Dynamiques identitaires et enjeux de bifurcation suite à un licenciement économique: le cas de personnes accompagnées dans le cadre d'un contrat de sécurisation professionnelle( Télécharger le fichier original )par Aude Le Garrec Université Lille 1 - Licence GAP 2016 |
La possibilité de percevoir une prime de reclassement : le bénéficiaire du contrat de sécurisation professionnelle qui retrouve avant la fin du dixième mois du dispositif un emploi sous forme de contrat de travail à durée indéterminée, de contrat de travail à durée déterminée ou de contrat de travail temporaire d'une durée d'au moins six mois, cesse de bénéficier du contrat de sécurisation professionnelle, et peut solliciter le versement d'une prime au reclassement. Le premier versement intervient au plus tôt au lendemain de la date de reprise d'emploi ;le second versement intervient trois mois après la date de reprise d'emploi, sous réserve que l'intéressé exerce toujours cet emploi. Cette prime ne peut se cumuler, pour le même emploi, avec l'indemnité différentielle de reclassement.Le contrat de sécurisation professionnelle est conclu
pour une durée de 12 mois et prend effet dès le lendemain de la
fin du contrat de travail. Cette durée est allongée des
périodes d'activités professionnelles et intervenues après
la fin du 6ème mois du contrat de sécurisation professionnelle,
dans la limite de trois mois supplémentaires. Pendant la durée du CSP, le bénéficiaire de ce contrat conserve la qualité d'assuré et bénéficie du maintien de ses droits aux prestations du régime obligatoire d'assurance maladie, invalidité, maternité, décès, qu'il s'agisse des prestations en nature (remboursement des dépenses de santé, dans la limite des tarifs de la Sécurité sociale) ou des prestations en espèces (indemnités journalières). Il dispose en outre d'une couverture au titre du régime des accidents du travail survenus par le fait ou à l'occasion des actions favorisant son reclassement. Pendant la durée de son contrat de sécurisation professionnelle et en dehors des périodes de travail qu'il peut être amené à effectuer et au titre desquelles il sera rémunéré directement par l'entreprise ou l'organisme qui l'emploie, le bénéficiaire du CSP : cette allocation spécifique de sécurisation professionnelle est versée mensuellement.Elle est égale à 75 % du salaire journalier de référence. Le bénéficiaire du contrat de sécurisation professionnelle qui, au terme de ce contrat est à la recherche d'un emploi, peut bénéficier de l'allocation d'aide au retour à l'emploi, dès son inscription comme demandeur d'emploi, sans différé d'indemnisation, ni délai d'attente. Afin de s'assurer de l'engagement des deux parties, ID Formation fait signer une chartre d'engagement à l'accompagnement CSP lors du premier rendez-vous.4(*) A partir de tous les éléments proposés par ce contrat détaillés ci-dessus, mes observations et mes constats,j'ai continué à me questionner. La partie suivante y sera consacrée. 4. Observations, constats et questionnements
Dans un premier temps, je me suis attelée à tenir consciencieusement un journal de bord. En effet, lors de mes entretiens individuels avec les bénéficiaires du Contrat de Sécurisation professionnel, je notais les faits observés sur une page et dans une autre page mes commentaires, mes questionnements... Le support du journal de bord m'a permis de faire émerger les premiers questionnements, questionnements qui m'ont amenée à diverses lectures. Au début de mon stage, je participais activement aux activités, accompagnée ou seule, ce qui m'empêchait de prendre le recul nécessaire à l'observation de la situation. Depuis le mois de novembre, j'alterne les périodes d'observations directes et participantes. L'observation est une méthode scientifique. « L'observation directe est une démarche d'un savoir au service de finalités multiples, qui s'insère « dans un projet global de l'homme pour décrire, comprendre son environnement et les évènements qui s'y déroulent » ». (Massonat, 1987 : 17)5(*). Il existe deux formes principales d'observation : l'observation directe et l'observation participante. Dans la première, l'observateur recueille des données pour ensuite les inscrire dans son journal de bord. Il reste en retrait du groupe. La deuxième, est l'observation participante : « L'observation participante est une technique de recherche qualitative par laquelle le chercheur recueille des données de nature surtout descriptive en participant à la vie quotidienne du groupe, de l'organisation, de la personne qu'il veut étudier. » (Deslauriers, 1991 : 46). E. Dans l'observation participante, l'observateur s'insère dans le groupe qu'il étudie et prend part à ses activités. Il doit définir alors les limites de son observation car il aboutira à des conclusions différentes selon son degré d'implication. Observer en participant permet une meilleure compréhension de ce qui est vécu mais peu impliquerune trop grande identification au milieu. Il faut trouver un juste milieu. L'observateur doit être patient, tolérant et sympathique, il ne doit pas juger, ni prendre parti. Le défi est de perturber le moins possible le milieu observé. Ce que je peux retenir de cette méthodologie, est que l'observation qu'elle soit directe ou participante est un outil précieux pour le chercheur. Le recueil des données doit être pratiqué le plus méticuleusement possible afin de procéder par la suite à une analyse la plus complète et précise possible. Le chercheur doit donner de la cohérence à ces notes, il ne suffit pas de les lister mais aussi de les exploiter et de les interroger.
Les différentes observations, actions, entretiens conduits auprès de ce public m'amènent à certains constats : - Ce sont pour la grande majorité des personnes qui ont exercé le même métier pendant de longues années, à un poste très précis (travail à la chaîne, cariste, nettoyeur graisseur...) - Ce sont des travailleurs pour la plupart très peu diplômés, qui ont débuté leur métier très jeunes. - Ces personnes se sentent dépassées et ressentent une perte d'identité consécutivement à leur perte d'emploi - Un petit nombre plus jeune voit une opportunité à se reconvertir complètement. - Leur connaissance du numérique est très faible, ils se sentent perdu face aux nouvelles technologies - Ils sont très peu mobiles : soit parce qu'ils ne possèdent pas de permis de conduire ou de véhicule, soit parce qu'ils n'ont jamais eu l'habitude de devoir se déplacer loin pour travailler. - Je me suis rendue compte que le fait de les aider à refaire leur curriculum vitae et une lettre de motivation les déstabilisaient voire les effrayaient car cet activité dévoilait leur possible manque de diplôme, leurs compétences qu'ils pensent restreintes...
Suite à ces constats, je me suis posée un certain nombre de questions pour élaborer ma question centrale. En quoi les modes d'accompagnement en insertion professionnelle permettent aux personnes contraintes à quitter leur métier de s'orienter vers une reconversion professionnelle ? Cette question s'est affinée au fur et à mesure, je l'ai ainsi reformulée : En quoi le contrat de sécurisation professionnelle favorise t'il la reconversion des personnes contraintes à quitter leur métier ? Quelles sont les tensions identitaires qui traversent ce public contraint à se reconvertir ? Quel rapport ont-ils vis-à-vis de l'accompagnement proposé par les professionnels ? La biographisation peut-elle être considérée comme un outil dans leur accompagnement ? En quoi l'accompagnement professionnel est-il un apport pour leur orientation ? Quel usage font-ils de l'accompagnement professionnel ? Pour commencer, il me semble important de rentrer au coeur du métier de Conseiller en Insertion professionnelle dans le cadre du CSP. Il convient ainsi de définir la notion d'accompagnement, socle de ce métier. Deuxième partie 1. Au coeur du métier de Conseiller en Insertion professionnelle
La notion d'accompagnement étant saillante dans notre mission, il convient de situer l'existence de différentes pratiques. Cette notion est difficile à définir précisément. L'accompagnement est toujours cadré institutionnellement, politiquement et financièrement et se compose d'une relation entre deux personnes. PAUL6(*) parle d'une « Nébuleuse » composée, selon elle, de huit formes d'accompagnement. Il existe : le coaching dont l'idée dominante est la résolution d'un problème, le counselling qui prend ses origines dans le courant humaniste (écoute active, bienveillance, centré sur la réalisation d'un individu qui s'épanouit au travers de la relation de confiance établie). Ensuite, vient le conseil ou consultance centré sur les éléments apportés par l'accompagnateur pour que l'accompagné fasse ses choix. Le tutorat est basé sur une formation en alternance associée à l'idée du facilitateur où le professionnel connait et donc guide le novice. Le mentorat est la figure du passeur intergénérationnel. La médiation met en avant la notion du tiers intermédiaire (règlement d'un litige). Le compagnonnage est basé sur le partage entre deux générations (Compagnon du devoir). Et le sponsoring ou le parrainage, dans lesquels l'accompagnateur va faire profiter à l'autre de son réseau, ses ressources. M. PAUL décrit des pratiques d'accompagnement « Elles sont toutes fondées sur une dimension relationnelle forte et l'idée d'un cheminement en commun (processus, développement séquentiel dans le temps 7(*)». Le counselling et le conseil me semblent à ce stadeêtre les formes les plus appropriées de ces pratiques pour accompagner le public dont je m'occupe. Ce n'est qu'une hypothèse que je tenterai de confirmer tout au long de mon étude. La démarche compréhensive et l'écoute active que nous utilisons auprès de ces personnes semblent dans la lignée de ces formes d'accompagnement. 1.2 Vers une démarche compréhensive A l'instar de Mokhtar KADDOURI, nous nous inscrivons dans une démarche compréhensive pour étudier ce qui se joue pour les sujets concernés par ce licenciement. « Du point de vue de la pratique professionnelle, les professionnels ont une marge de manoeuvre pour faire parler le dispositif autrement que comme orientations institutionnelles. Mais cela suppose d'être à l'écoute des émergences, et pas seulement d'être une courroie de transmission et d'imposition d'un discours officiel. C'est toute la différence que l'on peut faire entre dispositifs d'accompagnement compréhensif et dispositifs d'accompagnement gestionnaire. La démarche compréhensive permet, tout en étant garant du dispositif institutionnel, d'être à l'écoute des émergences pour voir comment articuler offre et demande de transition. Cela suppose aussi tout un travail de communication pour faire évoluer les représentations qui structurent les rapports des sujets à ces dispositifs.8(*) » Ce que je retiens de cet extrait, c'est la possibilité
pour le professionnel de s'octroyer dans sa relation avec l'accompagné
un certain recul par rapport au cadre institutionnel. Il peut ainsi aider cette
personne à se trouver, à se comprendre pour avancer dans son
parcours. Dans le cadre de ma mission, lors d'entretiens individuels, c'est
l'écoute active qui me permet 1.3L'écoute au service de l'accompagnement
L'écoute active est préconisée par Carl Rogers, psychologue américain. Elle implique la reformulation systématique des propos de l'usager afin d'être sûr de les avoir bien compris et de ne pas les déformer et de recueillir son approbation. La personne se sent donc en confiance et donc peut progresser plus facilement dans sa réflexion. Elle permet de recueillir l'information la plus complète possible dans une relation de confiance qui permet à chacun de se sentir reconnu et compris. Elle démontre de l'intérêt de l'accompagnant qui s'empêche de juger et d'interpréter. Les conseillers sont là pour donner l'impulsion, poser des questions pertinentes pour que l'usager progresse et pour relever dans ses propos des détails qui paraissent à priori insignifiants mais qui en fait vont l'aider à trouver des solutions et enlever des barrières que l'individu se met sans en être conscient : « Il n'y a pas de détails. Tout est signe. »9(*) « En remarquant ces signes, nous restructurons sans la trahir la vie sociale réelle qui, dans son immédiateté peut rester confuse, mais qui n'en comporte pas moins un sens pour les personnes ayant besoin, comme tout un chacun au sein des pratiques d'accompagnement, d'un minimum de considération »10(*).LHOTELLIER préconise aussi l'importance de lire entre les lignes pour un accompagnant et de percevoir ce qui ne s'énonce pas suffisamment clairement.
La notion d'orientation qui est, un des objectifs du processus de l'accompagnement auprès de ce public, nous semble également intéressante à situer : « Un présupposé fort accompagne l'usage du terme orientation : l'affirmation conjointe de l'indétermination du devenir humain et de l'emprise possible de l'homme sur la gestion de son avenir. La référence « éducative » souvent associée à ce terme signifie de manière implicite que les médiations sociales proposées se justifient par la reconnaissance d'une certaine incompétence de l'adulte à résoudre par lui-même ses propres problèmes et comporte l'hypothèse que des interventions externes peuvent contribuer à réduire celle-ci et à accroître par là ses chances d'adaptation à des situations professionnelles nouvelles. 11(*)» Ce qui sous-entend que ces personnes auraient des difficultés à trouver elles-mêmes leur nouvelle orientation. Le professionnel n'est pas là pour influencer l'individu dans son orientation mais il doit l'aider à trouver par lui-même ce qui lui correspond le mieux. Les personnes que je suis, ont d'autant plus besoin de cet accompagnement dans leur orientation qu'elles n'ont pas pu anticiper cette transition. Ce qui peut être difficile pour le professionnel est l'urgence que certaines de ces personnes mettent dans cette quête d'orientation. Nous suivons un bénéficiaire d'une cinquantaine d'années qui, même s'il n'a pas de rendez vous, vient presque tous les jours nous montrer l'avancement de ses démarches pour sa formation de cariste. Il nous pose beaucoup de questions et voudrait qu'il soit possible de lui répondre à l'instant. Il avait au départ changé de nombreuses fois de projets : gardien d'immeuble, agent d'entretien du bâtiment pour terminer par cariste en passant par une formation. Ces nombreux projets démontrent le stress généré par cette nouvelle situation et le besoin d'accompagnement qui en découle. Nous lui avons expliqué patiemment que les demandes de financement de sa formation prennent un certain temps car les décisions sont prises lors de commissions spéciales chez le mandataire. Finalement, les personnes que j'accompagne se trouvent, pour leur orientation future, semblerait-il devant quatre possibilités : - Celui de continuer à exercer le même métier, - Celui de continuer le même métier mais en se formant auparavant pour acquérir de nouvelles compétences et progresser dans ce même domaine, - Celui de se reconvertir, - Ou celui de créer son entreprise. L'accompagnement d'un professionnel semble à ce stade, au vu des entretiens que j'ai pu mener une aide précieuse. Le professionnel est présent ne serait-ce que pour soutenir la personne dans l'acceptation de sa nouvelle situation, et par la suite la guider vers une nouvelle orientation. Cela reste une hypothèse à confirmer. Dans la partie suivante, j'évoquerai trois notions qui semblent saillantes pour les personnes accompagnées. 2. Au plus près des accompagnés
Afin de répondre à ces questions, je vais établir d'autres hypothèses que j'infirmerai ou confirmerai en mettant en place des investigations méthodologiques qualitatives. Les modes d'accompagnement du professionnel de ce public vont dépendre d'un certain nombre de facteurs : - Capacité de l'individu à accepter la situation actuelle : injonction à se reconvertir, à changer de travail même si cela reste dans le même domaine. - Capacité de l'individu à se projeter. Cette capacité va dépendre de l'âge de l'individu, de son sexe, de son niveau d'études, de son attachement à son ancienne entreprise...Certains individus ont choisi de faire partie du plan social et donc d'être licenciés économiquement car ils étaient capables de se projeter dans un nouveau projet professionnel ou tout simplement prêts à partir en retraite. Mais tout le monde n'est pas en capacité à se projeter comme le précise Sophie Denave. Comme elle le souligne, il existe différentes attitudes face à la prise de risque, qui dépendent des conditions d'existence présente, de la conjoncture économique et des conditions de vie passée « qui vont nous amener à appréhender plus ou moins la prise de risque 12(*)». Elle indique qu'en général la majorité des personnes cherchent à sécuriser au maximum leur trajectoire. J'ai pu le constater au cours des entretiens avec les personnes concernées par ce licenciement : certaines prennent un nouvel élan et ce licenciement est perçu comme une chance à trouver enfin un accomplissement professionnel et d'autres semblent perdus et se sentent en perte de stabilité personnelle et professionnelle. Mais tous semblent vouloir retrouver la stabilité passée. Comme dans de nombreux domaines de l'insertion professionnelle, la notion de projet apparait et il semble intéressant de l'étudier dans le cadre du contrat de sécurisation professionnelle.
La notion de projet nous apparait pertinente à mobiliser. Le projet peut être défini comme la manière d'atteindre un objectif, ou l'action de se fixer un but, un objectif13(*). Denave parle de « nouveau prêt à porter » 14(*) : «On pourrait désormais parler d'une organisation générale de la société par projets15(*), suggérant une conception « quasi-managériale » de le condition humaine procédant par objectifs et moyens16(*). En phase avec les logiques de l'individualisation et du volontarisme de notre « culture « postmoderne 17(*)», le projet tend à s'imposer comme une norme sociale dominante à laquelle chacun doit se soumettre18(*). » Le CSP est en lui-même un projet ambitieux : celui de permettre un retour rapide à l'emploi concernant les personnes licenciées économiquement. Les personnes y adhérant doivent alors à leur tour formuler un projet dans le but soit d'une reconversion, soit d'une bifurcation ou d'une création d'entreprise dont le but est de retrouver un emploi dès que possible. Le projet apparait d'ailleurs à de nombreuses reprises dans la chartre d'engagement que les bénéficiaires du CSP doivent signer lors du premier rendez-vous.19(*) Une personne ayant un projet bien défini aurait donc plus de chances de retrouver un emploi. D'ailleurs, le contrat de sécurisation professionnelle lui offre des moyens de le concrétiser. « Nous pouvons alors définir le modèle du projet comme l'ensemble formé par : - La conviction selon laquelle une personnea d'autant plus de chances de réussir son insertion sociale et professionnellequ'elle a un projet et qu'elle y tient ; - L'ensemble des dispositifs et des pratiques mis en oeuvre en conséquence : entretien d'analyse ou de clarification du projet, modules de définition du projet, enquêtes ou stages de vérification du projet, etc... 20(*)». Mais est-il aisé pour une personne venant d'être licenciée économiquement et donc dans une situation précaire de penser à un projet ? Le CSP est il une réelle aide à cette réalisation de projet ? Le CSP ne dirige t'il pas les personnes au devant de désillusions encore plus violentes ? Pour mieux comprendre, il convient de mobiliser également les notions de reconversion et de bifurcation.
Dans ce paragraphe, nous allons étudier les concepts de reconversion et de bifurcation qui font partie de l'élaboration du projet évoqué précédemment. De nos jours, rares sont les personnes travaillant de longues années dans la même entreprise. La dégradation du marché du travail et la multiplication des plans sociaux y participent certainement. « Ces dernières années, l'idée commune d'une intensification de la mobilité s'est répandue. Les vies professionnelles seraient désormais marquées par une plus grande mobilité professionnelle : chacun devrait s'attendre à changer d'emploi, éventuellement de profession plusieurs fois en cours de vie active21(*). » (Germe, cité par Denave). C'est ainsi que la notion de reconversion est utilisée de plus en plus souvent : « La mobilité professionnelle recouvre différentes situations : il peut s'agir de changements d'entreprise, de secteur, de catégorie socioprofessionnelle, de fonction, de statut, voire d'emploi (actif occupé, chômeur, inactif). La reconversion en serait une déclinaison particulière sous-tendant une idée de transformation ou d'acquisition de nouvelles compétences. Mais l'usage commun fait souvent l'amalgame entre de situations très distinctes comme une juriste devenue fleuriste ou un médecin partie travailler dans l'humanitaire ou bien encore un cuisinier ouvrant son restaurant.22(*) » Pour Denave, le terme de reconversion est utilisé dans beaucoup trop de situations que ce soit dans de « simples glissements de situations dans des secteurs voisins» ou dans des changements radicaux. C'est pourquoi, elle préfère différencier les deux situations : « Parler de rupture professionnelle est ainsi une façon de se démarquer du terme de reconversion qui agrège des phénomènes trop hétérogènes. 23(*)». En ce sens, nous partageons cette analyse. Les ruptures professionnelles que Denave appelle aussi bifurcations ou réorientations professionnelles doivent remplir de son point de vue trois conditions : - Un changement radical de métier et de domaine professionnel - Un changement effectif et non un projet - Une ancienneté minimale dans le métier initial pour exclure les « petits boulots » où l'on change régulièrement. Elle différencie donc la reconversion d'une bifurcation. Cette distinction nous est apparue essentielle dans l'analyse ultérieure des données. « Le passage d'une situation professionnelle à une autre occasionne toujours des modifications ressenties de la part des protagonistes : métier plus ou moins différent, nouvelle organisation du travail, environnement plus ou moins distinct,etc. 24(*)». Il convient maintenant d'appréhender d'autres notions qui participent de la construction de notre cadre théorique.
Face à cette pluralité de situations, une des hypothèses concerne leur identité. En effet, le sujet a besoin de faire le point sur lui-même, de se retrouver, que la reconversion soit voulue ou subie.
En effet, le sujet se trouve en tension identitaire entre son identité passée et future : il vit une rupture identitaire qu'il faut surmonter. Poursuivons nos investigations en étudiant le concept de dynamique identitaire qui est sous-jacent à cette hypothèse. Selon Kaddouri, « Dans ce moment culminant, dans lequel le sens même de l'identité personnelle est questionné, la personne est acculée à agir, à mettre en place des stratégies identitaires pour gérer et atténuer les tensions à vivre. Ces stratégies sont plurielles et varient en fonction de la dynamique (de continuité, de rupture, de redéfinition de soi) dans laquelle l'individu est engagé.25(*) » Ainsi, la personne est amenée à mettre en place des stratégies identitaires pour réduire ses tensions et remanier son identité pour retrouver un équilibre. La question des dynamiques nous intéresse, au sens où elle ne fige pas l'identité. Kaddouri préfère parler de dynamique identitaire, « qui renvoie à un processus et montre que rien n'est figé, que l'identité se remanie en fonction des situations, des interactions sociales, au concept d'identité, qui expose à mon sens au risque de l'étiquetage, de l'assignation.26(*) » La difficulté identitaire va dépendre de la manière dont la personne va aborder cette rupture, ici sa perte d'emploi. La rupture identitaire se fera d'autant plus pesante pour les personnes qui vivent cette perte d'emploi comme une catastrophe dans leur parcours biographique. La reconstruction identitaire sera d'autant plus difficile. D'autres voient en cette transition une opportunité à changer de domaine professionnel. Ils n'auraient peut être pas osé quitter leur emploi d'eux-mêmes. Peut-être voient-ils apparaître des voies professionnelles possibles jusqu'alors imaginées inaccessibles. Cet évènement, au départ contraint, sera vécu comme une chance. Kaddouri décrit la dynamique identitaire également comme suit : « Il s'agit d'une totalité complexe, jamais stabilisée puisque soumise de façon permanente à un travail identitaire de construction, de destruction et de reconstruction de soi. 27(*)» Selon leur situation actuelle, ces personnes se trouvent dans des dynamiques identitaires singulières. Selon Kaddouri, il en existe cinq : - « Les dynamiques de continuité identitaire » : la personne veut prolonger une identité qu'elle considère comme satisfaisante. Il appelle cette action aussi « le projet d'entretien de soi »ou « projet de préservation de soi » selon le manque possible de ressources personnelles pour y arriver. Il me semble que cela concerne les personnes qui ont très mal vécu le licenciement, leur identité à ce moment là leur convenait entièrement.Pour la conserver, la personne met alors en place des stratégies. Il en existe trois : « La préservation conflictuelle conduit le sujet à mettre en place une stratégie d'affrontement avec un autrui significatif qui constitue pour lui une menace identitaire.28(*) », « La préservation collaborative conduit à l'adoption d'une stratégie d'arrangement, explicite ou tacite, avec un autrui vis-à-vis duquel le sujet est socio-affectivement dépendant », et enfin « la préservation par repliement conduit à s'inscrire dans une stratégie d'isolement. N'ayant pas les ressources d'affrontement ni celles de l'alliance avec autrui, le sujet choisit ou est condamné à le faire, de se retirer de la scène de l'interaction et de la confrontation. ». - « Les dynamiques de transformation identitaire » : la personne souhaite acquérir une nouvelle identité et abandonner l'actuelle. Ces stratégies pour la réalisation de la transformation identitaire peuvent être soutenues ou non par autrui. - « Les dynamiques de gestation identitaire » : dans lesquels, le projet de l'identité est en cours de réflexion. On y retrouve « le projet de confirmation de soi », « le projet de reconstruction de soi » qui est particulièrement intéressant dans mon étude car cela concerne des personnes ayant vécu « une blessure identitaire causée par un autrui significatif dont ils dépendent institutionnellement et affectivement ». « L'enjeu identitaire est de réussir la restauration et la réhabilitation de leur identité. Il s'agit de retrouver l'estime de soi d'autrefois, c'est-à-dire, le retour à un état identitaire antérieur. ». Ensuite, vient le « projet de redéfinition de soi » dont l'enjeu est « la redéfinition d'un soi devenu flou ». - « Les dynamiques de destructivité identitaires et la dynamique d'anéantissement identitaires ». Dans quelles dynamiques identitaires se situent les personnes que j'accompagne ? Quelle stratégie utilisent-elles ?
Au sujet de cette période particulière, se situant entre la perte de leur emploi et une nouvelle période d'activité encore indéfinie, Mazade et Hinault écrivent : « La transition est une situation d'affrontement à l'incertitude et un moment d'épreuves (chômage, contrôle de la recherche d'emploi, la stabilisation et la (re)construction d'une identité professionnelle, éventuelles difficultés d'intégration dans les milieux de travail, etc...). Dans certaines circonstances, par exemple, lors de licenciement économiques, les transitions professionnelles sont un moment de « crise biographiques » (Mazade, 2011) qui met à l'épreuve le milieu conjugal et familial. Dans d'autres cas de figure, les transitions professionnelles réactivent des projets enfouis et des aspirations contrariées pendant la scolarité (Négroni, 2007).29(*) ». Parmi les personnes que je suis régulièrement, je reçois une dame, âgée de 55 ans dans l'obligation de travailler encore 5 ans avant de partir en retraite. Cette dame a commencé à travailler à l'âge de 16 ans et semble complètement perdue depuis son licenciement. Son mari l'accompagnait à chaque séance. J'en étais d'ailleurs étonnée et en faisait part à ma tutrice de stage. Quel pouvait être le bénéfice de la présence perpétuelle de son mari pour elle ? Je pense que ce n'est pas en étant toujours accompagnée de son mari, qu'elle pourrait progresser. Elle a besoin de se retrouver seule avec un professionnel pour prendre le recul nécessaire à sa nouvelle situation. Cette dame vit pour l'instant une véritable « crise biographique30(*) ». Dans une autre situation, un monsieur de 59 ans qui sera à la retraite d'ici six mois. Pour lui, c'est une véritable opportunité qui s'est présenté à lui : pouvoir préparer sa retraite pendant cette période de transition tout en ayant un maintien de salaire pendant un an. « Cet agencement institutionnel transforme le chômage en transition autorisant ces acteurs à s'engager dans des activités qui forment un nouveau cadre social d'identification, qui deviendra celui de la retraite. 31(*)». Il pourra aussi bénéficier d'une formation informatique, ce qui le rassure pour l'avenir. Un autre cas concerne un homme de 45 ans, cariste au sein de l'usine, qui a décidé rapidement de créer son entreprise dans l'hydro-dipping (processus qui consiste à transférer grâce à l'eau des images sur des objets). En effet, pour lui le licenciement est une opportunité à créer sa société. Il y pensait depuis quelques temps sans bien sûr oser se lancer. Titulaire d'un CDI, il se trouvait alors dans une situation stable et rassurante. « De plus en plus de salariés aspirent à un autre avenir professionnel. Mais rares sont ceux qui franchissent le pas. Quitter son métier, c'est-à-dire entrer dans la deuxième phase dite de désengagement, est tributaire du degré de flexibilité des institutions, des métiers et secteurs professionnels, ainsi que des caractéristiques sociales des acteurs (position sociale et géographique, dispositions et capitaux)32(*) ». Il semble difficile pour des salariés de prendre le risque de se retrouver dans une situation précaire en réalisant le projet désiré. Ces trois exemples soulignent la pluralité de réactions qui apparaissent face à la situation actuelle (le licenciement). Chaque individu va tenter de se reconstruire en mobilisant des stratégies identitaires propres.
A ce stade, il convient de mobiliser la notion de biographisation, celle-ci apparait féconde pour notre sujet. Cette notion est liée à la dynamique identitaire car elle permet à la personne de raconter ses expériences professionnelles, familiales et autres, et, de se construire par le récit. Delory-Momberger appelle « biographisation le travail psycho-cognitif de configuration temporelle et narrative, par lequel les hommes donnent une forme propre au déroulement et aux expériences de leur vie. 33(*)» L'énonciation du parcours de vie passé et présent représente un point de départ pour le futur. « En tant que pratique, le recours à la reconstitution des évènements de vie dans leurs interactions sociales et environnementales et la production de significations sont considérés comme des moments essentiels de la construction des projets d'orientation. L'histoire de vie articule dans le présent le passé de la personne et son futur possible et souhaitable34(*). » Ces personnes contraintes à se reconvertir qui n'ont pu se préparer à cet évènement, ontbesoin de faire le point sur leur parcours de vie. Cette démarche leur permettra de progresser sur l'appropriation de leur nouvelle identité et les aideront à se projeter dans l'avenir. Les questions posées par ces personnes sont : Qui suis-je maintenant que je ne suis plus où j'avais l'habitude d'être, de travailler ? Quelles sont mes acquis pour cette nouvelle orientation ? Comment puis-je mettre à profit mon passé pour construire mon futur ? En quoi l'accompagnement d'un professionnel peut m'aider à accepter ma nouvelle situation afin de pouvoir me conduire dans une nouvelle orientation ? La biographisation permet d'essayer de répondre partiellement à ces questions. Dans le cadre du travail que j'ai engagé lors de ma reconversion, et les mises en mots partagées dans le cadre des écrits universitaires et des entretiens d'accompagnement au mémoire participent de ce processus. Ainsi, lors de mon bilan de compétence, j'ai pu écrire mon parcours professionnel et discuter de mon parcours personnel avec la psychologue chargée de mon suivi. C'est ainsi que j'ai avancé dans ma progression sur le plan professionnel et personnel et résoudre mon mal-être. C'est pourquoi, ce travail d'écriture et de verbalisation serait intéressant et enrichissant pour ces personnes rencontrées dans le cadre de la mission, d'autant plus qu'elles n'ont pu anticiper tous ces changements. « L'accompagnement d'un bilan combine à la fois l'apport des informations nécessaires pour faire des projets et les conseils qui permettent au bénéficiaire de se situer35(*). » Le bilan de compétences n'est pas le seul outil qui permet de mieux se connaître, l'accompagnant peut aussi utiliser des tests de personnalité et de découverte du profil professionnel. Toutes ces techniques y compris les échanges verbaux entre les accompagnants et accompagnés font partie de la biographisation. Le travail du professionnel semble être un atout pour ce public qui seul aurait plus de difficultés à y parvenir. D'ailleurs, certains auteurs rendent compte de l'effet de l'absence des dispositifs d'accompagnements des transitions (C.Graille36(*)et F.Dubois/ P.Terral)37(*) : les individus sont alors renvoyés à leurs ressources propres (en termes de compétences, de réseaux, de capitaux...) pour tenir dans ces périodes d'incertitude, produisant des inégalités fortes quant à l'issue possible de l'entre-deux.38(*) Les personnes accompagnées peuvent donc s'appuyer sur les ressources et le réseau du professionnel et semblent avoir plus de chances de parvenir à atteindre leur objectif. Dans la partie suivante,j'aborderai la construction de mon dispositif méthodologique aux fins de répondre à ma question de recherche. Troisième partie 1. Dispositif méthodologique Dans la mesure où notre recherche se veut compréhensive, il apparait que l'utilisation de l'entretien semi-directif est la plus appropriée pour mieux comprendre les dynamiques identitaires en jeu concernant les sujets engages dans le dispositif CSP. 1.1 Définition et explicitation du choix de l'outil : L'entretien semi-directif J'ai choisi l'entretien semi directif comme technique de recherche pour collecter mes données. En effet, il permet une communication et une interaction plus vaste que le questionnaire. La personne interviewée est libre de s'exprimer autour des questions principales. Dans un de ses ouvrages, Combessie explique : « Parmi les diverses formes possibles de collectes d'informations orales, le sociologue accorde une importance particulière à l'entretien semi-directif, nommé aussi entretien centré : il préfère ces appellations à celle d'entretien non- directif dans la mesure où il choisit et annonce au préalable le thème ou les thèmes et qu'il dispose d'un guide d'entretien. 39(*)». Nous souscrivons à cette option. Ainsi, j'ai établi un guide d'entretien40(*), qui est comme le définit Combessie, « « un mémento » (un pense-bête). Il est rédigé avant l'entretien et comporte la liste des thèmes ou des aspects du thème qui devront avoir été abordés avant la fin de l'entretien. 41(*)» J'ai ensuite élaboré ma grille d'entretien avec une dizaine de questions42(*) :« L'objectif de l'entretien semi-directif est d'obtenir des entretiens de contenu homogène où tous les points de vue seront prévus abordés.43(*) ». C'est-à-dire « obtenir des informations approfondies et de qualité sur le vécu, le ressenti ou la réflexion de personnes pour l'intérêt de leur apport à l'objet qui a justifié le recours à cette technique44(*). »
Le choix de l'échantillon concerne des personnes adhérentes au CSP, c'est-à-dire inscrites depuis octobre 2016. Cette construction nécessite d'être abordée au regard de la complexité d'une double implication quant à mon positionnement à la fois d'accompagnatrice auprès de ces personnes mais également d'étudiante dans une posture de recherche. Difficultés rencontrées Au départ, j'avais choisi d'interviewer des personnes de la même usine. J'ai changé d'avis en m'apercevant que je suivais ces personnes régulièrement et donc que je les connaissais déjà beaucoup, ce qui constituait un biais possible dans mon travail de recherche. De plus, la posture à adopterlors de ces entretiens avec des personnes qui me connaissent en tant que professionnelle, n'était pas évidente à trouver, ce qui paraît légitime. En effet, elles me voyaient souvent et avaient donc du mal à me considérer en tant qu'étudiante. Ceci dit, deux personnes dans mon échantillon font partie des personnes que je suis régulièrement. En effet, faute de trouver d'autres personnes disponibles, je les ai quand même inclues dans mes entretiens. J'ai dû me positionner clairement au départ. Je leur ai dit qu'il fallait qu'elle me considère comme une étudiante et non comme la professionnelle qui les reçoit habituellement. Je les ai prévenues que j'allais leur poser des questions dont je connaissais déjà la réponse mais que cela faisait partie du processus de l'entretien. Il ne fallait pas qu'elles soient étonnées. Une l'a très bien compris, l'autre moins bien. De même, initialement, je désirais me focaliser sur des personnes adhérant au CSP depuis environ 6 mois mais encore une fois pour une question de disponibilité je n'ai pu prolonger ma phase de recueil des données, ainsi une des personnes n'est adhérente que depuis 3 mois. Je décidais de recevoir cette personne lors d'un entretien exploratoire, ne pouvant l'inclure dans mon échantillon. Ce sont des hommes et des femmes âgés de 32 à 59 et demi. Lors de toute la préparation des entretiens, je me suis vraiment rendu compte de la difficulté concrète à construire un échantillon viable.La liste définitive de mon échantillonnage se présente ainsi. Par respect d'anonymat, j'ai choisi de remplacer les prénoms par des prénoms d'emprunt.
Afin de pouvoir tester la pertinence de ma grille d'entretien, j'ai procédé à deux entretiens exploratoires auprès d'autres bénéficiaires de ce contrat, Gérard et Danièle. Le premier, Gérard, est un homme de 52 ans, marié, peu diplômé, travaillant depuis une quinzaine d'années dans l'entreprise qui l'a licencié. Il est en CSP depuis octobre 2016. La deuxième,Danièle est une femme de 54 et demi, vivant maritalement. Titulaire d'un CAP de couture, elle a commencé à travailler jeune. Ses trois grands enfants ne sont plus à sa charge. Licenciée d'une boulangerie, pour laquelle elle effectuait les livraisons, elle adhère au CSP depuis février 2017. C'est pourquoi je n'ai pu l'inclure dans mon échantillon. En effet, je trouvais intéressant de choisir des personnes adhérant au CSP depuis 6 mois c'est-à-dire à mi-parcours. Pour autant, je me suis rendue compte que les propos de Danièle ne différaient pas de ceux des autres personnes inscrites depuis plus longtemps. Ces entretiens m'ont permis de prendre conscience de la difficulté de l'exercice. Quelques jours avant, je m'étais assurée de la disponibilité d'une salle et l'avait réservée. Lorsque je suis arrivée, la salle était occupée. J'ai donc dû improviser et m'installer dans un autre bureau inoccupé. Je souhaitais rendre le cadre convivial et moins formel qu'à l'accoutumé. Je positionnais donc deux fauteuils l'un à côté de l'autre afin d'adopter une posture d'égalité et de convivialité. Lorsque le monsieur ou la dame sont entrés, je leur ai proposé un café. J'ai également mis un écriteau sur la porte pour éviter que quelqu'un n'entre en cours d'entretien et n'interrompe l'enregistrement. Je me suis rendu compte que le fait d'enregistrer la personne compliquait le déroulement de l'entretien que ce soit pour la personne interviewée ou moi-même. Dès l'enclenchement de l'enregistrement, l'ambiance est plus pesante. Un malaise s'installe. Chaque mot est pesé. Ces entretiens m'ont permis de m'en apercevoir et de pouvoir y remédier autant que possible pour les suivants. Ainsi, j'essayais d'instaurer un climat plus détendu en discutant un peu avant le début de l'enregistrement. Je disais à la personne que je savais qu'il n'était pas évident d'être enregistré ni pour elle, ni pour moi mais que nous allions essayer de l'oublier. Malgré une préparation que je pensais consciencieusement accomplie, je n'ai pas réussi à « faire parler »les personnes comme je le désirais. J'ai ressenti un blocage dû je pense, en grande partie, à l'enjeu lié à la réalisation du mémoire et à la réussite de ma recherche. 1.4 La conduite des entretiens semi-directifs Forte de l'expérience dans le cadre exploratoire, j'ai pris en compte un certain nombre d'éléments pour garantir aux mieux de bonnes conditions de passation. Ainsi, la question du lieu n'est pas anodine. Il m'apparait important d'en faire un commentaire et d'aborder également le travail de transcription effectué.
J'ai mené mes entretiens dans d'autres locaux plus grands que ceux dans lesquels je travaille habituellement, appartenant aussi à ID Formation. J'ai choisi ce lieu car ils possèdent plus de salles et bureaux avec possibilité d'être plus isolé et au calme. Je désirais vraiment créer un cadre agréable et convivial pour mettre à l'aise les personnes interviewées. Cette fois, j'ai vérifié à plusieurs reprises, que la salle réservée serait bien disponible les deux jours pendant lesquelles je faisais mes entretiens.
Au départ, lorsque je me suis attelée à la retranscription des enregistrements, je me suis questionnée sur ce qui doit figurer dans la retranscription finale. Je me suis appuyée sur l'orientation du sociologue Bourdieu45(*). Face à ce problème, Bourdieu choisit de supprimer les éléments qui informent sur le contexte de l'échange : attitudes lors de l'entretien, tonalité marquées de certaines réflexions, longueur des silences. Pour la retranscription des entretiens, j'ai choisi de ne pas retranscrire tous les « euh », toutes les phrases qui commençaient par un mot. Je n'ai pas corrigé les fautes de grammaire. J'ai retranscris certaines répétitions, les silences et les soupirs quand ils me paraissaient importants : « Dans ses choix de retranscription, P. Bourdieu accepte de reformuler les propos de ses interlocuteurs, de sorte de faire apparaître plus clairement les situations rencontrées et les réactions qu'elles suscitent. »46(*). L'étape qui suit concerne le choix de l'analyse pour mes entretiens de recherche. J'ai choisi l'analyse thématique. 2. Analyse des données et interprétation 2.1 Mode d'exploitation des données Pour l'analyse de mes entretiens de recherche47(*), j'ai opté pour l'analyse thématique. « L'analyse thématique a comme but de dégager les éléments sémantiques fondamentaux en les regroupant à l'intérieur des catégories.48(*) »J'ai choisi ce type d'analyse car il me semblait intéressant de faire ressortir les thèmes dominants. Ma question de recherche concerne ainsi les personnes suivies lors du CSP. Je souhaite comprendre en quoi ce dispositif favorise la reconversion. En quoi le contrat de sécurisation professionnelle favorise t'il la reconversion des personnes contraintes à quitter leur métier ? En relisant attentivement les entretiens et en les analysant, j'ai pu en retirer un certain nombre de réflexions. En premier lieu, je voulais savoir pourquoi elles avaient accepté d'adhérer à ce contrat. Dans un deuxième temps, j'évoquerai leur ressenti lors de cette période ainsi que leur possible besoin de reconstruction identitaire et je parlerai de ce que l'accompagnement dans le CSP leur apporte sur ces points. Ensuite, je ferai un point sur leur projet soit de reconversion, de bifurcation ou autre... Une dernière partie sera consacrée à la discussion des résultats.
Pour commencer, il parait intéressant de questionner les personnes interviewées à propos des raisons de leur adhésion au CSP.
Toutes les personnes que j'ai interviewées ont choisi au départ d'adhérer au CSP pour l'accompagnement personnalisé qu'il « offrait »que ce soit pour les formations, unsoutien psychologique ou uneaide administrative. Voici quelques extraits d'entretiens permettant de situer la projection des personnes : Matthieu m'a répondu lorsque je lui ai posé la question : « déjà au niveau du suivi, des facilités, plus de facilités pour les formations par rapport à un chômeur normal qui est en ARE... »(L 12/13 P1) Pour Claude, le choix du CSP repose sur « le fait de pouvoir accéder à une formation professionnelle... »(L 13 /14P1). Quant à Ludovic, lorsqu'il a été licencié, il s'est dit « de toute manière si je suis dans les licenciements, ben, il va falloir que je sois encadré parce que subir un licenciement c'est jamais agréable au contraire c'est terrible ». (L20 à 22 P1) Béatrice, elle, reste mal à l'aise lors de l'entretien. Elle bouge beaucoup sur sa chaise. Lorsque je lui pose la question, elle semble perdue mais finit par me répondre « pour moi, c'est plutôt pour reprendre le travail, j'ai fait pas mal de démarches pour les entreprises au cas où il y aurait du travail. » (L12/13 P1). Et, enfin, pour Francine, la situation est un peu compliquée. En effet, elle avait opté pour le CSP pour suivre une formation de secrétaire/comptable afin de créer une entreprise avec son mari. Elle me confie : « Alors c'est tout le problème en ce moment, la majorité de mon CSP normalement était consacré à chercher des formations, parce que mon conjoint et moi-même avons le projet d'ouvrir notre société. »(L29/31 P1). Mais hélas, son projet a du être révisé suite à un refus des banques. Son mari avait dû démissionner pour débuter leur projet mais suite au licenciement de Francine, les banques ne veulent plus les financer. Elle doit donc retrouver du travail au plus vite, si elle veut pouvoir un jour concrétiser la création de leur société. Elle me dit avec amertume : « ...et du coup, je recherche pleinement du travail parce que j'ai plus le choix pour ouvrir la société, il faut au moins que je travaille, ce qui est un peu dommage. » (L 2/3P2) Avec du recul, ces personnes sont en demande toutes d'un accompagnement particulier. Si nous référons à la « Nébuleuse » de Paul49(*), la forme d'accompagnement qui me semble la plus appropriée est celle du counselling. « Le counselling est ainsi un type d'accompagnement caractérisé par la centration sur des personnes « normales », la prise en compte de leur développement à l'occasion d'une situation-problème, la mobilisation de leurs ressources, l'intégration de l'interaction personne-environnement50(*). » Ainsi, dans l'accompagnement du CSP, les conseillers reçoivent toujours les mêmes personnes à un rythme régulier et peuvent les guider en apprenant à les connaître. Les professionnels peuvent se concentrer sur chaque personne et développer une réelle relation de confiance.
La plupart des personnes interrogées ont opté pour le CSP pour bénéficier des avantages financiers qu'il offre. En effet, pendant une année, elles bénéficieront de 75% de leur salaire brut. C'est le cas Mathieu qui l'évoque clairement : « ...et aussi le maintien de salaire pendant 1 an ».(L13 P1). Claude va également dans ce sens : « ...et moi personnellement plus avantageux de pouvoir adhérer au CSP, tout d'abord pour le maintien de salaire pendant 12 mois... » (L10 à 12 P1). Francine le souligne vivement aussi : « ...ben le CSP, je ne vais pas vous mentir, au niveau finances, y a pas photo ! »(L16/17 P5). Quant à Ludovic et Béatrice, ils n'en ont pas parlé. Les personnes interviewées ont ainsichoisi au départ le CSP pour son aide personnalisée dans les démarches administratives (les formations, recherche d'emploi...) ou sur le plan psychologique. L'attrait financier représente un atout mais qui arrive en deuxième position selon leurs réponses, d'ailleurs deux ne l'ont pas évoqué. Nous allons maintenant tenter de comprendre au travers de leurs propos de quelle manière le CSP peut accompagner ces personnes vers une reconversion.
Toutes les personnes interrogées ont vécu le licenciement de façon singulière comme nous allons pouvoir le constater à travers leurs propos. Tout d'abord, tous appréciaient leur métier et auraient souhaité rester dans leur entreprise. En effet, lorsque je demande à Béatrice si elle aurait aimé rester dans l'entreprise s'il n'y avait pas eu de plan social, elle me répond :« Oh oui oui. J'aimais bien mon travail, j'étais motivée. J'étais toujours correcte avec eux et j'aimais bien mon travail. » (L26/27 P1) etFrancinepartage également avec force ce point de vue: « Très très bien c'était l'idéal, j'ai toujours travaillé dans le commerce donc y a pas de soucis. » (L13 P1) et elle ajoute « Oui, si tout ne s'était pas passé comme ça, je serais restée plusieurs années parce que la majorité d'ancienneté là-bas c'est 14,16 ans donc c'est vraiment des emplois qui passionnent beaucoup de monde ...» (L 22/23 P1). Claude affirme aussi : « ...oui personnellement j'aimais bien ce que je faisais. » (L9/10 P2).Mathieu s'exclame : « Ah bien ! Ca s'est toujours bien passé... » (L16 P1). Enfin quantà Ludovic, il m'explique: « Bien, comme je travaillais perso, je dépendais de moi-même, j'avais un chef, mais je dépendais de moi-même donc je l'ai bien vécu... » ( L2/3 P2). Le changement de situation est d'autant plus difficile que toutes ces personnes appréciaient leur métier.A propos de cette période de transition, nous rejoignons ce que Denaveà écrit : « Or cette phase de transition entre deux emplois est précisément la plus anxiogène pour les salariés redoutant le chômage de longue durée ou les emplois précaires lors d'une bifurcation professionnelle. La France connaît effectivement une faible sécurité de l'emploi (la probabilité du chômage est plus forte en France que la moyenne des pays européens) et les transitions du chômage vers l'emploi (comme du contrat à durée déterminée vers le contrat à durée indéterminée) sont également faibles. Les risques pèsent plus fortement sur les plus âgées et les moins qualifiés (qui connaissent une plus forte probabilité de rester longtemps au chômage).51(*) » Cette situation semble compliquée pour eux, ces personnes relatent les propos suivants : Mathieu avoue en soupirant : « Y a des moments ça va et y a des moments, ça va moins bien ». (L 34 P 1. Claude exprime son appréhension de la situation par rapport à sa famille : « C'est très compliqué, surtout avec 3 enfants. Après 14 ans, le coup est dur à encaisser mais... » (L2/3P4). Un long silence suit ses propos. Puis il ajoute « Après c'est une appréhension de ne pas pouvoir retrouver du travail au plus vite. ». (L20/21 P4).Béatrice confirme le vécu de la violence du licenciement : « Un peu très dur parce que je pensais pas être licenciée et donc c'était dur parce que j'ai toujours travaillé ! c'est pas évident ! Arrivé à ce point là c'est vrai que c'est très dur ! » (L21/22 P2). Quant à Francine, elle évoque le choc de la nouvelle du licenciement : « Mais au début, c'était très dur, hein forcément, on annonce ça comme ça, c'est très dur surtout quand on s'y attend pas, surtout une boîte aussi énorme que celle-ci. » (L30/31 P3) et elle me confie un plus tard : « Mais là,je ressens une baisse de confiance en moi comme la société ne peut pas s'ouvrir si je ne trouve pas d'emploi du coup tout repose sur moi en ce moment. C'est un peu délicat, surtout que mon conjoint a du démissionner de son CDI pour ouvrir la boîte, et arrivés là, on ne peut pas ouvrir la boîte du coup, on est dans une panade pas possible ! » (L34 à 38 P3). Ludovic partage leurs avisà tous quand il dit au sujet du licenciement : « Très mal ! Au départ très mal. » (L17 P3) J'ai ressenti dans leurs mots un poids, une lourdeur, une foule de questions qui se bousculent dans leur tête. « En définitive, quel que soit le type de transition, une légitimité professionnelle est à reconstruire, une phase de deuil et de désengagement/réengagement toujours éprouvante apparait,une réorganisation des sphères de vie et une construction identitaire se dessinent52(*) ». (Jourdain, cité par Mazade et Hinault).
En introduction de cette partie, il me semble judicieux de m'appuyer sur des propos de Kaddouri qui explique que « Dans ces contextes, les personnes concernées s'inscrivent le plus souvent dans un travail de redéfinition identitaire, de clarification et de repositionnement conduisant à une bifurcation, mais pas nécessairement. 53(*)». En effet, à travers les propos des personnes interviewées, nous allons nous apercevoir que même si ces personnes se sentent en tension, toutes ne souhaitent pas un changement total de leur identité. La personne se trouve en tension identitaire entre son identité passée liée à son ancien métier et son identité future, à ce stade encore floue. Pour y remédier, elle devra mettre en place des « stratégies identitaires » comme l'explique Kaddouri54(*). J'ai retrouvé parmi les personnes interrogées trois types de dynamiquesidentitaires. La « dynamique de continuité identitaire » semble correspondre à Béatrice. Cette dame souhaite absolument conserver son identité passée car elle lui convenait parfaitement. Elle mettra en place une stratégie de « préservation identitaire collaborative » avec le dispositif du CSP afin de réussir à retrouver son identité passée. D'ailleurs, elle me déclare : « Le CSP, euh, rester toujours sur ma branche. Comme, quoi j'ai toujours travaillé dans le poisson et moi, je voudrais rester dans ma branche dans la production » L1/2 P2 et elle ajoute « J'ai quitté à l'école à 15 ans et demi, j'ai commencé à travailler à 16 ans, j'ai jamais été au chômage. J'ai toujours travaillé depuis là ». (L8/9 P2) pour terminer par « Un peu très dur parce que je pensais pas être licenciée et donc c'était dur parce que j'ai toujours travaillé ! c'est pas évident ! Arrivé à ce point là c'est vrai que c'est très dur ! ». (L21/22 P2). La « dynamique de transformation identitaire » semble convenir à Ludovic. Ce monsieur a suivi une formation au numérique pour se préparer à la retraite. Il était terrifié par la nouvelle technologie. Il me confie : « Et puis, j'ai fait un stage informatique qui m'a aidé. Ça a été trois mois peut-être intenses, parce que lorsqu'on connait pas ben c'est intense. Mais arrivé là, c'était bien c'est ce que je voulais. J'enviais tous les gens qui étaient devant leur ordinateur maintenant je peux le faire. » (L 29 P3 et 1/2P 4)et il continue en me disant « Du coup la retraite va être ...Elle va être bien prise ! Oui et je vais sur les sites de retraite et je peux préparer les papiers. Je me prépare déjà, je me prépare tout doucement ». (L5/6 P5). Pour les autres, la « dynamique de gestation identitaire » se rapproche de leur profil. Leur projet identitaire est en cours de réflexion. Ils ne sont pas encore déterminés sur ce qu'ils veulent devenir. Francine pensait créer son entreprise avec son mari suite à son licenciement et profiter du CSP pour suivre une formation de secrétaire comptable. Mais des éléments extérieurs sont venus contrariés son projet qu'elle doit remettre à plus tard. Elle est donc un peu perdue et doit trouver un emploi rapidement mais ne sait où travailler réellement. On ressent dans cet extrait toutes les questions qu'elle se posent : « Mais là ,je ressens une baisse de confiance en moi comme la société ne peut pas s'ouvrir si je ne trouve pas d'emploi du coup tout repose sur moi en ce moment. C'est un peu délicat, surtout que mon conjoint a du démissionner de son CDI pour ouvrir la boîte, et arrivés là, on ne peut pas ouvrir la boîte du coup, on est dans une panade pas possible ! ». (L 34 à 38 P3).Claude était cariste et a souhaité suivre une formation de technicien de maintenance pendant la première partie de son CSP. Il souhaite se reconvertir mais réfléchit encore. En questionnant les boîtes intérimaires, il s'est aperçu que toutes exigeaient une première expérience dans le métier de technicien de maintenance. Etant marié et ayant 3 enfants, il a besoin de retrouver du travail au plus vite : « L'objectif premier c'est d'obtenir le diplôme, ensuite j'aimerai bien m'orienter vers le métier de technicien mais après en ayant déjà eu des entretiens avec les boîtes d'intérimaire, eux, ils recherchent du monde mais qui ont de l'expérience. C'est par rapport à la demande du client. Après il y a très peu d'entreprises qui sont prêtes à prendre quelqu'un qui vient juste de sortir d'un parcours de formation pour la former sur place, la prendre, la former et ensuite l'embauché dans l'entreprise mais vraiment la former sur site. Après je ne mets pas un frein là-dessus parce que je sais très bien que ça va être compliqué. Par rapport aussi à mon expérience, je ne vais pas me fixer qu'un objectif à partir dans la maintenance si j'ai des propositions en tant qu'opérateur ou en tant que cariste, enfin tout ce qui concerne un peu les différents postes de l'industrie, j'accepterai avec plaisir la mission. Après le but, c'est de rentrer dans l'entreprise en tant qu'opérateur et après essayer d'évoluer en tant que technicien si possible. Ce serait un peu dommage d'avoir suivi un cours de formation, d'avoir passé un diplôme sans le faire. Tout ce qu'on apprend là-bas, ça ne peut être que bénéfique pour moi. Mais tout de suite après ça risque d'être compliqué ! » L13 à 26 P5. Quant à Mathieu, c'est le seul qui a retrouvé un emploi et qui donc se sent mieux. Il sait ce qu'il veut, il dit d'ailleurs : « moi personnellement, je le vis bien parce que je suis actif dans mes recherches. Donc je ne suis pas de nature à me laisser aller sur moi-même à partir du moment où l'on montre aux employeurs, on peut retrouver du travail rapidement. » (L6/8P4). Finalement, l'accompagnement inclus dans le contrat de sécurisation professionnelle peut-il les aider dans leur quête identitaire qui est, je pense, le point de départ de cette nouvelle vie.
Toutes les personnes interviewées sont plus ou moins à la recherche d'une nouvelle identité. Fragilisées par leur licenciement, privées d'un métier qu'elles aimaient elles cherchent à se reconstruire. Au sujet du CSP, Francine souligne: « C'est un peu plus que le pôle emploi normal, euh après à la base c'est plus après l'accompagnement d'une personne toujours attitrée. C'est sympathique aussi, parce que moi voir 50 000 personnes moi ça m'intéresse pas parce que s'il faut raconter notre histoire à chaque personne, je veux dire, on n'a pas fini, le pôle emploi, ils ont pas que deux hein ! Donc c'est vrai que c'est un peu délicat et puis mais c'est vrai que là, le CSP m'a apporté, c'est vrai peut-être de la confiance... ».(L 17 à 22 P5). Ludovic explique aussi : « J'ai eu l'occasion d'avoir une conseillère qui a su me comprendre, on a su dialoguer ensemble. Elle a su ce que je voulais, ce que je recherchais. Elle m'a fait comprendre que peut-être je n'aurais plus le même travail, qu'il fallait qu'on trouve autre chose. Je lui ai parlé un petit d'informatique et du coup, elle m'a orienté sur ça. Au début cela a été une petite galère, mais après ça s'est avéré satisfaisant. » (L12 à 17 P4) Claude parle lui d'une remise en question lors de cette période : « Donc là aujourd'hui, je me suis remis en question, par rapport à la cellule d'accompagnement, pour m'orienter vers vraiment ce qui me convenait le plus. » (L16/17P4). Perdue car elle a toujours travaillée,Béatricerépète à plusieurs reprises son envie de retrouver du travail. Pendant cette période, elle garde ses habitudes : « Je me lève comme si j'allais travailler » (L7 P3). Elle déclare aussi : « Ca fait 6 mois que je n'ai pas travaillé. J'espère retrouver du travail d'ici la fin du CSP. Mais pour l'instant, je n'ai rien du tout. Je cherche un peu partout mais... c'est très dur quand même. Le temps passe trop vite. » (L28 à 30 P3) et de nouveau dit :« Oui très difficile. Avec l'âge que j'ai. J'ai toujours travaillé et puis c'est très dur de retrouver du travail ». (L16/17 P3). Ses propos montrent la place importante que tient celle du travail dans sa vie. Il est même difficile de la faire parler d'autre chose, de lui demander son avis sur le dispositif. Son inquiétude principale reste celle de retrouver du travail. Mathieu lui s'était préparé à ce licenciement, et il déclare à ce sujet : « Ben pffff, plus ou moins bien parce que je m'y étais préparé... » (L16/17 P2). Volontaire, il ajoute : « ... de toutes façons même moi, je ne suis pas de nature défaitiste donc je me dis, je suis encore jeune j'ai des capacités, je vais rebondir rapidement... » (L30/31 P2). Toutes les personnes interrogées ont ressenti le besoin d'être écoutées, rassurées et comprises : « L'individu possède en lui-même des ressources considérables pour se comprendre, se percevoir différemment, changer ses attitudes fondamentales et son comportement vis-à-vis de lui-même. Mais seul un climat bien définissable, fait d'attitudes psychologiques facilitatrices, peut lui permettre d'accéder à ses ressources. » (Rogers,1962). Les conseillers vont en écoutant attentivement ces personnes, les aider à puiser en eux les ressources qui leur permettront de progresser.
Lors de ces entretiens, j'ai rencontré cinq personnes. Chacune ont des perspectives et des attitudes différentes face à leur avenir ce qui entraînent différentes appropriation du CSP. Au fil des entretiens, ils mes les ont détaillés : Augmentation des compétences Mathieu, âgé de 37 ans, vivant en concubinage, 1 enfant, aimait son ancien travail et a souhaité augmenter ses compétences afin de retrouver du travail rapidement. Mathieu est quelqu'un de volontaire qui a su vite rebondir et utiliser ce que le CSP lui offrait comme opportunité pour les formations. Il a passé ces permis CACES55(*) et passé dans la foulée des entretiens dans plusieurs entreprises. « Ah ben, j'en ai profité pour remettre à niveau mes formations, vu que moi j'étais cariste. J'en ai profité pour repasser tous mes CACES, déjà et après moi ce que je veux, c'est retravaillé rapidement, j'ai déjà eu des entretiens dans plusieurs entreprises, j'attends des réponses (silence) ». (L1 à 4 P2) Lors de notre entretien, nous avons été d'ailleurs interrompus, (L 14 P2), par l'appel d'un employeur qui lui a proposé un rendez vous pour passé des tests suite à un entretien. Si Mathieu réussit les tests, il décrochera un CDD de 18 mois. Il l'explique à la fin de l'entretien : « Non pour une mission de 18 mois, je dois passer des tests à Dunkerque chez A. et ensuite si c'est validé je démarre ma mission ». (L12/13 P4) Création d'entreprise contrariée Francine est âgée de 32 ans, elle vit maritalement et a 2 enfants. Choquée d'avoir été licenciée, elle faisait partie d'une grosse entreprise dont l'activité était la prise de photographies des bébés dans les maternités. Elle aimait son métier même si cela lui demandait de l'investissement en termes de déplacements. Elle avait pensé utiliser la période de CSP pour se former en tant que secrétaire comptable afin de créer une société avec son compagnon. Tout était mis en place avec sa conseillère quand les banques ont mis leur veto. Quelques mois auparavant, son compagnon avait dû démissionner de son emploi dans la perspective de créer cette société. Malheureusement, maintenant qu'elle aussi se trouve au chômage, les banques ne veulent pas prendre le risque de les financer. Il faut qu'elle retrouve un emploi rapidement pour pouvoir créer son entreprise. Juste avant de venir me rencontrer, elle sortait du bureau de sa conseillère pour faire le point. Elle expose donc la situation qu'elle est entrain de vivre : « Donc j'aurais voulu faire une formation secrétaire comptable étant donné que j'aurais été dans la partie administrative, papiers, et comptabilité de la société sauf que ça ne s'est pas déroulé comme prévu. Donc, étant donné que notre projet arrive au bout, les banques ont refusé notre projet si je n'avais pas d'emploi. Parce que forcément mon emploi est une sécurité en plus pour entre guillemets, en plus pour notre vie de famille, ce qui est normal, hein, attention mais ils comptaient pas du tout sur le CSP mais un emploi en CDI. Donc j'ai du refuser mes formations, ce que je viens d'annoncer à ma conseillère qui a fait des pieds et des mains à l'OPCA et tout pour avoir mes formations et du coup, je recherche pleinement du travail parce que j'ai plus le choix pour ouvrir la société, il faut au moins que je travaille, ce qui est un peu dommage ...». (L31 à36 P1) et (L1 à 4 P2) Son projet est donc remis à plus tard, elle doit maintenant retrouver un emploi au plus vite si elle veut le concrétiser à un moment donné. Volonté de conserver le même métier Mme B. est âgé de 54 ans, elle est mariée sans enfants. Elle a commencé à travailler à 16 ans dans les magasins de marée en tant qu'ouvrière de conditionnement et n'a jamais cessé de travailler jusqu'à son licenciement économique. Elle me raconte son parcours : « J'ai quitté à l'école à 15 ans et demi, j'ai commencé à travailler à 16 ans, j'ai jamais été au chômage. J'ai toujours travaillé depuis là. » (L8/9 P2). Elle est très affectée et répète sans arrêt qu'elle désire retrouver un travail identique au précédent.Même quand je l'interroge sur autre chose, elle revient dessus. Lorsque je lui demande de me parler de son ressenti vis-à-vis de l'accompagnement qui lui est proposé. Elle me déclare : « Euh là depuis que je suis en CSP, je suis avec A.B, ils font très bien leur travail (grand silence). J'allais dire aussi, j'ai du mal à trouver du travail et je voudrais, comme je cherche dans ma branche mais pour l'instant, pour l'instant, je n'ai rien du tout pour l'instant. ». Je rebondis et lui demande si le travail est difficile à trouver et elle me répond: » Oui très difficile. Avec l'âge que j'ai. J'ai toujours travaillé et puis c'est très dur de retrouver du travail ». (L 10 à 17 P3). Pour essayer de l'aider à reprendre confiance en elle, la conseillère lui a proposé une formation informatique. Béatrice a acceptée, même si sa priorité reste de retrouver un emploi dans son domaine. « Ca fait 6 mois que je n'ai pas travaillé. J'espère retrouver du travail d'ici la fin du CSP. Mais pour l'instant, je n'ai rien du tout. Je cherche un peu partout mais... c'est très dur quand même. Le temps passe trop vite. D'ici la fin du CSP, si je n'ai pas de travail, ça va être long bon ben là, je vais faire la formation informatique pour apprendre plus mais pour l'instant j'ai rien du tout. J'attends. » (L28 à 32 P3) Cette dame semble avoir du mal à se projeter vers autre chose que son ancien emploi, elle a peur des conséquences que cela pourrait avoir sur son avenir. Il n'est pas certain qu'elle éprouve un réel épanouissement dans ce métier mais retrouver un emploi similaire à l'ancien la rassurerait. « Le métier peut n'être qu'un simple moyen de subsistance et la question des plaisirs liés à son exercice ne se pose pas systématiquement. Les enquêtés qui recherchent, avant tout emploi salaire, et sécurité (à moyen ou à long terme) sont majoritairement issus des milieux populaires. 56(*)» De plus, tout le monde n'a pas les capacités à se projeter, cette personne est issue d'un milieu populaire, « Or les situations socio-économiques les plus précaires « tendent à éloigner des pratiques d'anticipation »57(*)(D Thin, cité par Denave) Bifurcation professionnelle Claude est âgé de 35 ans, marié, 3 enfants. Opérateur/ conducteur de ligne dans son ancien emploi, il a saisi l'occasion de se reconvertir en tant que technicien de maintenance. Il suit une formation pour obtenir le titre professionnel dans ce domaine. Les différents ateliers et entretiens individuels auquel il a participé, lui ont permis de découvrir qu'il avait des compétences pour ce métier. Il explique : « A la base, j'aurai voulu justement améliorer mes compétences en tant qu'opérateur-conducteur de ligne mais aussi après je me suis un peu rendu compte, suite aux ateliers, qui ont été proposé dans le cadre du CSP. Je ne sais pas comment vous expliquer ça. Je me suis rendu compte que j'avais quelques compétences qui correspondaient justement à ce métier. Je me suis aussi renseigné sur le marché du travail dans ce secteur, donc apparemment c'était un secteur assez prometteur donc voilà, j'ai voulu tenter ma chance et essayer de me reconvertir en tant que technicien de maintenance ». (L 16 à 22 P1) Il est vrai que dans son ancien métier, il était frustré de ne pas avoir de possibilité d'évolution. Il avoue lors de l'entretien : « Bon après, il n'y avait pas trop de possibilité d'évolution ». (L 8P2) Le choc du licenciement passé, il a semble avoir saisit une chance de pouvoir augmenter en compétences et se reconvertir dans un métier où il est possible d'évoluer. Il reste quand même prudent, car, père de 3 enfants, travailler reste, pour lui, une priorité. Il se dit prêt à revenir dans un emploi similaire à l'ancien pour avoir un emploi s'il n'en trouve pas dans son nouveau domaine : « Par rapport aussi à mon expérience, je ne vais pas me fixer qu'un objectif à partir dans la maintenance si j'ai des propositions en tant qu'opérateur ou en tant que cariste, enfin tout ce qui concerne un peu les différents postes de l'industrie, j'accepterai avec plaisir la mission. Après le but, c'est de rentrer dans l'entreprise en tant qu'opérateur et après essayer d'évoluer en tant que technicien si possible. Ce serait un peu dommage d'avoir suivi un cours de formation, d'avoir passé un diplôme sans le faire. Tout ce qu'on apprend là-bas, ça ne peut être que bénéfique pour moi. Mais tout de suite après ça risque d'être compliqué ! » . (L19 à 26 P 5) Pour lui, l'accompagnement du CSP lui permis de mieux se connaître, à reprendre confiance en lui et surtout à bien s'orienter. Il le répète à plusieurs reprises à différents endroits : « Et être guidé aussi dans l'orientation, de ce qui correspond à nos compétences. Moi, j'ai participé à tous les ateliers, parce que moi tout ce qui est création de CV, lettre de motivation et préparation d'entretien d'embauche, moi c'est des chose par lesquelles, je ne suis jamais passé donc ça c'était une appréhension , c'est encore une appréhension. D'ailleurs quand on a un entretien. Mais ça m'a permis de me découvrir, repasser par là, de nous préparer à des éventuels entretiens, beaucoup de chose comme celles-ci. » L28 à 34 P 4)et« Et puis aussi savoir se décrire en quelques mots, ça parait peu mais c'est beaucoup parce que le jour où je suis arrivée et qu'on m'a posé la question et je vous avouerais que j'ai eu un moment de doutes. Je ne savais pas quoi répondre. Et ben le fait de participer à tous ces ateliers m'a permis de prendre un pu plus confiance en moi aussi, de savoir plus m'exprimer par rapport aux éventuels entretiens sur beaucoup de choses. Moi, j'ai bien aimé c'est l'accompagnement et l'aide qu'on a eu pour la création de Cv et tout ça et aussi la préparation aux entretiens qui m'ont été très bénéfiques aussi « (L1 à 7 P5) « Ca m'a permis de me redécouvrir un petit peu, de bien m'orienter. Là, actuellement je sais que j'ai pris la bonne décision, enfin j'ai pris la décision par rapport à des conseils de la cellule d'accompagnement et, là à l'heure actuelle, je suis arrivé à la moitié de ma session, je n'ai aucun doute, je me suis bien orienté. » L1 à 4 P6 Une formation pour un départ en retraite serein Ludovic, âgé de 59 ans et demi, il vit seul. Il a commencé à travailler à l'âge de 16 ans. Cariste en fin de carrière, il pensait terminer sa carrière dans l'entreprise qui l'a licencié. Malgré le choc du licenciement et le fait de devoir quitter un métier qu'il appréciait, il se résigne en attendant la retraite « maintenant, je laisse venir. Je n'ai pas à me plaindre... Oui mieux que certains qui ont encore quelques années à faire. Moi, je suis déjà plus serein. » (L26 et 28 P3). Sa conseillère s'apercevant de la peurde Ludovic pour l'informatique, lui propose de l'inscrire à une formation. Un peu réticent au départ, il finit par accepter. Il le confirme : « Je lui ai parlé un petit d'informatique et du coup, elle m'a orienté sur ça. Au début cela a été une petite galère, mais après ça s'est avéré satisfaisant. » (L15/17 P4). Et insiste ensuite sur son soulagement à avoir accepté cette formation : « J'ai plus peur de l'ordinateur, avant c'était mon cauchemar et maintenant au contraire je cherche à aller plus loin. » (L23/24 P4). Il s'en sert même pour ses loisirs, heureux présage pour sa future retraite : « Surtout oui, je fais de l'aquariophilie, les oiseaux, je fais de la reproduction d'oiseaux donc ça m'est utile pour les accouplements, les pontes, les éclosions. Donc maintenant, ce n'est plus sur un calendrier comme avant, c'est sur internet, je sors des imprimés, je sors des fiches. » (L27 à 29 P4) . De ces cinq situations singulières, j'en déduis donc les personnes ont une manière très différentes de s'approprier le CSP. Le contrat est le même pour tous, son apport sera différent selon les personnes. Au cours de ces entretiens, j'ai pu constater que le CSP apportait une aide psychologique à ces personnes. Les personnes apprécient le suivi personnalisé et l'écoute dont elles font l'objet et le fait de rencontrer toujours la même personne. Je retire de tous ces entretiens que l'accompagnement au cours du CSP leur apporte une aide certaine sur le plan identitaire et un soutien indéniable dans cette transition. 3 Discussion et perspectives Au regard des résultats obtenus lors des entretiens, je constate que le contrat de sécurisation professionnelle est une aide pour ces personnes contraintes à quitter leur métier. L'aide se ressent notamment au niveau d'un étayage spécifique comme appui (entretien individuel, appui social et psychologique...). Ce dispositif structure l'année de transition de ces personnes par ses rendez vous réguliers. (Environ tous les 10 jours). C'est un soutien aussi pour toutes les démarches administratives et un « confort » financier. C'est ce climat de confiance établi entre la personne suivie et le conseiller qui va permettre la reconstruction identitaire qui permettra à son tour de progresser. Cette écoute et cette démarche compréhensive 58(*) sont, au regard des entretiens effectués, une partie essentielle de l'accompagnement dans le cadre du CSP. Il existe aussi un dispositif plus approfondi mis en place spécialement pour les adhérents du CSP. C'est un appui social et psychologique. Une des personnes que j'ai interrogées en a bénéficié. Si la conseillère ressent un quelconque signe de détresse de la part du bénéficiaire, elle peut la diriger vers un autre service où interviennent des psychologues. Toutes les personnes que j'ai interrogées ont suivi au moins une formation : passage de CACES59(*), informatique, titre professionnel... Une formation a été reportée à cause d'évènements extérieurs, ici il s'agit d'un refusde financement des banques pour la création d'une entreprise qui concerne Francine. Ce dispositif favorise donc le suivi de formation. En revanche, j'ai constaté qu'une seule personne sur les 5 inscrites depuis six mois a retrouvé un emploi. A ce stade et au terme de 6 mois de suivi, je constate que le nombre de personnes étant en reconversion effective ou en emploi n'est pas élevé. Mais il convient de rester prudent car ses résultats sont au regard d'un échantillon peu important et à mi-parcours. Il est à noter que le climat économique du Boulonnais se dégrade, cela peut poser question au niveau local. Ce dispositif les aide à ne pas se décourager pendant cette étape qui se veut transitoire. A ce stade sur les 5 personnes, aucune n'est en emploi dans un autre domaine que précédemment.Je me suis projetée en termes de réflexionaussi après la fin du dispositif. Qu'adviendra t'il des personnes n'ayant pas retrouvé de travail ? Ces personnes ont été accompagnées régulièrement pendant une année, les conseillers les ont accompagnées, guidées. Certaines ont suivi une formation, et donc avec l'espoir de retrouver du travail dans un nouveau domaine. Si ce n'est pas le cas à la fin de cette année, après tant d'espérance, le retour à la réalité n'est-il pas encore plus difficile ? Elles vont se retrouver à nouveau seules, sans suivi personnalisé, face à leur situation. Cependant,je note néanmoins la force du dispositif dans sa capacité à prendre en considération la personne dans sa singularité, dans un étayage qui joue une fonction rassurante dont les effets peuvent être réinvestis. Il s'agit également d'un espace de parole, d'échanges privilégiésqui peuvent entrainer des effets positifs pour la suitesans ignorer la complexité de l'issue. Ainsi, une recherche à un an, voire plus, de la sortie du CSP pourrait donner d'autres enseignements et ouvrir une autre lecture de l'usage du CSP dans la trajectoire des personnes qui ont été contraintes à un licenciement. * 4 Annexe 2: Chartre d'engagement à l'accompagnement CSP * 5Deslauriers, Mayer. (2000). L'observation directe .In : « Méthodes de recherche en intervention sociale » (pp.136). Montréal-Paris : Gaétan Morin Editeur. 2000. Chap. 6. * 6 Paul, M. L'accompagnement : une posture professionnelle spécifique .Paris : L'Harmattan.2004. Chap1. * 7Ibid : 51 * 8 Entretien avec Mokhtar Kaddouri, réalisé par Anne-Claude Hinault. Dynamiques identitaires et singularisation des parcours dans les transitions professionnelles. Sociologies Pratiques 2014/1 (n°28), p.18 * 9Lhotellier, A. (2001). Accompagner et tenir conseil : démarche fondamentale ou anesthésie sociale. In :Tenir Conseil : délibérer pour agir (pp. 114), Chap 1. Paris : SéliArslan, * 10Ibid, p 114 * 11Aubret,J. (2011). L'orientation professionnelle des adultes. In : Carre,Caspar, Traité des sciences et techniques de la formation (pp. 527), Chap 25. Paris : Psycho Sup, Dunod. . 3ème édition. * 12Denave,S.(2016).Maître de Conférences, Université Lumière Lyon 2, équipe MEPS du Centre Max Weber dans le cadre d'une journée organisée par le pôle DIRF du laboratoire Trigone Cirel. Durée : 1 :19 :31 * 13 Cours de Thomas Dumet (Licence GA3P 2017) * 14Denave, S.(2015). Le processus des ruptures professionnelles. Première partie. In : Reconstruire sa vie professionnelle. (pp.29). Edition : Le lien Social, Paris Presses Universitaires de France. * 15Boltanski,L, Chiapello,E. (1999). Le Nouvel Esprit du capitalisme. Paris : Gallimard, note de bas de page N°2, p.681. * 16 Voir Jaillet, « De le généralisation de l'injonction au projet », art. cité. * 17Boutinet, JP. (1993). Anthropologie de projet. Paris : Puf. * 18 « Les notions de projets, de motivation, de communication sont aujourd'hui des normes, en bas de la hiérarchie sociale, nous avons appris à nous adapter plus ou moins bien. » (A. Ehrenberg, La Fatigue d'être soi, paris, Odile Jacob,1998, p14) * 19 Annexe 2 : chartre d'engagement * 20Coquelles,C. (1994). Le modèle du projet. In : Attention projet (pp.25). Edition : Formation Emploi n°45. * 21Denave, S. (2015). Introduction générale. In : Reconstruire sa vie professionnelle (pp.8).Edition Le lien Social, Paris Presses Universitaires de France. * 22Ibid : 3/4 * 23Ibid : 4 * 24Ibid : 5 * 25 Entretien avec Mokhtar Kaddouri, réalisé par Anne-Claude Hinault. Dynamiques identitaires et singularisation des parcours dans les transitions professionnelles. Sociologies Pratiques 2014/1 (n°28), p.16 * 26Ibid : 16 * 27Kaddouri M. (2006).Dynamiques identitaires et rapport à la formation. In : Barbier,Bourgeois, de villers, Kaddouri. Constructions identitaires et mobilisation des sujets en formation.(pp.131). Editions : Lharmattan. * 28Ibid : 131 * 29 Mazade,O,Hinault, AC.(2014). Avant-propos, Sociologies pratiques 2014/1 (n°28), p5. * 30Terme emprunté à O.Mazade * 31Crunel, B, Frau, C. (2014). Devenir chômeur. (pp.78). In : Des parcours pluriel entre transition et état. Sociologies pratiques 2014/1 (n°28). * 32Denave, S. (2015). Conclusion générale. In : Reconstruire sa vie professionnelle (pp.285). Edition : Le lien Social, Paris Presses Universitaires de France. * 33Delory-Monberger, C. (2014). Filiations.In : De la recherche biographique en éducation (pp.16). Paris : Téraèdre. 1ère partie. * 34Aubret, J. (2011). L'orientation professionnelle des adultes. In : Traité des sciences et techniques de la formation (pp. 536).Chap 25. * 35Aubret, J. (2011). L'orientation professionnelle des adultes. In : Traité des sciences et techniques de la formation. (pp.535). * 36 Graille, C. (2014). Enjeux identitaires dans une entreprise en transition. In : Les identités professionnelles à l'épreuves des transitions. (pp87 à 97). Sociologies pratiques 2014/1 (n°28), Presses de Science Po. * 37 Dubois, F, Terral, P.(2014). La création d'entreprise dans le secteur du tourisme sportif. In : Les identités professionnelles à l'épreuve des transitions (pp53 à 62). Sociologies pratiques 2014/1 (n°28), Presses de Science Po. * 38.Mazade, O, Hinault, AC. (2014). «Avant-propos» (pp. 5). Sociologies pratiques 2014/1 (n°28). * 39Combessie JC. Première partie Découverte et collecte des données. In :Méthode sociologique. Editions La Découverte. Paris. 2007. P 24. * 40 Annexe 3 : Guide d'entretien * 41Ibid : P 24. * 42 Annexe 4 : Grille d'entretien * 43Combessie JC. Première partie Découverte et collecte des données. In :Méthode sociologique. Editions La Découverte. Paris. 2007. P 24. * 44 Cours de recueil et analyse de données. Dominique DELACHE-CUEEP/USTL * 45Guéranger, D. (2006). A propos de trois problèmes pratiques de l'écriture sociologique. : La retranscription d'un entretien par Pierre Bourdieu.In : Enjeux (et) pratiques de l'écriture en sciences sociales,Paris, France. * 46Ibid : p7 * 47 Annexe 5 à 9 : Entretiens * 48Negura,L. (2206). L'analyse du contenu d'une représentation sociale. In : L'analyse de contenu dans une étude des représentations sociales, Revue Sociologie. Paris : PUF. * 49Paul,M. (2004). L'accompagnement : une posture professionnelle spécifique .(Chap 1). Paris : L'Harmattan. * 50Paul, M. (2002). L'accompagnement: une nébuleuse. Éducation permanente,153(4), 43-56. * 51Denave, S. (2015). Conclusion générale. In : Reconstruire sa vie professionnelle (pp. 286/287). Edition : Le lien Social, Paris Presses Universitaires de France. * 52Mazade,O, Hinault,AC.(2014). «Avant-propos» (pp.7). Sociologies pratiques 2014/1 (n°28). * 53 Entretien avec Mokhtar Kaddouri, réalisé par Anne-Claude Hinault. Dynamiques identitaires et singularisation des parcours dans les transitions professionnelles(pp.17). Sociologies Pratiques 2014/1 (n°28). * 54Kaddouri,M. (2006). Dynamiques identitaires et rapport à la formation. In : Barbier, Bourgeois, de Villers, Kaddouri. Constructions identitaires et mobilisation des sujets en formation. (pp.131). Editions : Lharmattan. Paris. * 55 Certificat d'aptitude à la conduite : pour différents type de chariots * 56Denave, S. (2015).Des trajectoires et des transformations plurielles. In : Reconstruire sa vie professionnelle (pp. 262)Edition Le lien Social, Paris Presses Universitaires de France. * 57Ibid : 33 * 58 Entretien avec Mokhtar Kaddouri, réalisé par Anne-Claude Hinault. Dynamiques identitaires et singularisation des parcours dans les transitions professionnelles. (pp.18).Sociologies Pratiques 2014/1 (n°28). * 59 Certificat d'aptitude à la conduite : pour différents type de chariots |
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