incluent la politique éducative, le statut et la
coordination des enseignants, l'accès à l'école,
l'organisation et l'administration du secteur. En effet, l'éducation est
devenue un symbole clé de l'identité ivoirienne et de statut, que
les principaux protagonistes du
conflit ont cherché à manipuler pour
l'atteinte de leurs objectifs politiques (Sany, 2010).253
Ces auteurs constatent que les protagonistes de la guerre de
2002 se sont servis de l'école pour se rapprocher de leurs objectifs
politiques. Dans cette démarche, l'école a fait l'objet de
convoitise par les belligérants non pas pour éduquer les enfants,
mais plutôt pour obtenir d'éventuels adhérents à
leurs combats politiques. L'école a assumé pleinement ce
rôle de distillateur d'idées politiques, de par la
diversité de ses acteurs et de par sa vocation de transmetteur de
savoir. En ciblant l'école, les acteurs du conflit étaient
conscients de cette fonction charnière.
Une manifestation de l'emprise des protagonistes sur
l'école est le refus de l'Etat de Côte d'Ivoire d'organiser les
examens nationaux dans les zones dites « occupées » en 2003.
Ce sujet a fait l'objet d'âpres négociations arbitrées par
la communauté internationale avant de trouver une solution. Pour
convaincre les partenaires engagés dans les financements de ce projet,
la partie adverse (les
253 Gouvernement de Côte d'Ivoire et al, 2016, op.
cit., p. 226
188
forces occupantes) a dû faire usage de la pression
populaire des zones sous son contrôle. Ces populations, à travers
des marches de protestation et avec la bénédiction des forces
nouvelles, ont clamé haut que l'Etat de côte d'Ivoire, par son
refus d'organiser les examens, violait le droit à l'éducation de
leurs enfants. Cette pression populaire a aussi bien servi la cause des
populations et que celle des forces nouvelles.
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