WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Les finalités éducatives des professionnels et les enjeux liés à  la résilience dans l'accompagnement socio-éducatif. Une étude de cas au lycée Ettore Bugatti (Illzach) et au saj (Neuf-Brisach).

( Télécharger le fichier original )
par Holly & Anne MANY & HERMMANN ISRAEL
Université de Haute Alsace - Master 2 Sciences de là¢â‚¬â„¢éducation 2016
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

3.2 Conceptualisation du « Moi social »

3.2.1 Généralités et caractéristiques du « Moi social »

Selon Durkheim 136, tout individu est marqué par un ensemble de facteurs de son groupe social (« l'éducation, l'expérience, les règles et la connaissance ») qui le rendent « limité et agrandi ». Gilson (1985, p.77) cite Bergson qui affirme que « la contrainte sociale » a pour caractéristique essentielle de s'introduire dans la conscience individuelle, de lui devenir intérieure sous la forme du « Moi social ». Ce philosophe français a identifié le « Moi social » comme une entité sociale intégrée au « Moi propre » à chaque individu appartenant à cette société. Hinshelwood, R.D. (2007) le définit par l'incarnation d'une idée principale fondée à partir « d'attitudes, de croyances sociales et de figures dominantes » qui deviennent au final « un élément constitutif de l'individu ». Celui-ci s'identifie à un ensemble de croyances et de leadership cohérent avec l'idée en question. Proposition que Chalmel (op.cit.) semble réfuter de par une différenciation entre le « Moi social » (Entité visant une normativité sociale) et le « Moi individuel » (ou « Moi » correspondant à la singularité et l'unicité propre à chaque individu).

Selon Chalmel (ibid.), l'apport de Rousseau, grand défenseur de l'éducation du « Moi » versus « Moi social », a permis d'introduire le « Moi social » dans le système éducatif, à partir de principes normatifs selon lesquels l'enfant doit être éduqué comme citoyen, ce qui implique un processus de dénaturation « Moi » de l'enfant par un système encodé de normes sociales, « culturelles par essence » (ibid). Selon lui, le « Moi social » est un « pluriel idéologique » (Chalmel, 2015, p.7) issu d'un système social normatif, fondé sur les bases de la « doctrine politique organisant une société donnée dans ses dimensions socio-économiques » et des « idées reçues faisant office de théories » du système. Ainsi, dans cette étude, nous posons comme postulat que le concept « Moi social » est synonyme de « Pression sociale normative »

136 In Terrier, J. (2012).

183

dans le champ de l'éducation spécialisée et de « didactique » dans le domaine de l'éducation scolaire comme l'illustre le schéma ci-dessous.

Pression sociale normative (Éducation spécialisée)

Conformisme

Jugement

normatif

Evaluation Performance

Contraintes sociales

Pensée unique

Moi social

Didactique

(Éducation scolaire)

183

Figure n° 38 : Schématisation du « Moi social ».

Que ce soit « la pression sociale normative » ou la « didactique », chacun de ces concepts représente un seul et même système « Moi social » apparaissant sous différentes formes en fonction du sous-système dans lesquels ils se retrouvent : Famille, école, entreprise, lieu de culte, association, etc. Selon Chalmel, le « Moi social » sous forme de « didactique » est beaucoup plus présent dans le système scolaire des pays latins que les pays scandinaves. En effet, celui-ci explique que les pays de langue latine à l'instar de la France, sont très friands de didactique et sont ancrés dans ce système depuis très longtemps.

Daniel Pasquier (1986, p. 56) montre que l'enfant étranger scolarisé en France est écartelé entre son « Moi » sa culture, et le « Moi social » de la culture française. Celui-ci poursuit sa réflexion en démontrant que la France est l'un des rares pays ou « l'enfant étranger pour devenir français doit non seulement s'approprier des éléments de la culture d'accueil (enculturation) mais doit aussi abandonner les éléments de sa culture familiale (déculturation) » Le « Moi social » fonctionne toujours selon un système d'encodage et décodage, d'enculturation et d'acculturation ne tenant pas compte du capital culturel, linguistique et social « Moi » de l'individu (Ibid., p.87). C'est alors qu'on comprend que le « Moi social » dénature l'individu en tant que personne, spolie son « Moi » afin de fabriquer des citoyens répondant certes, à de très bonnes valeurs républicaines mais aussi dominés par un système idéologique, politico-

184

184

économique et social très contraignant et normatif. De fait, le « Moi social » est inscrit dans un carcan de normes et d'exigences sociales à l'égard de tout individu appartenant à son système, et il vise l'éducation de l'individu à des finalités citoyennes (intégration sociale) et non individuelles (éducation de l'individu). En parlant d'individualité, il est important de souligner que « la France est un pays très fort en investissement éducatif sur le plan collectif mais aussi est l'un des pays ou la dotation pour chaque élève individuel est plus faible qu'ailleurs » (Meirieu, 2000 p. 95). Par ailleurs, cela interroge non seulement la nature et des limites afférentes à la pression sociale qui domine sur les « Moi » individuels, mais aussi à celle des conséquences inhérentes à cette « dénaturation du Moi » énoncée par Rousseau (Ibid).

Chalmel énonce le caractère normatif de cette finalité éducative, provoquant la frustration et l'altération des aspirations du « Moi » des personnes mais également leur ostracisme. Dans ce sens, « plus un système est normatif, plus il génère lui-même son propre échec ». Des études en marketing affirment également que plus « un système est simple plus il est efficace et que toutes les organisations, plus particulièrement celles qui sont grandes et complexes sont fondamentalement inefficaces et gaspilleuses » (Koch, 2007 p. 115-122). Ainsi, la simplicité favorise l'efficacité et la qualité tandis que la complexité engendre la frustration et le stress. En effet, le « Moi social », en tant que système, encourage la complexité à travers la normativité, ce qui engendre selon Chalmel le risque de marginalisation et d'exclusion des individus « non-conformes ».

185

185

Figure n°39:

Schématisation des enjeux du processus relatif au Moi social et au Moi. (Sources : Chalmel, 2015, p.13.)

Hinshelwood, R.D. (2007) estime que « l'adhésion rigide exigée comporte une perte de la capacité de penser de façon réaliste » et que « l'individu a beaucoup à perdre sur le plan psychologique s'il s'oppose aux forces sociales qui sont exercées sur lui ». Dans l'éducation au « Moi social », le cadre est normatif et imposé par un expert de la connaissance et du savoir, qui exige la conformation sociale et le respect des critères de réussite (évaluation ou contrôle, performances) à un savoir, un savoir-faire et un savoir-être. Les risques potentiels sont l'échec (non admis), la coercition, la dépendance, la dénaturation de l'individu, la pression sociale normative. Dans une correspondance de Saint Paul 137aux églises romaines au 1er siècle après Jésus Christ, celui-ci fait mention du « Moi social » qu'il caractérise par l'esprit du siècle présent :

137 Saint Paul, figure emblématique du christianisme. Ses écrits se retrouvent dans la bible, notamment dans le Nouveau Testament.

186

186

« Ne vous conformez pas au siècle présent, mais soyez transformés par le renouvellement de l'intelligence afin de discerner quelle est la volonté de Dieu, ce qui est bon, agréable et parfait. »

Sainte Bible (Edition Bible on line moteur 4.08.01), Romains 12 : 2

Une mauvaise interprétation de ce texte a produit des dérives de toutes sortes dans l'histoire de l'église, incitant des personnes de foi chrétienne à l'ascétisme et à la réclusion religieuse. Et pourtant, ce que l'auteur met en exergue dans ce texte est avant tout d'adopter une posture de questionnement par rapport au « siècle présent » au regard de la foi et de ne pas se laisser formater sans discernement dans un système idéologique. En d'autres termes, Saint Paul encourage les chrétiens à faire ce que Monsieur Chalmel demande à ses étudiants de faire dans tous ses cours : Se poser les bonnes questions. Un autre exemple très imagé du « Moi social » dans les écritures bibliques se retrouve dans l'extrait du passage suivant :

Saül fit enfiler sa tenue à David. Il plaça sur sa tête un casque en bronze et le revêtit d'une cuirasse. David mit l'épée de Saül par-dessus ses habits et voulut marcher, car il n'avait encore jamais essayé, mais il dit à Saül : « Je ne peux pas marcher avec cette armure, je n'y suis pas habitué. » Et il s'en débarrassa.

Sainte Bible (Edition Bible on line moteur 4.08.01), 1 Samuel 17 : 38-39

Le texte montre que le roi Saul a voulu revêtir David, son serviteur de son accoutrement et de son armure, mais David n'a pas pu marcher. En effet, le « Moi social » revêt les individus d'une autre personnalité et leur met sous un joug pesant qui les empêche d'évoluer ou de devenir eux-mêmes. C'est ce qui arrive à l'enfant dès qu'il arrive à l'école maternelle jusqu'à la fin de sa scolarité ; on ne tient pas compte de ses ressources personnelles afin de pouvoir l'aider à progresser et réussir, mais on l'appesantit de savoirs auxquels il attribue souvent ni sens ni utilité.

Ainsi, après avoir exposé les généralités et les principales caractéristiques du « Moi social », nous allons tenter de le localiser et le définir dans le champ de l'éducation spécialisée et dans

187

187

le champ scolaire tout en tenant compte du contexte dans lequel nous effectuons cette étude, i.e. le SAJ du Neuf-Brisach et le Lycée Ettore Bugatti.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Je voudrais vivre pour étudier, non pas étudier pour vivre"   Francis Bacon