Les insuffisances de la constitution burkinabè du 02 juin 1991.( Télécharger le fichier original )par Guetwendé Gilles SAWADOGO Université Privée de Ouagadougou - Licence ès Sciences Juridiques et Politiques 2014 |
2. Le caractère excessif des révisionsLorsque l'on essaie de faire le ratio des révisions constitutionnelles au Burkina, l'on se rend compte que la constitution du 02 juin 1991 a été révisée une fois tous les trois ans environs. S'il est vrai qu'elle est moins révisée que la constitution française de 1958 qui connait en moyenne une révision par an ainsi que celle sénégalaise qui est révisée tous les semestres, il faut reconnaitre que le ratio de révision au Burkina est élevé, les pays cités n'étant pas un modèle à suivre en la matière, et, le Burkina Faso faisant ses premiers pas dans le renouveau constitutionnel devant avoir des principes cardinaux stables sur une certaine période pour la sédimentation de son constitutionnalisme. Le Professeur Abdoulaye SOMA affirmait à propos qu'avant les révisions de 2012, la fréquence de révisions était soutenable, acceptable. Cela signifie que maintenant, c'en est trop ! Entre 2012 et 2014, la constitution a été révisée trois fois et un processus de révision est à l'horizon. Cela est excessif pour un pays en quête de constitutionnalisme comme le Burkina. Cela est aggravé par le fait que les révisions ont consisté en des réformes assez quantitatives et fondamentales : certains préfèrent parler d'un changement de constitution, le texte initial ayant été profondément retouché. S'il faut être d'avis avec Jean Du Bois de Gaudusson, spécialiste français du droit constitutionnel, pour qui « une constitution se change, en effet, et c'est parfaitement conforme à l'État de droit ; si l'on fait référence au cas français, on s'apercevrait qu'une constitution peut se changer assez souvent, dès lors que les procédures sont respectées et que la révision s'effectue dans les formes républicaines », il ne faudrait cependant pas que ces révisions soient trop fréquentes car avant tout le principe voudrait que l'on change la constitution pour l'adapter au contexte, à la génération. L'on pourrait utilement se demander s'il y a eu un changement de contexte ou de génération entre 1991 et 2014 ou même entre 2012 et 2014 pour qu'on ait autant de révisions en si peu de temps. Ce caractère excessif est d'autant plus irritant quand on sait que les révisions ont porté sur les mêmes dispositions. C'est quand même trop de revenir sur l'article 37 de la constitution à trois reprises28(*) ou sur la nature du Parlement à deux reprises en si peu de temps. Si l'on a un droit de réviser la constitution, il ne faut pas en abuser car comme le souligne le Professeur Jean WALINE : « chaque fois que l'on révise la Constitution il y a le risque de jouer «l'apprenti-sorcier» c'est-à-dire de remettre en cause le très subtil équilibre que réalise la Constitution. Je serais tenté de dire qu'il n'y a pas de révision innocente de la Constitution et qu'avant de réviser il faut soigneusement réfléchir à toutes les conséquences éventuelles que pourrait avoir, ne serait-ce que par ricochet, la modification apportée »29(*). Cela ne semble pas être la préoccupation du constituant dérivé burkinabè qui révise la constitution assez souvent, lesquelles révisions ont d'ailleurs et malheureusement un caractère fantaisiste. * 28 L'article 37 a été révisé en 1997 et en 2000. Des discussions sont houleuses actuellement en ce que cette disposition est encore dans le collimateur d'une révision pour permettre à Blaise Compaoré de se présenter en 2015. * 29 En 2002, le constituant était revenu sur cette disposition pour supprimer la seconde chambre avant de revenir au bicamérisme en 2012. |
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