III. L'échec des chasses et ses
conséquences
A l'époque, Etienne Lafont 148, syndic du
Gévaudan, travaille sans relâche à l'éradication de
la Bête. Il tente tout d'abord de rassembler les bergers de la
région. En effet, ces derniers connaissent le terrain et disposent de
chiens. L'idée est ingénieuse mais se révèle
être d'une efficacité relative. Alors, il prend la décision
d'autoriser le port d'armes pour les résidents du canton de Langogne qui
participent aux traques. Le 8 octobre 1764 149, une grande battue
est organisée. La stratégie est
142 BONET, « Chronodoc », Loc cit., p.113.
143 MORICEAU Jean-Marc, Histoire du grand méchant
loup, 3000 attaques en France, Op. cit., p.91.
144 La Guerre de la ligue d'Augsbourg oppose de 1688 à
1697 Louis XIV et l'Empire ottoman allié aux jacobites irlandais et
écossais à la Ligue d'Augsbourg formée par l'alliance
entre l'Anglo-Néerlandais Guillaume III, Léopold Ier
(Saint-Empire romain germanique) et le roi Charles II d' Espagne. (ALPHA,
1968)
145 Par « sources Officielle » l'auteur de
ce tableau fait référence aux autorités de l'époque
: La couronne, les chasseurs officiels, les administrateurs régionaux,
les curés, etc...
146 Par « sources non officielles »
l'auteur renvoie à tous les "civils." Par exemple, les
témoins non attachés aux autorités de l'époque (
les paysans, les travailleurs etc...)
147 Historiens : Pour les victimes, les historiens sont
pratiquement réduits à Pourcher (Alain Bonet, Courriel du
23.02.2016).
148 Cumulant les tâches inhérentes à sa
fonction de syndic du Gévaudan et celles qui incombent à la
responsabilité de subdélégué de l'intendant du
Languedoc, Etienne Lafont doit assurer « la bonne rentrée des
impositions royales et la paix civile » MORICEAU Jean-Marc,
l'homme contre le loup , Op cit. p.17.
149 MORICEAU Jean-Marc, l'homme contre le loup, Op.
cit., p.21.
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simple, il faut « encercler la zone boisée en
se postant aux extrémités de l'enceinte de chasse »
150. On tire alors une bête qui par trois fois se relève
151. Dans une lettre à l'intendant du Languedoc,
Saint-Priest, Laffont émet une hypothèse. Bien plus grande qu'un
loup, avec un museau qui ressemble à celui du veau, ladite Bête
pourrait être une hyène avec « des soies (poils) si
longues » 152 qu'elles feraient « obstacle aux balles »
153.
Deux semaines plus tard, le vingt-deux octobre 1764, on
retrouve les restes de Marguerite Malige, décapitée près
du hameau de Grazière Mages. Cette fois-ci, la victime sera
enterrée sans sa tête.154 Les circonstances de la mort
de deux victimes (Marie Solinhac155 et Marguerite Malige) obligent
les agents de la baronnie d'Apcher à appliquer la législation en
vigueur. En effet, depuis 1736, il faut pouvoir déterminer les causes de
la mort et en déduire si elle est d'origine criminelle. Le fait qu'une
enquête soit demandée est signifiant. En effet, les victimes sont
des femmes et toutes deux sont décapitées. Alors, la Bête
pourrait-elle être un homme ? C'est probablement pour infirmer cette
éventualité ainsi que pour déterminer un mobile que des
enquêteurs sont dépêchés sur les lieux. Après
enquête, « toute présomption criminelle est
écartée » 156.
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