CONCLUSION
Après ce long survol, nous voici arriver au terme de
notre longue investigation qui a porté sur l'analyse critique de la
procédure pré -juridictionnelle face aux droits de l'homme en
RDC.
L'objet de cette étude s'est fondé sur la
manière dont les acteurs de la phase pré-juridictionnelle
exercent les pouvoirs qui leur sont dévolus par les textes nationaux et
internationaux face aux droits reconnus aux justiciables.
Pour que nos objectifs soient rigoureusementatteints, nous
avons recouru à la méthode exégétique qui a servi
à une interprétation téléologique des textes
légaux congolais et internationaux en les confrontant aux
réalités congolaises dans la société et dans les
parquets à travers leurs procédures. Cette approche a
été soutenue par la technique documentaire qui nous a
été utile pour consulter certains documents, ouvrages juridiques
et travaux scientifiques ainsi qu'à la technique d'entretien libre qui
nous a permis d'échanger avec quelques praticiens de droit pour la
réalisation de cette étude. Cet entretien n'a pas
épargné les détenus victimes directs de la violation des
droits, objet de cette recherche.
En effet, pour éviter une recherche vague et
imprécise et pour bien circonscrire notre domaine d'investigation,
quelques questions nous ont paru utiles à savoir :
ü Que faut - il faire pour humaniser les droits du
détenu pendant son parcours judiciaire à Mwene Ditu ?
ü Autrement dit, comment peut-on combattre, dans le cadre
des droits de l'homme, les abus de certains acteurs de l'instruction
pré-juridictionnelle ?
Il convient de dire que les acteurs de la phase pré
juridictionnelle abusent de leurs pouvoirs parce qu'ils sont liés au
besoin de se procurer des fortunes compte tenu de leur situation sociale et
financière précaireet celui de sauver leurs amis, connaissance,
camarades ainsi que leurs membres de famille.
Certes, le parquet joue un rôle déterminant dans
la politique répressive de notre pays ; raison pour laquelle, compte
tenu de la sensibilité de compétences et attributions qui sont
siennes, nous avons été particulièrement
intéressé à mener une étude là-dessus pour
dégager, dans la mesure du possible, des différents enjeux
résultant de la mise en oeuvre de sa compétence lors de la phase
pré juridictionnelle du procès pénal et le danger que
pourrait éventuellement encourir les justiciables dans le respect de
leurs droits universels leur reconnus au niveau aussi bien national
qu'international face à cette compétence étendue du
Parquet.
Il a été objectivement démontré
dans ce travail que les acteurs de la phase pré juridictionnelle
(Officier de la Police Judiciaire, Officier du Ministère Public)
jouissent de prérogatives énormes durant cette phase, lesquelles
prérogatives entravent certains droits fondamentaux garantis aux
particuliers. Nous avons en plus fait une large démonstration des
différents abus de pouvoir pouvant faire naitre de différentes
décisions que pourront prendre les Officiers de la Police Judiciaire et
du Ministère Public durant cette phase de la procédure
pénale. De cette manière, notre première hypothèse
est confirmée.
S'agissant de la limite et de la dénonciation des abus
de certains acteurs de l'instruction pré juridictionnelle, nous sommes
persuadé qu'il faut d'abord une certaine mobilisation des organismes de
la société civile, tels que les syndicats et les organisations
non gouvernementales bien qu'il s'ajoute une raison très importante au
cours de nos enquêtes, celui des structures matériellement
pauvres, partiellement dépendantes, mal organisées et
diversifiées de certaines ONG congolaises. Ensuite, des campagnes de
sensibilisation et d'éducation des acteurs de l'instruction pré
juridictionnelle au respect des droits de l'homme face à leur ignorance
des notions juridiques. Enfin, un renforcement des appareils judiciaires pour
sanctionner certains abus des acteurs de la phase pré juridictionnelle
face à leur pouvoir exorbitant.
Le diagnostic de l'état des droits de l'homme pendant
l'étape pré-juridictionnelle en droit congolais est plus
alarmant.
La situation judiciaire des détenus n'est
généralement pas bonne. Il se dégage clairement que les
droits reconnus aux personnes arrêtées et placées en
détention ne sont pas respectés notamment : - le droit pour toute
personne arrêtée d'être informée immédiatement
ou au plus tard dans les vingt-quatre heures des motifs de son arrestation et
de toute accusation portée contre elle, - le délai de garde
à vue qui ne peut excéder quarante-huit heures - le droit
à un procès juste et équitable dans les délais
légaux.
Les visites de prisons ont permis, entre autres, d'avoir une
indication claire quant au problème que pose la détention
préventive en montrant qu'il existe une disproportion entre le nombre de
personnes placées en détention préventive par rapport
à l'ensemble de la population carcérale. Cette part des
«préventifs» oscille, dans beaucoup entre 60 et 80 %.
La durée moyenne d'incarcération de chaque
détenu est aggravée par le mauvais fonctionnement de la justice
et provoque la surpopulation de la population carcérale qui contribue
à accentuer les mauvaises conditions matérielles de
détention et le non-respect de la plupart des règles
édictées dans l'ensemble des règles minima pour le
traitement des détenus et dans la législation congolaise en la
matière ; détériorer les conditions physiques des
détenus et à faciliter la transmission des maladies infectieuses
(comme la tuberculose) chez les détenus, la gale, etc. aggraver
anormalement les conditions détention de ceux, très nombreux, qui
sont en préventive alors que ces personnes doivent
bénéficier de la présomption d'innocence et, à ce
titre, jouir de conditions de détention différentes des
condamnés qui ont été reconnus coupables d'infractions
pénales.
Pour tout dire, le traitement des détenus à
Mwene Ditu demeure en effet très en - dessous de l'acceptable et de la
dignité humaine. Les déficiences graves dans l'alimentation,
l'hygiène, les soins de santé placent les détenus dans un
environnement très comparable à un véritable mouroir. Il
faut à tous égards encourager les efforts visant à
humaniser les personnes détenus qui sont nos semblables et des vrais
êtres humains à part entière.
Sans avoir la prétention de répondre de
manière absolue et définitive à toutes les questions
soulevées par cette étude, nous pensons ouvrir toutes les portes
à toute critique et observations utiles pour l'édification du
Droit en général et du Droit positif congolais en particulier. Ce
travail est donc notre humble et modeste contribution à la construction
du Droit ; d'où nous demandons l'indulgence de nos lecteurs pour
toutes les imperfections, car ce travail comme oeuvre humaine ne sera jamais
parfait.
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