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Analyse critique de la crise de l'éducation scolaire chez Ivan Illich.


par Emmanuel De Marie MUSA MBWISHA
Institut Supérieur de Philosophie/KANSEBULA - Graduat en philosophie 2020
  

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CHAPITRE PREMIER : LECTURES DE LA CRISE DE L'EDUCATION SCOLAIRE

INTRODUCTION

Le premier chapitre de notre travail intitulé `'Lectures de la crise de l'éducation scolaire'', passe en revue différentes réalités qui nous aident à comprendre le fondement et l'origine de la crise que subit l'école aujourd'hui. Nous avons pointé quelques aspects importants pour comprendre la crise scolaire décrite par Illich ; c'est ainsi que nous commençons par l'aspect historique, question de comprendre la philosophie véhiculée d'abord par l'école antique et médiévale, ensuite par l'école moderne et contemporaine et enfin par l'école traditionnelle, coloniale et postcoloniale africaine, en s'appuyant sur le modèle de l'école de notre pays.

Le deuxième point de ce chapitre présente quelques manifestations de la crise de l'éducation scolaire et traite de la problématique de la mission et des finalités de l'école, du dysfonctionnement du système éducatif et de la baisse du niveau de l'enseignement moderne. Le troisième et dernier point de ce chapitre s'attèle sur l'analyse des facteurs illichiens de ladite crise. Il s'agit ici d'expliciter la conception illichienne de la fin de l'ère scolaire, l'anti-enseignement obligatoire et des méfaits de l'école. Voilà d'une manière synthétique les grandes lignes de ce chapitre que nous essayons de présenter en détail dans les lignes qui suivent.

1.1. La philosophie de l'école au fil de temps

Pour mieux comprendre la crise qui sévit l'éducation scolaire moderne, il nous est impérieux de recourir au passé pour analyser la philosophie de l'éducation antique et médiévale et celle du temps moderne et de l'époque contemporaine.

1.1.1. La philosophie de l'école antique et médiévale

Le système scolaire est jalonné de structures qui fixent ses règlements, ses programmes et ses finalités et qui donnent aujourd'hui tout leur sens à l'éducation. Ces différentes structures sont des fruits issus de l'histoire. Cette histoire pourra bien aider à comprendre les controverses scolaires mais surtout, elle nous aidera à trouver par les réflexions adéquates des solutions à la crise éducative actuelle, Ivan Illich  l'exprime mieux:

« Si nous replacions dans une perspective historique la controverse actuelle entre les défenseurs de l'école traditionnelle, les technologues de la pédagogie et les partisans de l'école libérée, ce serait une grave erreur que d'interpréter cette querelle comme le prélude à une révolution de l'éducation. Elle témoigne plutôt d'un moment de réflexion sur la meilleure façon de parvenir à faire d'un vieux rêve une réalité, c'est l'hésitation avant l'escalade ; il s'agit de faire en sorte que l'éducation soit totalement assurée par des éducateurs professionnels »5(*).

Il est manifeste, pour quiconque parcourt l'histoire de l'éducation et la compare avec une histoire de la philosophie, que les époques d'effervescence philosophique sont également des époques de pensées pédagogiques, et que les mêmes noms se rencontrent comme grands maîtres à la fois de la philosophie et de la pédagogie. Socrate, Platon, Aristote, Augustin, Thomas d'Aquin, Bacon, Rousseau, Locke, Kant, Hegel, Schopenhauer, Fichte et Spencher : les hommes qui professent de nouvelles conceptions de la vie, professent également de nouvelles conceptions en matière d'éducation.6(*)

Ainsi partant de cette double conception pédagogico-philosophique, nous devons savoir que le début de l'histoire éducative est marqué par une crise de la culture, qui a dissout systématiquement les modèles traditionnels, religieux et autoritaires qui présidaient la vie humaine du monde antique.7(*) Les historiens de l'éducation, affirme Illich, racontent habituellement ce que faisaient les maîtres, jadis et naguère, et ce dont on les créditait. Il en résulte une historiographie qui suppose que l'éducation ne connait pas de commencement et que, de ce fait, la demande en la matière ne finira jamais, ce qui conduit le philosophe de Cuernavaca a affirmé que :

«  L'histoire traditionnelle de l'éducation castre le recalé ; elle le flétrit en effet comme un être humain déficient qui, par sa propre faute ou celle de la société, manque d'une chose dont tous les êtres humains ont toujours eu besoin : l'instruction. Pour cette raison, considérer le recalé autrement, comme un fier refuznik8(*), requiert une approche inversée de l'histoire de l'éducation. Pour y voir plus clair, il nous faudrait nous focaliser non pas sur l'histoire du clergé éducatif, ses dogmes, mais sur l'histoire du mode de vie particulier qui tient pour allant de soi l'existence d'un système éducatif ».9(*)

L'une de sociétés antiques bien organisées en éducation fut la cité grecque, car elle était la première société ouverte par rapport à d'autres sociétés qui étaient encore de sociétés fermées, profondément autoritaires et basées sur un ordre social traditionnel. Les grecs ont connu simultanément l'éducation traditionnelle (militaire et aristocratique) et des éducations nouvelles (philosophique, mystique, sophistique). C'est à partir du Ve siècle AXN, que l'éducation traditionnelle grecque fut sérieusement remise en question. Cette éducation était familiale, aristocratique et militaire. Les parents se servaient de la poésie homérique en vue de transmettre des vertus (le courage, la force, l'intelligence).

La crise de la culture, l'essor de l'écriture, le développement des sciences, de la philosophie et de la démocratie ont engendré plusieurs formes d'éducation offrant une pluralité de formes éducatives. Cela obligea les grecs à chercher laquelle était la meilleure, d'où cette préoccupation ne portait pas sur le comment éduquer mais sur le pourquoi éduquer, i.e. les fins poursuivies par l'éducation et sur ses mérites, la question quel type d'individu voulons-nous former en l'éduquant, devient une priorité et vise non seulement la formation de l'individu, mais aussi celle du citoyen au sein de la communauté.

Avec cette nouveauté, les sophistes sont considérés comme les premiers professeurs, car c'est avec eux, que l'éducation cesse d'être une entreprise familiale ou une activité régie par le milieu social quotidien. L'éducation sophistique n'est pas traditionnelle, elle est consciente d'elle-même, elle poursuit sciemment un but ; elle n'est pas spontanée mais organisée, elle n'est pas collective mais individuelle. Les sophistes enseignent une culture générale, à savoir comment penser, comment vivre, comment parler. Un autre genre d'éducation contraire à celui des sophistes, est l'éducation socratique. Socrate développe une sorte d'éducation où il parle avec des jeunes gens, il cherche dans ses nombreuses discussions à apprendre qu'à enseigner, il renverse ainsi le rôle même du sophiste, en devenant l'élève de ses élèves.10(*)

L'avènement du Christianisme changea la vision de l'éducation antique, ainsi le pluralisme antique céda à une nouvelle unité culturelle qui a dominé l'occident pendant tout le temps médiéval. C'est à cette époque qu'apparait l'école comme un milieu moral organisé. Cette éducation scolaire sera mise au service de la foi et de l'Église, et les textes, grecs et latins, sont minutieusement choisis en fonction de leur concordance à l'orthodoxie chrétienne. L'école médiévale n'avait d'autre but que la conversion religieuse, elle influençait profondément l'instruction des élèves dans les vérités de la religion.11(*)

* 5I. ILLICH, Une société sans école, traduit de l'anglais par Gérard Durand, Paris, Éditions du Seuil, 1971, 115.

* 6 Cf. F. DE HOVRE, Essai de Philosophie pédagogique, Bruxelles, Éditions Albert Dewit, 1927, XIV.

* 7 Cf. C. GAUTHIER - M. TARDIF, La Pédagogie, théories et pratiques de l'Antiquité à nos jours, Montréal, Éditions Chenelière éducation, 32012 1-3.

* 8Personne qui refuse de participer aux activités obligatoires (I. JEUGE-MAYNART, Le Larousse illustré 2010, 867)

* 9 I. ILLICH, La perte des sens, traduit par Pierre-Emmanuel DAUZAT, Paris, Éditions Fayard, 2004, 66-67.

* 10 Cf. C. GAUTHIER - M. TARDIF,Op. Cit., 14-16.

* 11 Cf. Ibid., 44-45.

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