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Comportement de l'entrepreneur, de l'intention à  la réalisation du projet. Intéret du développement. Du sentiment d'auto-efficacité chez l'entrepreneur de nécessité.


par Majid Chebrek
IAE Lille - University School of Management  - Master 2 - Management Sciences de Gestion 2019
  

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3. Auto-efficacité et faisabilité perçue

Selon le psychologue Albert Bandura 13 , l'auto-efficacité, ou le sentiment d'efficacité personnelle, se définit par la croyance d'un individu en ses capacités et la conviction de leur réussite. « Son postulat repose sur les attentes d'un individu en matière d'efficacité de ses propres actions14 ». Comme le modèle de Shapero et Sokol le mettait en évidence précédemment dans notre étude, différents facteurs influencent l'intention d'entreprendre. Selon Krueger et Carsrud (1993), l'intention est précédée de trois facteurs : l'attractivité perçue du comportement entrepreneurial, la perception sociale des normes concernant l'entrepreneuriat ainsi que la perception de du contrôle comportemental et donc de l'auto-efficacité, ce dernier facteur déterminant la faisabilité du projet. La faisabilité perçue se définit donc par les possibilités d'entreprendre perçues par l'entrepreneur et liées à

13 BANDURA, Albert, Auto-efficacité : le sentiment d'efficacité personnelle, Liège : De Boeck, 2002.

14 Définition de la théorie de l'auto-efficacité, e-marketing : [En ligne : https://www.e-marketing.fr/Definitions-Glossaire/Auto-efficacite-theorie-240613.htm].

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l'environnement et aux potentialités concrètes. La perception de la faisabilité évolue en fonction du sentiment d'auto-efficacité et de la capacité à dépasser les difficultés liées au terrain. Ce sentiment conditionne l'état d'esprit et les actes de la personne, modelant son intention et ses ambitions. En effet, plus le sentiment d'auto-efficacité sera élevé, plus l'individu sera volontaire dans la poursuite de ses efforts afin d'atteindre son objectif. En 2003, Bandura mettait au jour les quatre sources déterminant le niveau d'auto-efficacité15:

- Une expérience active de maîtrise. Il s'agit là d'une source fondamentale de l'auto-efficacité. Elle est basée sur la maîtrise qu'a l'individu concernant les tâches à effectuer. En d'autres termes, plus l'entrepreneur naissant aura des expériences réussies dans les différentes tâches qui incombent à la réalisation de son projet, plus ses croyances en ses capacités personnelles seront renforcées. En revanche des expériences échouées dans ce domaine mettront à mal son sentiment d'auto-efficacité.

- Une expérience indirecte ou vicariante. Elle repose sur les comparaisons sociales. L'observation d'une expérience réussie chez ses pairs augmentera l'auto-efficacité de l'individu.

- Une persuasion verbale venant d'autrui. Des conseils ou encouragements peuvent renforcer la croyance de l'individu en son potentiel et créer un climat de confiance. Cette source est à nuancer : le discours peut être perçu différemment selon la personne ressource. Interviennent en effet des facteurs tels que la crédibilité, l'expertise ou encore les liens affectifs qui existent entre les individus.

- Un état physiologique et émotionnel stable et positif. Certains états émotionnels, tels que l'anxiété, peuvent écorner la performance et donc réduire l'auto-efficacité. Au contraire, quand l'individu parvient à surmonter ces états émotionnels néfastes, son auto-efficacité s'en retrouve renforcée.

Ces quatre sources sont complémentaires, et sont mobilisables au cours du processus entrepreneurial pour contribuer à renforcer le sentiment d'efficacité personnel de l'individu. Quand il existe une inadéquation entre le degré d'auto-efficacité et les objectifs attendus cela peut être néfaste au comportement entrepreneurial. Comme le suggère le tableau ci-

15 RONDIER, Maïlys, « A. Bandura. Auto-efficacité. Le sentiment d'efficacité personnelle. Paris : Éditions De Boeck Université, 2003 », L'orientation scolaire et professionnelle, septembre 2004, p. 475-476.

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dessous, un sentiment d'efficacité personnel faible associé à des attentes de résultats élevés entraînera nécessairement une auto dévalorisation, un découragement. En revanche un sentiment d'efficacité personnel élevé associé à des attentes de résultats élevés sera moteur et favorisera les aspirations, l'engagement productif de l'individu et le sentiment de réussite personnel. Ainsi, conscient de ses atouts ou carences l'individu peut ajuster son comportement, ré envisager ses attentes et redéfinir ses objectifs.

Tableau 1 : Configurations de Bandura16

La théorie de Bandura montre par conséquent qu'une pédagogie de la réussite couplée à un environnement positif et apaisé augmente les chances d'un individu à croire en ses capacités, et, parallèlement, son intention d'entreprendre.

À présent que l'auto-efficacité est définie, nous nous interrogeons sur la possibilité d'en apprécier la place qu'elle occupe dans le processus entrepreneurial d'un individu. D'une part, nous imaginons qu'il est possible de déterminer son degré lors d'entretiens verbaux. En effet, si l'entrepreneur est enjoué et démontre sa motivation, il va sans dire que son sentiment d'efficacité personnelle sera au beau fixe. Mais puisque l'auto-efficacité est « la croyance des individus en leur capacité de mobiliser les ressources nécessaires pour maîtriser les événements qui affectent leur existence (Bruchon-Schweitzer, 2014)17 », il est

16 COLLECTIF, 2004, De l'apprentissage social au sentiment d'efficacité personnelle. Autour de l'oeuvre d'Albert BANDURA, l'HARMATTAN, 175 : [En ligne : https://ent2d.ac-bordeaux.fr/disciplines/hotellerie/wp-content/uploads/sites/46/2018/05/BANDURA_Theorie.pdf].

17 Nagels, M. (2016). L'auto-efficacité, une ressource personnelle pour s'autoformer. Apprendre par soi-même aujourd'hui. Les nouvelles modalités de l'autoformation dans la société digitale (p. 65-79). Paris : Editions des archives contemporaines, p.3. : [En ligne : https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-01297031/document].

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également possible de la mesurer en observant la trajectoire de l'entreprise et sa réussite. Toutefois, nos recherches font état de l'existence d'un outil plus concret : l'échelle des sentiments d'auto-efficacité aux décisions de carrière (Career Decision Self-Efficacy Scale - CDSES18). En 1983 Taylor et Betz19, se basant sur les théories de Bandura, réalisent que l'auto-efficacité est déterminante dans l'élaboration des choix de carrière et des décisions d'orientation. Ils partent du postulat que parvenant à mesurer ce sentiment ils pourront davantage appréhender les choix d'orientation et traiter l'indécision. Pour cela, ils proposent de sonder cinq domaines de compétences qu'ils considèrent comme des facteurs clés des comportements individuels conduisant l'orientation professionnelle : l'auto-connaissance, la recherche d'informations sur le secteur visé, les objectifs, la planification et la prise en compte des problématiques pouvant survenir tout au long du parcours. À chaque domaine ils associent une dizaine d'items pour lesquels le répondant doit évaluer son degré de confiance de 0 (= pas de confiance) à 9 (= confiance parfaite). Très vite, cette échelle est devenue dans le domaine du conseil d'orientation des choix un outil de référence. Au fil du temps, pour simplifier son utilisation, le nombre d'items est passé de 50 à 25 et les modalités de réponses restreintes de 10 à 5. Un score est ainsi élaboré et permet de conclure à un certain degré d'auto-efficacité. Cependant cette échelle, bien qu'elle soit la seule, à notre connaissance, qui permette d'apprécier l'auto-efficacité d'un individu, voit son champ d'application restreint aux choix des orientations professionnelles. Puisque la notion d'auto-efficacité gagne progressivement du terrain dans la réflexion des facteurs influençant le comportement entrepreneurial, il serait judicieux d'en adapter les items pour mesurer ce sentiment chez l'entrepreneur naissant.

Le sentiment d'auto-efficacité est donc primordial lors de la phase de démarrage d'une entreprise. Il impulse une dynamique positive à l'initiative entrepreneuriale nécessaire à sa pérennité. Il renforce la faisabilité perçue de l'entrepreneur et donc son intention. Cela est d'autant plus vrai dans un contexte d'entrepreneuriat contraint où la désirabilité perçue (second déterminant majeur de l'intention entrepreneuriale) est souvent nulle.

18 Jean-Philippe Gaudron, « L'échelle des sentiments d'auto-efficacité aux décisions de carrière - forme courte : une adaptation française pour lycéens », L'orientation scolaire et professionnelle [En ligne], 42/2 | 2013, mis en ligne le 07 juin 2016, consulté le 06 décembre 2018. URL : http://journals.openedition.org/osp/4108

19 Taylor, K. M., & Betz, N. E. (1983). Applications of self-efficacy theory to the understanding and treatment of career indecision. Journal of Vocational Behavior, 22, 63-81.

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"Des chercheurs qui cherchent on en trouve, des chercheurs qui trouvent, on en cherche !"   Charles de Gaulle