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Dispositif de renforcement du système scolaire conventionnel en Côte d’Ivoire. Influence des classes passerelles en zone centre nord et ouest (c.n.o.) de 2006 à  2014.


par Moussa KONE
Université Alassane Ouattara - Doctorat en sciences de l'éducation 2019
  

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3.3. De la résilience scolaire

La réussite des apprenants des classes passerelles peut être analysée dans une perspective psycho-sociale. Il s'agit de s'interroger sur la capacité de résilience des apprenants dans une situation d'urgence. La résilience scolaire peut être considérée comme « la capacité d'atteindre une adaptation fonctionnelle malgré des circonstances adverses ou menaçantes. 378» Elle se définit aussi comme le fait que « face au risque d'inadaptation scolaire, certains élèves exposés, d'emblée, à l'échec scolaire, s'en sortent finalement contre toute attente 379», les travaux de LAROSE et al (2001) permettent d'en avoir une meilleure compréhension à travers les trois types de résilience qu'ils proposent, à savoir : « les modèles compensatoires, les modèles de protection et les modèles de défi. 380».

A travers le «modèle compensatoire», les caractéristiques personnelles ou familiales de l'enfant lui permettent de « compenser les situations adverses de son environnement.381» En d'autres termes, le facteur de risque est annihilé par le facteur de protection. Dans le «modèle de protection», c'est l'interaction entre « les facteurs de risque et de protection382 » qui a un effet sur l'adaptation. Enfin, dans le «modèle défi» « le facteur de risque engendre le stress dont les effets sont positifs sur l'adaptation scolaire, en ce sens que l'enfant utilise les compétences acquises pour réagir positivement dans des situations ultérieures. 383»

Au regard de la réussite scolaire des apprenant des classes passerelles, face à la crise scolaire et environnementale, l'étude nous permet d'affirmer que nous sommes en présence d'un cas de résilience scolaire qui s'explique par la procédure de mise en oeuvre du dispositif des classes passerelles, la motivation des apprenants et des acteurs. Au niveau de la procédure de mise en oeuvre, toutes les mesures utiles sont prises pour affronter les obstacles à la scolarisation des enfants. Cela se traduit par des missions de prospection, des concertations avec les

378 A. S. MASTEN et al, 1990, op. cit., pp. 425-444. Traduit par F. LAROSE et al, 2001.

379 F. LAROSE et al, 2001, op. cit., pp. 151-180

380 N. GARMEZY et al, 1984, op. cit., p. 55, 97-111, traduit par F. LAROSE et al, 2001.

381 ibidem

382 N. GARMEZY et al, 1984, op. cit., p. 55, 97-111, traduit par F. LAROSE et al, 2001, p. 111

383 ibidem

339

populations locales et la prise en compte des compétences de vie dans l'exécution du programme scolaire. En impliquant, ainsi, la communauté locale, les facteurs de risques qui sont le contexte de conflit et le manque de ressources, sont minimisés de sorte à permettre aux enfants de réaliser de bonnes performances. Cela pourrait correspondre au modèle compensatoire évoqué par GARMERY (1984) ainsi LAROSE et al (2001).

L'étude a montré que l'accompagnement des parents et leur implication dans la gestion quotidienne des classes passerelles, constituent une source de motivation pour les enfants et les animateurs. VIANIN (2007) qualifie cela de « motivation extrinsèque 384» qui fait référence à tout ce qui, de l'extérieur, peut renforcer le comportement de l'enfant à l'école. Cette perception est renforcée par la thèse de GALAND (2006), qui l'inscrit dans une perspective sociocognitive selon laquelle, « la motivation résulte d'une interaction entre l'individu et son milieu.385» Ainsi, la motivation serait, selon lui, la réaction du sujet « face à son environnement en fonction de son but ».

Une seconde source de motivation évoquée par 45% des répondants est « l'envie d'aller à l'école comme les autres enfants ». Cela correspond à la « motivation intrinsèque 386» évoquée par VIANIN (2007). Ce type de motivation est dû à l'intérêt ou le plaisir personnel du sujet face à l'activité. Ainsi, l'école devient un engagement personnel pour l'enfant qui se l'approprie et manifeste de l'intérêt pour les activités qui s'y déroulent. Toutefois, compte tenu de la « complexité de la dynamique motivationnelle 387» évoquée par GALAND (2006) cette question mérite d'être approfondie pour cerner les facteurs participant à ladite dynamique. Pour les classes passerelles, l'élément le plus probant est l'existence

384 P. VIANIN, 2007, op. cit., p. 22

385 B. GALAND, 2006, op. cit., pp. 5-8

386 P. VIANIN, 2007, op.cit. p. 22

387 B. GALAND, 2006, op. cit., pp. 5-8

340

d'une « motivation positive 388» de tous les acteurs qui s'investissent au maximum pour maintenir les enfants à l'école.

Dans une perspective de résilience scolaire de GARMERY (1984) et de LAROSE et al (2001), l'étude permet de conclure que la motivation des acteurs et des apprenants a constitué un facteur de protection en face des facteurs de risque que sont le contexte de conflit et le manque de ressources. Nous admettons que, relativement au «modèle de protection», les facteurs de risque sont annihilés par les facteurs de protection en vue d'impacter positivement l'adaptation des apprenants. Ainsi, l'envie d'aller à l'école peut constituer pour l'apprenant, une motivation suffisante pour qu'il transcende les obstacles à la réalisation de son éducation. Toutefois, vu que notre étude n'a pas approfondi cette question, il convient de relativiser cette conclusion et de s'en remettre aux travaux futurs dans ce domaine.

Dans le cadre de cette résilience scolaire, interviennent aussi des stratégies d'enseignement comme les cours de soutien pédagogique que reçoivent les élèves en difficulté d'apprentissage. Cela permet, dans une démarche de « pédagogie différentiée 389» évoquée par PERRENOUD, de les mettre au même niveau de connaissance. « Les compétences de vie » ou life skills participent également à la résilience scolaire par l'apport des activités qui favorisent le développement personnel de l'apprenant pour affronter les menaces de son milieu de vie comme indiqué par le MENET/DPFC (2014). Dans la mesure où la personnalité de l'apprenant est déterminante dans le processus de la résilience, l'étude révèle que le passé scolaire est un facteur de protection face aux facteurs de risque. Il s'agit notamment du passé scolaire des déscolarisé précoces qui constitue un atout majeur face aux scolarisés tardifs. C'est l'avis de KOFFI et al (2009) qui affirment dans leurs travaux que :

388 P. VIANIN, 2007, op.cit., p.22

389 Selon A. WEBER et A. DE PERETTI, 1983, la pédagogie différenciée caractérise un ensemble d'attitudes d'ouverture aux jeunes personnalités des élèves, de démarches pédagogiques, de méthodologies et de la formation, de techniques et d'instruments didactiques ; qui prennent en compte, la diversité, l'hétérogénéité des apprenants ; qui visent à faire atteindre tous les objectifs cognitifs de valeur égale ou équivalente. p. 279

341

Tous ces élèves sont issus de la même classe passerelle en 2006 -2007. Aussi, appartiennent-ils à la même couche socioéconomique et bénéficiant du même environnement pédagogique et didactique. En conséquence, la différence du résultat scolaire peut s'expliquer par une variation trop importante des compétences initiales liées à leur passé scolaire.390

On peut conclure que la résilience qui participe à réussite des classes est le fait d'une conjugaison de facteurs.

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"Il faudrait pour le bonheur des états que les philosophes fussent roi ou que les rois fussent philosophes"   Platon