III.5. Effet de la lumière sur la stabilité des
extraits d'anthocyanes d'Hypoxis angustifolia et Ipomoea batatas
Etant donné que les bulbes d'Hypoxis
angustifolia et les feuilles d'Ipomoea batatas sont
généralement exposées au soleil après
récolte, nous avons voulu, également dans ce travail,
évaluer l'influence de la lumière sur la stabilité des
anthocyanes extraits de ces deux plantes. Pour y parvenir, nous avons pris des
spectres visibles à différents temps d'irradiation à la
lampe UV. Les figures ci-dessous donnent les spectres des extraits totaux
d'anthocyanes à différents temps d'irradiation.
Figures III-7 : Spectres visibles des extraits
totaux d'anthocyanes d'Hypoxis angustifolia avant et
après irradiation à différents temps sous la lampe UV
(à 366nm).
Figures III-8 : spectres visibles des extraits
totaux d'anthocyanes d'Ipomoea batatas avant et après
irradiation à différents temps sous la lampe UV (à
366nm).
Ces spectres montrent que l'exposition de la solution
d'anthocyanes à la lampe UV à différents temps modifie les
spectres des anthocyanes. Ces modifications spectrales indiquent
l'instabilité des anthocyanes vis-à-vis de la lumière en
général et de la lumière UV en particulier.
Il convient d'indiquer que la bande d'émission maximale
de la lumière solaire étant autour de 630 nm (MPIANA et
al, 2010), l'utilisation de la lumière UV (plus
énergétique) permet de provoquer une dégradation
accélérée des anthocyanes afin de simuler une probable
exposition au soleil pendant une durée plus longue.
Il ressort en effet de ces figures que, plus le temps
d'irradiation augmente, plus l'intensité de la bande
caractéristique diminue. Ce qui montre que la lumière induit les
modifications dans la structure des anthocyanes. Ces résultats
confirment ceux de MPIANA et ses collaborateurs sur l'instabilité des
anthocyanes extraits de plusieurs plantes utilisées contre la
drépanocytose en médecine traditionnelle congolaise (MPIANA et
al, 2009).
III.6. Effet de la chaleur sur la stabilité des
extraits d'anthocyanes d'Hypoxis angustifolia et Ipomoea batatas
Les extraits totaux d'anthocyanes d'Hypoxis
angustifolia et d'Ipomoea batatas ont
été mis à l'étuve à différentes
températures pendant des intervalles de temps bien
déterminés afin de voir l'influence de la chaleur sur leur
stabilité.
Les figures III-9 et III-10 ci-dessous donnent les spectres
visibles des extraits totaux d'anthocyanes de ces deux plantes avant et
après une heure de traitement thermique à différentes
températures d'exposition à l'étuve.
Figure III-9 : Spectres visibles des extraits
totaux d'anthocyanes d'Hypoxis Angustifolia
différentes températures d'exposition pour un temps constant
d'une heure
Figure III-10 : Spectres visibles des extraits
totaux d'anthocyanes d'Ipomoea batatas à
différentes température d'exposition pour un temps constant d'une
heure.
Ces figures montrent les modifications spectrales quand on
soumet les solutions d'anthocyanes à un traitement thermique aux
températures de 27°C, 100°C et 120°C pour une
durée d'une heure. En effet, pour une même concentration en
anthocyanes, on remarque une baisse d'absorbance à la longueur d'onde
maximale avec l'augmentation de la température. Pour les anthocyanes
d'Hypoxis angustifolia on observe même un
« red shift » puis finalement une disparition de la bande
caractéristique. Ce qui traduit une forte sensibilité des
anthocyanes vis-à-vis de la température.
Les spectres des figures III-9 et III-10 montrent clairement
une dégradation des anthocyanes à la chaleur. C'est pourquoi il
est nécessaire de conserver la solution d'anthocyanes à de
faibles températures et d'éviter des traitements comme la
décoction ou l'infusion pour les recettes en médecine
traditionnelle. Il convient de noter que ce comportement a déjà
été observé pour les anthocyanes extraits d'autres plantes
(MPIANA et al, 2007a, b, c et d ; MPIANA et al, 2008a,
b, c ; MPIANA et al 2009, MPIANA et al 2010).
Nous avons ensuite effectué une étude
cinétique de la thermodégradation de ces anthocyanes
c'est-à-dire suivre l'évolution de l'absorbance des extraits
totaux d'anthocyanes en fonction du temps à température
constante.
La longueur d'onde a été fixée à
520nm pour les extraits d'anthocyanes d'Hypoxis angustifolia
et à 525nm pour les extraits d'anthocyanes d'Ipomoea
batatas à différentes températures et à
différents temps. Les températures de 100 et 120 °C soit 373
et 393 K ont été retenues pour cette étude
cinétique. Les figures III-11, III-12, III-13 et III-14 donnent les
courbes d'évolution de l'absorbance en fonction du temps pour les deux
extraits anthocyaniques aux deux températures choisies.
Figure III-11 : Evolution de l'absorbance des
extraits anthocyaniques d'Hypoxis angustifolia en fonction du temps de
traitement thermique à 100°C à 520 nm.
Figure III-12 : Evolution de l'absorbance des
extraits anthocyaniques d'Hypoxis angustifolia en fonction du temps de
traitement thermique à 120°C à 520 nm.
Figure III-13 : Evolution de l'absorbance des
extraits anthocyaniques d'Ipomoea batatas en fonction du temps de
traitement thermique à 100°C à 525 nm.
Figure III-14 : Evolution de l'absorbance de la
solution anthocyaniques d'Ipomoea batatas en fonction du
temps de traitement thermique à 120°C à 525 nm.
Les figures III-11, III-12, III-13 et III-14 montrent une
diminution de l'absorbance des extraits d'anthocyanes en fonction du temps de
traitement thermique à 100°C (373 K) et 120°C (393K). La
diminution est rapide au début et va en ralentissant quand le temps
augmente. Cette diminution est plus prononcée à 120°C
qu'à 100°C indiquant que la thermo dégradation est plus
rapide à température élevée.
Ces courbes donnent la cinétique de
thermodégradation pour les extraits d'anthocyanes d'Hypoxis
angustifolia et d'Ipomoea batatas à la
longueur d'onde maximale et aux deux températures fixées. Les
points sur les courbes représentent les points expérimentaux
tandis les lignes représentent les courbes calculées en se basant
sur le modèle théorique pour une cinétique de premier
ordre où le réactif et le produit ont une certaine absorbance
à la longueur d'onde de travail (voir équation
II-17).
En effet, bien que les molécules d'anthocyanes n'ont
pas été isolées afin de connaître leurs masses
moléculaires pouvant nous permettre de calculer leurs
concentrations ; leur cinétique de thermodégradation peut
être obtenu en suivant tout simplement l'évolution de l'absorbance
en fonction du temps. En effet, selon la loi de lambert-Beer, l'absorbance de
ces solutions est directement liée à leur concentrations (MPIANA
et al, 2010 ; MPIANA et al, 2009). Ce qui peut nous
permettre d'évaluer les constantes de vitesse de
thermodégradation de ces anthocyanes. Les valeurs des constantes de
vitesse obtenues sont données dans le tableau suivant:
Tableau III-2 : Valeurs de constantes de vitesse
de thermodégradation
Extrait d'anthocyane
|
Température (K)
|
Constante de vitesse ( s-1)
|
Hypoxis angustifolia
|
373
|
26 10-3
|
393
|
38 10-3
|
Ipomoea batatas
|
373
|
28 10-3
|
393
|
51 10-3
|
Ces valeurs sont de même ordre de grandeur que celles
obtenues pour la cinétique de dégradation des anthocyanes
extraits d'autres plantes médicinales, notamment Justicia
secunda soient 15,7. 10-3 s-1 à 377 K et 16,7.
10-3 s-1 à 401 K (KASONGA, 2011). Mais elles sont
légèrement supérieures à celles de Mpiana et ses
collaborateurs pour les anthocyanes extraits de Ocimum basicum L.
(3,04. 10-4 s-1 à 373 K) et de Annona
senegalensis (8,7. 10-4 s-1 à 353 K et 11,0.
10-3 s-1 à 373 K) (MPIANA et al,
2010 ; MPIANA et al, 2011).
Il convient de noter que la thermodégradation des
anthocyanes extraits des fruits comestibles est par exemple
généralement étudiée pour simuler les conditions de
préparation de différents jus. Selon Cisse et ses collaborateurs,
la constante de thermodégradation des anthocyanes extraits des jus
d'orange est de l'ordre de 1,6 10-4 s-1 et des
anthocyanes des jus de roselle (H.sabdariffa L.) est quant à
elle de l'ordre de 0.7 10-4 s-1. Pour les extraits totaux
d'anthocyanes dont on ne connait pas encore la composition, les
paramètres de l'anthocyane généralement majoritaire, la
malvidine, sont utilisés dans les différents calculs (CISSE et
al, 2009).
|