4.4. Du renforcement contextuel et des conditions
d'exercice.
Le dernier axe relatif au contexte et aux conditions
d'exercice, a permis de développer une stratégie basée sur
l'éducation en situation d'urgence. Cette approche est fondée sur
le fait que les mécanismes de mitigation enclenchés
jusqu'à la dernière crise de 2010/2011 en Côte d'Ivoire ont
suffisamment montré leurs limites. De prime à bord, ce sont les
conditions d'intervention des acteurs qui sont
412 Pédagogie convergente: approche novatrice
d'apprentissage des langues ayant pour objectif de développer un
bilinguisme fonctionnel chez l'apprenant. Elle est introduite au Mali en 1987
pour faciliter la passage de la langue maternelle au français (Samba
Traoré, 2001) cité par Apollinaire SEZELIO, 2014, Didactique
intégrée, pédagogie convergente et bilinguisme comme
élément de réponse à la crise de l'école
centrafricaine. p.165
413 A. OUANE et C. GLANTZ, 2010, op. cit., pp. 27-30
350
décrites, conformément aux normes de l'INEE.
Ensuite viennent les conditions d'accès à l'éducation
d'urgence, puis, l'environnement d'apprentissage et enfin, le processus
enseignement/apprentissage. Ainsi, considérant que les acteurs
interviennent dans un contexte de crise, ils reçoivent une formation
psychosociale en rapport avec l'éducation et les besoins
spécifiques des apprenants en situation d'urgence. De même, les
processus d'apprentissage et les dispositifs éducatifs sont
conçus dans ce registre pour garantir une meilleure prise en charge des
apprenants. Ces propositions devront permettre de renforcer le système
scolaire conventionnel dans un contexte d'éducation d'urgence.
Considérant les facteurs de risque que les acteurs des
classes passerelles ont dû annihiler pour réaliser le projet
école d'une part, vu la bonne performance des apprenants des classes
passerelles d'autre part, l'existence des classes passerelles apparaît,
selon notre étude comme la manifestation de la résilience du
système scolaire national. Cette résilience s'est
réalisée, non pas de manière systématique, mais
plutôt par la spontanéité d'acteurs sociaux ayant
différentes motivations. Dans une perspective sociologique, cette action
des acteurs revalorise la théorie de DUBET (1989) qui dit, en substance,
que c'est à partir des motivations diverses qu'élèves,
collégiens, lycéens et étudiants construisent leurs propre
expérience et le sens qu'ils donnent à leur scolarité.
Dans cette logique, en prenant en compte la motivation et la
détermination dont ont fait preuve les acteurs des classes passerelles,
notre étude permet d'affirmer que ceux-ci ont manifesté de
l'intérêt pour l'éducation. Même si des nuances
peuvent apparaître entre les différents acteurs, tous avaient un
même objectif, à savoir scolariser les enfants malgré les
facteurs de risque.
Toutefois, le cas des classes passerelles contredit, en
partie, de la thèse de DUBET sur la différence qu'il fait entre
les élèves « bien placés » (favorisés) et
les élèves « mal placés »
(défavorisés). En effet, DUBET juge que seuls les
élèves issus des couches socioéconomiques
favorisées sont capables de se construire des motivations alors que dans
le cas des classes passerelles, les élèves proviennent tous d'un
milieu socioéconomique défavorable comme le montre l'étude
de
KOFFI (2009). Malgré le facteur risque que constitue ce
statut socioéconomique, les apprenants ont pu construire le sens de
leurs études et réaliser des performances satisfaisantes.
Toujours dans une perspective sociologique, Ce résultat, contrairement
aux travaux de MEURLET et MORLAIX (2006), qui désignent trois facteurs
externes déterminants des inégalités sociales devant
l'école, à savoir : « (i) l'ambition, la volonté,
l'habitus ;(ii) la proximité de la culture de la maison et de celle de
l'école ; (iii) et les ressources financières 414
», démontre que la réussite scolaire peut être une
réalité au sein des catégories socioéconomiques
défavorisées. Les «modèles de l'empathie» et
«l'avantage stratégique» que ces auteurs présentent ne
suffisent pas à expliquer la réussite des apprenants des classes
passerelles dans la mesure où nous sommes en présence d'une
catégorie socioéconomique homogène comme l'indique KOFFI
(2009).
Au regard des thèses sociologiques
susmentionnées, les conclusions de nos travaux relatives au type de
résilience manifesté par les classes passerelles, questionnent le
lien entre réussite scolaire et l'homogénéité du
statut socioéconomique des apprenants. Notre étude marque des
insuffisances à ce niveau. C'est une question qui mériterait
d'être traitée dans le cadre d'une stratégie globale de
mitigation du système éducatif. Dans une perspective
d'évaluation, la mise en place de cette stratégie globale
commande qu'il y ait un mécanisme de suivi qui permettrait
d'évaluer les aspects essentiels à intégrer dans le
processus de résilience.
351
414 D. MEURLET et S. MORLAIX, 2006, op. cit., pp.
49-79
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