Les insuffisances de la constitution burkinabè du 02 juin 1991.( Télécharger le fichier original )par Guetwendé Gilles SAWADOGO Université Privée de Ouagadougou - Licence ès Sciences Juridiques et Politiques 2014 |
Section 2. Les insuffisances résultant de la révision de la constitutionIl n'y a pas de mal à réviser une constitution. D'ailleurs, le changement des réalités et des aspirations du peuple obligent à respecter ce principe d'adaptabilité de la constitution. Comme le stipule bien la déclaration française des droits de l'Homme et du citoyen, « un peuple a toujours le droit de revoir, de réformer et de changer sa Constitution. Une génération ne peut assujettir à ses lois les générations futures »19(*). Il est donc clair que lorsque nous parlons d'insuffisances dans la révision de la Constitution, nous faisons allusion à autre chose : en effet, la procédure de révision de la Constitution du Burkina Faso marginalise le peuple (§1) mais aussi les révisions constitutionnelles sont des occasions de manipulation de la constitution au Burkina Faso (§2). §1. La marginalisation du peuple dans les processus révisionnelsAffirmer que le peuple burkinabè est mis à l'écart des processus peut étonner, a priori, pour qui sait que la constitution du 02 juin 1991 accorde au peuple aussi bien l'initiative de la révision20(*) que le pouvoir de révision de la constitution21(*). La marginalisation est pourtant une réalité visible à partir même du texte constitutionnel qui consacre le principe de la révision par la voie parlementaire (A). L'initiative de la révision accordée au peuple par le mécanisme de la pétition est difficile voire illusoire à mettre en oeuvre (B). A. Le principe de la révision parlementaireEn prévoyant que la constitution peut être révisée par une majorité des trois quarts (¾) des membres du Parlement (1), le constituant burkinabè fait du recours au référendum une exception (2). 1. La révision au trois quarts (¾) des membres du ParlementL'alinéa 3 de l'article 164 de la constitution du 02 juin 1991 dispose que «le projet de révision est adopté sans recours au référendum s'il est approuvé à la majorité des trois quarts (3/4) des membres du Parlement convoqué en Congrès par le Président du Faso ». C'est l'intention du constituant français de 1946 qui a été transcrite dans la constitution du 02 juin 1991 burkinabè. En effet, des motifs, il ressort que les constituants de 1946 ont « voulu qu'il ne soit fait recours au référendum que lorsque la volonté des représentants du peuple ne se serait pas manifestée d'une manière particulièrement forte, soit par une très large majorité des trois cinquièmes dans chacune des deux assemblées ». De façon analogue, le constituant burkinabè n'a voulu recourir au peuple que si leurs représentants n'ont pas par une majorité qualifiée des trois quarts (¾) approuvé le projet de révision. Il est vrai que plusieurs raisons militent en faveur de la révision parlementaire de la constitution. D'abord, les parlementaires sont les représentants du peuple, donc leur vote n'équivaut pas moins au vote du peuple. Ensuite, l'organisation d'une consultation populaire requiert un investissement colossal en termes de moyens financiers que de mobilisation en ressources humaines, techniques et logistiques ; ce qui semble énorme pour un pays en voie de développement. Enfin, la consultation populaire n'aboutit pas toujours à un résultat différent. Le peuple en majorité non instruit est souvent manipulé, ce qui fausse l'équité et la sincérité de la consultation. Cependant, ériger la révision parlementaire en principe compromet la démocratie car les parlementaires qui sont avant tout des politiciens pourraient en abuser surtout quand on connait le contexte de déséquilibre des forces tenant au fait majoritaire à l'Assemblée nationale. La preuve est que depuis l'adoption de la constitution, le peuple burkinabè n'a pas été une seule fois consulté alors que la constitution a fait l'objet de sept révisions, lesquelles ont consisté essentiellement en faction-défaction-réfaction, et ce, toutes les fois que le parti au pouvoir, qui a toujours eu la majorité requise22(*) pour la réviser, en avait besoin. C'est alors regrettable que le peuple souverain ne soit consulté qu'exceptionnellement. * 19 Article 28 de Déclaration Française des Droits de l'Homme et du Citoyen, 1789. * 20 Aux termes de l'article 161 de la constitution, l'initiative de la révision de la constitution appartient (...) au peuple... * 21 L'article 164 de la constitution indiquant la procédure de révision de la constitution stipule que « le projet de teste est ensuite soumis au référendum ». * 22 L'article 164 de constitution exige une majorité qualifiée des ¾ des membres du parlement pour la révision. |
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