Les insuffisances de la constitution burkinabè du 02 juin 1991.( Télécharger le fichier original )par Guetwendé Gilles SAWADOGO Université Privée de Ouagadougou - Licence ès Sciences Juridiques et Politiques 2014 |
§2. Les manipulations de la constitutionL'on pourrait légitimement se demander à quoi servent les constitutions africaines quand on observe la pratique et l'objet de certaines révisions constitutionnelles en Afrique.Dire que les révisions constitutionnelles au Burkina Faso consistent en une manipulation de la constitution n'est pas un blasphème. Les faits sont là pour donner raison à l'auteur d'une telle affirmation. Non seulement la Constitution est trop révisée (A), toute chose qui le vide de son sens initial, mais ces révisions revêtent un caractère fantaisiste (B). A. La fréquence des révisions constitutionnellesPour bien appréhender le caractère excessif des révisions constitutionnelles au Burkina (2) il convient de présenter ses révisions de 1991 à 2014 (1). 1. Les révisions constitutionnelles de 1991 à 2014Depuis son adoption en 1991, la constitution du Burkina Faso a été révisée sept fois. La première révision est intervenue en 1997 et a consisté en la suppression des référents révolutionnaires de la constitution ainsi que la suppression de la clause limitative du mandat présidentiel à deux26(*). La seconde opérée en 2000 a consacré la réduction de la durée du mandat présidentiel de sept à cinq ans, le retour à la limitation du nombre de mandat à deux ainsi que l'éclatement de la Cour Suprême en quatre structures différentes (Cour de Cassation, Conseil d'Etat, Cour des Comptes et Conseil Constitutionnel)27(*). En 2002, la loi N°001-2002/AN du 22 janvier 2002 s'est essentiellement attachée à la transformation de la forme d'organisation du pouvoir législatif en la faisant passer d'un parlement bicaméral à une assemblée monocamérale et ce par la suppression de la Chambre des représentants. La quatrième révision est intervenue en 2009 en vue de combattre «le nomadisme politique» et d'opérer une meilleure répartition des compétences entre le Conseil constitutionnel et le juge administratif en matière de contentieux électoral. La loi N°023-2012/AN du 18 mai 2012 a inscrit dans la constitution la possibilité et les modalités d'une prorogation du mandat des membres du Parlement marquant la cinquième révision. La sixième révision de portée très étendue a été le fait de la loi N°033-2012/AN du 11 juin 2012 qui a apporté des changements significatifs à divers niveaux dont notamment: - le préambule, en constitutionnalisant la chefferie traditionnelle, le genre ainsi que certaines valeurs républicaines et éthiques; -la fonction présidentielle pour ce qui concerne les conditions d'éligibilité; -le mode de désignation du premier ministre; -l'organisation du pouvoir législatif qui redevient bicaméral avec la création d'un Sénat; -l'organisation et le fonctionnement du Conseil constitutionnel avec un réaménagement de la composition de l'institution ainsi que du mode de désignation de ses membres et de son président, la modification des conditions de saisine par les parlementaires, l'introduction de la question prioritaire de constitutionnalité et la reconnaissance d'un pouvoir d'auto-saisine ; -L'introduction de deux nouveaux titres qui consacrent la constitutionnalisation du Médiateur du Faso et du Conseil Supérieur de la Communication; -la création d'un article 168.1 qui octroie une amnistie pleine et entière aux anciens chefs d'Etat du Burkina Faso pour la période allant de 1960 à 2012. Enfin et pour la septième fois le constituant dérivé adoptait le 13 novembre 2013 une loi de révision constitutionnelle pour mettre en suspend les institutions issues de la révision de juin 2012, notamment en permettant à l'Assemblée nationale de délibérer seule avant la mise en place effective du sénat et au conseil constitutionnel de statuer avant la nomination des autres membres désormais prévus. En 22 ans donc d'existence, la constitution du Burkina Faso a été révisée sept fois, excessif à notre avis. * 26 Loi N°002/97/ADP du 27 janvier 1997 * 27Loi N° 003-2000/AN du 11 avril 2000 |
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