III.1. L'art oratoire au quotidien
Sur les enquêtés, seul un ménage a
répondu de ne plus utiliser de proverbes. Pour justifier cette
situation, notre interlocuteur avance qu'il n'est pas habitué à
prononcer tel ou tel proverbe. De l'autre côté, 97,5% des
ménages enquêtés affirment qu'ils utilisent toujours des
proverbes dans leur vie quotidienne. Généralement, pour ces
derniers, les proverbes sont utilisés pendant :
- Les tsaboraha
- Les mariages traditionnels,
- Les travaux communautaires,
- Les festivités culturelles,
- La présentation de condoléances, la
veillée mortuaire,
- Les circoncisions,
- Les périodes de conseil familial,
- Les réunions de résolution de conflits, etc.
Par ailleurs, même si les réponses tournent
autour de plusieurs évènements, les proverbes sont
généralement utilisés pendant la prise de parole telle que
le rasavölaña. Ces évènements ne sont que
des contextes justifiant le rassemblement villageois. En d'autres termes, les
öhabölaña sont présents à chaque fois
que les villageois se réunissent, quelle que soit la raison.
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III.1.1. Au village de Rantolava : la maturité rime
avec art oratoire
La progression dans le parcours de la vie repose, entre
autres, à l'aune de la maîtrise de la parole. D'abord, on
relève le « silence apprentissage » de l'enfant et de
l'adolescent à qui on demande d'écouter et de retenir ce qu'on
leur dit. Viennent ensuite les timides prises de parole en public d'un jeune
homme à l'occasion de don de boisson (rasavölan-toaka),
à l'occasion d'un travail collectif (rasavölaña amin'asa
fandriaka, rasavölaña amin-dampoño), à
l'occasion d'une réunion villageoise (fandresan-teny
an-kavoriaña).
Le rasavölaña régit la vie de
l'homme de la naissance à la mort. A la naissance, les membres de la
société rendent visite à la famille du nouveau-né,
à la fois pour honorer ce dernier et pour féliciter sa source,
par le biais du rasavölaña. Généralement, le
contenu du discours est deux ordres : d'une part, souhaiter le bonheur et le
succès de l'enfant, et rappeler aux parents leur rôle dans le
développement et l'épanouissement de celui-ci et, d'autre part,
les rassurer qu'ils ne sont pas seuls dans cette tâche difficile, car
l'enfant appartient également à la société. Devenu
adulte, pendant les mariages traditionnels ou « orimbato »
(contrat de mariage), tout commence par le rasavölaña. A
la mort, le « rasavölam-paty » (discours de
condoléances, funérailles...) trouve aussi sa place. Et,
entre-temps, de nombreux évènements familiaux mettent en exergue
cette place de la parole et de l'art oratoire dans la vie quotidienne.
Sans nul doute, les rasavölaña
présentent un cheminent éducatif dans tout parcours de vie
en pays betsimisaraka. En un mot, l'art oratoire se transmet, au
village de Rantolava, d'aîné à cadet, il se construit et
s'affine avec l'âge.
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