2.1. Définition:
La présomption d'innocence signifie qu'une personne,
même suspectée de la commission d'une infraction, ne peut
être considéré comme coupable avant d'en avoir
été jugé comme tel par un tribunal
42Le principe de la présomption d'innocence
est un principe fondamental du système juridique Congolais. Il est
inscrit dans plusieurs textes, tant national qu'internationaux, qui le
promettent en tant que droit de l'homme et en garantissent son application et
son respect.
SECTION I. CONTENU DU PRINCIPE
41 J. VERHAEGEN; Droit pénal, 1969, p. 81.
42 www.google.com:jalonspour une histoire de la
présomption. Le 5/mai/2016 à 20H03
Ecrit par Idriss SANGWA ILONDA
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La difficulté à cerner la présomption
d'innocence provient de sa nature. En effet, la présomption d'innocence
est une expression fourre-tout. Ce qui rend possible et aisée une
confusion avec la présomption de culpabilité. Il convient de
donner un nouveau contenu à la présomption d'innocence. La
détermination de ce contenu soulève la problématique
suivante : qui est considéré présumé innocent? Dans
les différentes étapes de la procédure pénale,
jusqu'où est-on présumé innocent ? Quels sont les
privilèges attachés à la présomption d'innocence?
Qui est considéré présumé innocent? Cette question
entraine une autre: peut-on considérer le présumé innocent
comme innocent ou suspect? Si le présumé innocent est innocent,
alors il ne doit nullement faire l'objet d'une attention des autorités
de poursuite. La raison est qu'il représente une piste sans
intérêt pour la manifestation de la vérité dans
l'établissement de l'infraction. Si le présumé innocent
est suspect, alors l'intérêt pour les autorités de
poursuite est accru. En fait, le suspect offre une piste de recherche dans la
manifestation de la vérité ; car sur lui existent des indices ou
renseignements susceptibles d'établir la commission ou la participation
à la commission de l'infraction.
Mais la fragilité des indices ne permet ni de porter
atteinte à son innocence, ni de conforter sa culpabilité. Cette
situation intermédiaire correspond mieux à la présomption
d'innocence. Elle désigne ainsi une situation intermédiaire
où de simples soupçons permettent de douter de l'innocence de
l'individu sans avoir en même temps des éléments pour
établir sa culpabilité. Le présumé innocent est
donc celui sur qui pèse de simples soupçons de commission d'une
infraction. Il convient de tenir compte de l'évolution sur le statut du
suspect en France. Cette évolution législative permet de
distinguer le suspect sans contrainte ou (libre) et le suspect sous contrainte.
Si le suspect libre correspond aux standards de la présomption
d'innocence, le suspect sous contrainte est proche du présumé
coupable.
Dans les différentes étapes de la procédure
pénale, jusqu'où est-on présumé innocent? Si
l'alinéa 2 de l'article 8 du code de procédure pénale
camerounais dispose: « la présomption d'innocence s'applique au
suspect, à l'inculpé, au prévenu et à
l'accusé », il confirme en conséquence qu'on est
présumé innocent même devant le tribunal avant le jugement.
La procédure pénale comporte de façon simplifiée,
trois étapes : l'enquête de police, l'instruction
préparatoire (si nécessaire) et le jugement. La question est de
savoir si à
Ecrit par Idriss SANGWA ILONDA
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chacune de ces étapes, on est présumé
innocent. Si la situation, où l'on est ni totalement innocent et ni
totalement coupable, est admissible pendant l'enquête de police, il en
est autrement pendant l'instruction et le jugement. La présomption
d'innocence prend fin lorsque l'officier de police judiciaire décide de
la garde à vue. Toute personne retenue dans le local de la police
judiciaire, parce qu'il existe contre elle des indices graves et concordants
n'est plus un simple suspect. Elle devient mieux qu'un suspect, « un
présumé coupable en gestation ». Ce qui justifie la
pertinence de la garde à vue pour qu'elle ne fasse pas obstacle à
la manifestation de la vérité.
Le Procureur de la république en tant que juge de
l'opportunité des poursuites peut encore les suspendre. Mais la
présomption d'innocence est déjà écorchée.
Il ne reste que l'établissement de l'innocence pour s'affranchir des
griffes de la justice. A la vérité la présomption
d'innocence prend fin lorsqu'on a trouvé des charges suffisantes contre
le suspect. Il est donc présumé coupable ; même si cette
présomption peut être levée par des preuves contraires
pendant l'instruction et/ou le jugement. On est donc présumé
innocent pendant l'enquête de police. De façon précise, le
présumé innocent est celui qui intéresse la justice, mais
qui n'a pas encore fait l'objet d'une garde à vue ou d'une
détention provisoire sur le plan interne, ou d'un mandat d'arrêt
sur le plan international. Quels sont les privilèges attachés
à la présomption d'innocence?
La situation intermédiaire entre l'innocence et la
culpabilité est délicate, eu égard au risque de confusion
et de violation des droits des présumés innocents. Parce que le
présumé innocent est encore innocent, il ne doit être ni
gardé à vue, ni détenu provisoirement. Le fondement est
qu'un soupçon ne saurait justifier une atteinte à la
liberté individuelle et par extension une atteinte à la
réputation. Parce que le présumé innocent est
soupçonné, toute mesure visant à recueillir des
renseignements de sa culpabilité doit être secrète et
ignorée du concerné. Le souci est d'éviter toute
possibilité de distraction de preuves. Cette appréhension de la
présomption d'innocence mérite d'être distinguée des
hypothèses où les autorités de poursuite disposent des
indices suffisants de culpabilité. Dans ces cas, la garde à vue
et la détention provisoire seraient justifiées, sous le couvert
du secret de l'information judiciaire.
Ecrit par Idriss SANGWA ILONDA
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L'effort de ce développement est d'établir un champ
propre à la présomption d'innocence, débarrassé de
toute éventualité de confusion avec la présomption de
culpabilité. En effet, il est sans intérêt de parler de
présomption d'innocence, lorsque les autorités de poursuite
disposent des charges suffisantes de culpabilité. Si l'on parvient
à un champ propre à la présomption d'innocence, alors on
peut efficacement la protéger.
Bref: Comme bien d'autres principes, la mise en exergue de la
présomption d'innocence 43peut correspondre à un temps
de crise plus qu'à une période d'apogée. Il convient
d'ailleurs de s'entendre sur le sens du terme« présomption
d'innocence ». Les français considèrent volontiers avec
fierté qu'il s'agit d'une conquête révolutionnaire
baignée par les lumières. Les Anglos - saxons, quand ils ne sont
spécialistes de droit français, ont tendance à proclamer
abruptement que la présomption d'innocence n'existe pas en France
puisqu'un prévenu devrait y prouver son innocence. En fait«
présomption d'innocence »renvoie à plusieurs séries
de principes, souvent fort éloignés les uns des autres, qui,
historiquement ont émergé à des époques
différentes. Elle est tout d'abord une règle de preuve de la
culpabilité de la personne poursuivie. La seconde exception,
d'apparition contemporaine, est dans un sens la conséquence de la
première : tant que la culpabilité n'a pas été
établie par le juge, la personne poursuivie doit être
traité en innocent par tous. Le paradoxe de la présomption
d'innocence est que ces deux principes qui paraissent logiquement liés
ne sont pas imposés juridiquement en même temps. Ainsi la mise en
lumière actuelle du droit à l'image d'innocence s'accompagne d'un
déclin de la présomption d'innocence mode preuve.
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