L'impact des révisions constitutionnelles dans la formation de l'état de droit en R.D.Congo.( Télécharger le fichier original )par Félicien-Joseph MUBENGA Université Notre-Dame du Kasayi - Licence 2014 |
B. Les limites temporellesCe sont des événements interdisant la révision de la constitution .A cet effet, l'article 219 de la constitution en prévoit cinq à savoir : · L'état de guerre ; · L'état d'urgence, · L'état de siège, · La période d'intérim à la présidence de la république ; · La période pendant laquelle l'Assemblée nationale et le sénat se trouvent empêcher de se réunir librement (21(*)). Dans cette même optique , pendant les périodes de non révision de la constitution , la dissolution de l'Assemblée nationale est interdite puisque pour faire face à la situation d'incommodité survenue la collaboration de tous les pouvoirs institués s'impose. En effet , le congrès est invité à se prononcer par une résolution sur l'état d'urgence , de siège ou la déclaration de guerre. Le pays se trouverait amputer d'un organe essentiel et ne saurait faire face aux circonstances qui menacent l'indépendance et l'intégrité du territoire national si l'Assemblée nationale et le sénat ne peuvent se réunir librement (22(*)). Ces circonstances peuvent également provoquer l'interruption du fonctionnement régulier des institutions, raison pour laquelle en vue de préserver la cohérence institutionnelle il ne peut être envisagé des révisions constitutionnelles en l'absence d'indépendance suffisante du fonctionnement de toutes les institutions appelées à concourir à la procédure de révision de la constitution (23(*)). En droit comparé , le constitution française dont l'influence sur la constitution congolaise est indéniable , la limitation circonstancielle de ne point engager ni poursuivre la procédure de révision lorsqu'il est porté atteinte à l'intégrité du territoire trouve sa source dans la loi constitutionnelle du 10 Juillet 1948 adoptée alors que les forces allemandes occupaient la partie du territoire (24(*)).7 a) L'état de guerre Le pouvoir de déclarer la guerre relève de la compétence du président de la République .C'est un pouvoir conditionné dont la mise en oeuvre est soumise à la réalisation de trois préalables : v Il faut d'abord demander l'avis du conseil supérieur de la défense ; v L'autorisation de l'Assemblée nationale et du sénat réunis en congrès conformément à l'article 119 point 2 de la constitution pour l'adoption d'une résolution autorisant le président de la République de déclarer la guerre (25(*)). Brièvement , ce qui justifie l'interdiction de la révision constitutionnelle pendant cette période , c'est que l'absence de la pleine jouissance des libertés publiques risque d'ouvrir la voie à l'arbitraire et sortir de l'essence même d'une révision constitutionnelle. C'est ce danger prévisible que l'on évite, vu que les organes de l'Etat ne fonctionnent plus de manière régulière. b) L'état de siège L'état de siège est le régime juridique applicable lorsqu'une partie du territoire se trouve sous une occupation ennemie.26(*) Dans le cadre de la République Démocratique du Congo depuis son accession à la souveraineté tant nationale qu'internationale le 30 Juin 1960 plusieurs rebellions ont provoqué l'interruption du fonctionnement régulier des institutions sur une partie du territoire et contraint l'Etat à décréter l'état de siège en vue de prendre des mesures nécessaires pour rétablir l'autorité de l'Etat (27(*)). La procédure pour déclarer l'état de siège diffère de celle de la déclaration de guerre sur certains points : · L'avis du conseil supérieur de la défense n'est pas requis, néanmoins il y a concertation préalable entre le président de la République et le premier ministre avec les présidents de deux chambres ; · Dès lors que les deux chambres réunies en congrès se sont prononcées positivement par une résolution et le conseil des ministres par ordonnance ,le président de la République prend des mesures qui s'imposent pour faire face à la situation (28(*)). Comme ces ordonnances comportent des mesures exceptionnelles afin de ne pas violer la constitution. Elles sont soumises dès leur signature à la cour constitutionnelle qui, toute affaire cessante se prononce sur leur constitutionnalité . Dans ces conditions, la révision constitutionnelle est interdite car il est inconcevable de modifier l'acte qui organise les différents pouvoirs publics et les libertés fondamentales des citoyens tant que l'Etat n'exerce pas sa souveraineté sur toute l'étendue du territoire national (29(*)). La solidarité nationale exige que la paix revienne d'abord et ensuite procéder à la révision de la constitution. Réviser la constitution sans se préoccuper au préalable du malheur qui frappe les concitoyens qui se trouvent dans la partie du territoire assiégé peut être considérée comme une forme d'abandon ou de trahison . c) L'état d'urgence L'état d'urgence est le régime juridique restreignant les libertés publiques. Il se différencie cependant de l'état de siège du fait que les pouvoirs de police qu'il implique ,quoiqu' entendus consistent à être exercés par les autorités civiles. De même les tribunaux civils ne perdent pas leur compétence au profit des tribunaux militaires (30(*)). Toutefois , en droit congolais la différence entre l'état d'urgence et l'état de siège s'agissant des mesures à prendre n'est pas établie de manière suffisante. La procédure pour déclencher l'état d'urgence est identique à celle prévue pour l'état de siège. La différence réside uniquement dans la nature des mesures à prendre dans un cas tout comme dans l'autre. d) La période d'intérim à la présidence de la République. Cette période est de soixante jours .Elle peut être prolongée à cent vingt jours en cas de force majeure. C'est la vacance pour cause de décès , de démission ou pour toute autre cause d'empêchement définitif qui ouvre la voie à la période d'intérim à la présidence de la République. La constitution interdit de dissoudre l'Assemblée nationale, nommer le premier ministre ,nommer et relever de leurs fonctions les Ambassadeurs et les envoyés extraordinaires , les officiers généraux des forces armées et ceux de la police nationale , les Chefs d'état major général , les chefs d'état major et les Commandants des grandes unités des forces armées , les haut fonctionnaires de l'administration publique, les responsables des services et établissements publics ainsi que les mandataires de l'Etat dans les entreprises et organismes publics , les magistrats du siège et ceux du parquet. Toutes ces interdictions ont une seule cause, éviter que le président intérimaire arrange son propre lit en mettant à des postes clés une clientèle à sa dévotion et empêcher les élections de se dérouler pour combler la vacance (31(*)). Il est également interdit de procéder à la révision constitutionnelle pendant la période d'intérim à la présidence de la République, car la mission essentielle de l'intérimaire est de doter le pays de l'institution président de la République dans un délai déterminé. Permettre au président intérimaire de manipuler la constitution , le détournerait de sa mission et obligerait le pays à demeurer plus qu'il en a fait à l'expectative.
e) L'empêchement de l'Assemblée nationale et du sénat de se réunir librement Dans l'hypothèse du fonctionnement régulier des institutions ,toute révision de la constitution implique nécessairement l'intervention de l'Assemblée nationale et du sénat. S'il y a empêchement de deux chambres du parlement de se réunir librement il ne peut y avoir une révision constitutionnelle (32(*)). Dans l'histoire récente du pays, le maréchal MOBUTU pouvait en disposant des chars avec des militaires en alerte maximale, empêcher toute institution de fonctionner librement (33(*)). C'est ainsi que TSHISEKEDI qui voulait résister à l'ordonnance de révocation prise à son encontre par le maréchal MOBUTU a été chassé de la primature par les chars de combat alignés devant le bureau du premier ministre, Mais l'époque de la dictature étant révolue, on ne peut pas exclure le cas d'empêchement de deux chambres de se réunir librement pour deux raisons : - D'abord par ce que le constituant lui-même l'a prévu; - En suite par ce que la constitution elle-même envisage le cas de menace grave pouvant interrompre le fonctionnement régulier des institutions. Lorsqu'il y a occupation du siège des institutions par des forces occupantes, les deux chambres ne peuvent pas se réunir librement. * 21 JORDC, n° spécial 47ème année, Constitution de la RDCongo, Art 219 * 22 BOSHAB , E, ; Op.Cit , P299 * 23 IBIDEM * 24 POLLET PASOUSSIS,D ; La Constitution Congolaise , petite soeur africaine de la Constitution Française, RFDC,n°75,2008 P471 Cité par BOSHAB, E, entre la révision de la Constitution et l'inanition de la nation ,éd Larcier, Bruxuelles,2003,P300. * 25 IDEM * 26 IDEM, P301 * 27 IBIDEM * 28 BOSHAB ;E, Op,Cit P 304 * 29 IBIDEM * 30 IDEM,P305 * 31 IDEM ,P 307 * 32 IBIDEM * 33 BOSHAB,E ;Op .Cit P308 |
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