La responsabilité des organisations internationales pour dommages causés aux populations civiles. Cas de la force intérimaire des Nations Unies au sud Liban( Télécharger le fichier original )par Floyd- Loyf KABUYA KALOMBO Université protestante au Congo - Licence en droit international 2011 |
B. Le fondement juridiquedes OMPComme nous l'avons déjà dit, aucun article de la Charte, ni dans le chapitre VI, ni dans le chapitre VII, ne mentionne la création par l'organisation de force autre que celles prévu à l'article 43. Toutefois, les organes compétant de l'ONU et tout particulièrement le Secrétaire de générale, se sont appliqués, dès la création de la première de la première force d'intervention en 1956, à justifier cette innovation au regard des dispositions de la Charte et à l'enfermer dans des principes directeurs déduit d'un postulat : la nécessité du consentement de l'État hôte. La nécessité juridique, tant il est vrai que « l'évolution juridique étroitement dépendante de la réalité sociale qu'elle tente de décrire ou qu'elle s'efforce de répondre, la réalité nationale, plus que toute autre, commande et même déforme l'ordonnancement juridique, soit qu'elle installe de nouvelles structures en détruisant les anciennes, soit qu'elle installe de nouvelles structure dans les anciennes en les altérant ».13(*) Il nous semble important de rechercher le fondement des OMP dans ses origines. En Effet, la Charte des N.U fait du maintien de la paix et de la sécurité internationales le premier but de l'ONU, c'est ce qui ressort de l'article 1er alinéa 1er. La Charte en confie la responsabilité principale au Conseil de sécurité (article 24). La Charte prévoit égalementen cas d'échec du règlement pacifique des différends (chapitre VI), des actions en cas de menace contre la paix, rupture de la paix et acte d'agression (Chapitre VII) qui constituent un mécanisme de sécurité collective juridique habilité à mener des opérations de coercition. Le Conseil de sécurité peut donc entreprendre une action militaire (article 42). En théorie, le Conseil de sécurité devrait disposer d'une force armée permanente (article 43) pour lui permettre d'agir avec célérité à chaque fois que besoin sera, mais hélas, la guerre froide a paralysé toute tentative de mettre en place un tel système. Dans la situation de conflits ouverts, le système de règlement pacifique des différends prévu par le chapitre VI de la Charte de l'ONU était inadéquat, et l'application du chapitre VII, conçu expressément pour ces situations, était quant à elle bloqué par le jeu de vetos.14(*) En 1956, l'ONU a finalement inventé, à l'occasion de la crise de Suez, les opérations de maintien de la paix, plus connues sous le nom de « casques bleus ». Il s'agit d'une réponse ad hoc à une situation non prévue par la Charte et d'un palliatif à l'usage de la force. L'absence d'assise juridique explicite a conduit à parler d'un mythique « chapitre VI et demi » comme fondement de ces opérations.15(*) Dans un document des N.U, il est cependant affirmé que le Conseil de sécurité n'est pas obligé de se référer à un chapitre précis de la Charte de Nations Unies dans ses relations autorisant le déploiement d'une OMP et ne s'est jamais prévalu du chapitre VI entant que tel. À plusieurs reprises, le C.S a jugé opportun d'invoquer le chapitre VII de la Charte des N.U au moment d'autoriser le déploiement d'OMP dans des situations post-conflit qui semblaient volatiles et où l'État n'était pas en mesure de garantir la sécurité et de maintenir l'ordre public. Au-delà de la nécessité de préciser le bien-fondé juridique de son action, l'invocation du chapitre VII dans ces situations est aussi un moyen pour le C.S de souligné son engagement politique ferme et de rappeler aux parties, ainsi qu'à l'ensemble des États Membres des N.U, la responsabilité qui leur incombe de donner suite à ses décisions.16(*) D'après ce même texte, définir le maintien de la paix des N.U comme une activité relevant exclusivement d'un chapitre ou d'un autre de la Charte peut se relever pour ceux qui sont chargés de la planification opérationnelle, la formation et la mise en oeuvre des mandats. Au moment d'évaluer la nature d'une OMP et le type de capacités qu'il faudra mettre à sa disposition, les contributeurs des troupes et de policiers doivent se focaliser sur les tâches assignées par le mandat du C.S, le concept d'opérations et les règles d'engagement pour la composante militaire ainsi que les directives relatives à l'emploi de la force pour la composante de police.17(*) De ce qui précède, il en sort que le fondement d'une OMP n'est pas à chercher dans une disposition quelconque de Charte mais que c'est une compétence implicite du Conseil de sécurité, étant donné qu'il doit recourir à « tout moyen » qu'il juge nécessaire pour rétablir la paix et la sécurité internationales. Evelyne LAGRANGEpense que « la référence au chapitre VII au moment de la création d'une OMP s'inscrit toujours dans un contexte où font défaut les prérequis d'une telle action, soit qu'il ne reste plus de l'État hôte qu'un territoire et une population (cas de la Somalie), soit qu'un cessez-le-feu n'ait pu être conclu ou respecté avant le déploiement d'une opération décidée par l'organisation et acceptée par les parties (hypothèse la plus fréquente). L'utilisation du chapitre VII aux fins d'imposer les conditions propices au déploiement d'une OMP ou l'opération n'est que l'undesaspects de la « revitalisation » du C.S et de la « redécouverte » de ses virtualités. Elle procède de l'exploration systématique, par le C.S, de son pouvoir de qualification (article 39)qui a d'ores et déjà pour effets un élargissement de la notion de menace contre la paix et l'assouplissement des règles d'imputation ».18(*) Le professeur Yves PETITpense quant à lui, qu'afin de justifier ce nouveau genre d'opérations non prévues par le chapitre VI et VII, le secrétaire général de l'O.N.U de l'époque, DAG HAMMARSKJÖLD, s'est référé à un chapitre VI bis ou « VI et demi ».19(*) Le fondement juridique de cette technique qu'il qualifie de « para-constitutionnelle » se trouve en effet, d'après lui, entre le chapitre VI et VII de la Charte.20(*) En application du premier, les OMP possèdent un caractère non contraignant et sont obligées d'obtenir le consentement des belligérants ; en application du second (chapitre VII), les OMP ont la possibilité d'imposer des mesures coercitives, sans le consentement des parties.21(*) Cette vision peut être corroborée par les opérations des N.U en Somalie qui ont été mise en place alors que la guerre civile y a provoqué un grand risque de famine. Cette opération présente la particularité d'être fondé sur le chapitre VII de la Charte, du fait de l'absence de gouvernement susceptible de donner son consentement. L'ONUSOM I avait cependant une mission classique de surveillance de cessez-le-feu entre les deux factions se disputant le contrôle de Mogadiscio, ainsi que la protection du personnel humanitaire. Cependant, face à la dégradation de la situation humanitaire due à la poursuite des combats entre les nombreuses factions ennemies et au pillage de l'aide alimentaire, le Conseil de sécurité décidera, suivant en cela la recommandant du Secrétaire générale, d'autoriser les États Membresà « employer tous les moyens nécessaires »22(*) pour restaurer la sécurité en Somalie.23(*) Dans la présente étude, nous allons considérer le chapitre VI et VII de la Charte comme possible fondement juridique des OMP, étant donné que l'ancien secrétaire général de l'O.N.U DAG HAMMARSKSÖLD s'en était lui-même référé pour justifier la création de certaines missions de paix de l'O.N.U.24(*) Ceci dit, le présent travail tournera autour des questions ci-après : Ø À quel moment les agissements des forces armées d'un État membre d'une organisation internationale contribuant au maintien de la paix et de la sécurité internationales peuvent-t-elles engager la responsabilité de l'O.I qui les engage? Ø Quels sont les mécanismes nécessaires pour la mise en oeuvre de la responsabilité d'une organisation internationale pour dommage causé à des populations civiles ? Ø Les opérations de maintien de la paix constituent-elles l'unique moyen pour les Nations unies de maintenir la paix et la sécurité internationales après leur rupture ? Telles sont les questions auxquelles nous tenterons de répondre tout au long du présent travail. * 13 BALLALOUD, J., cité par E. LAGRANGE, Op. Cit., p.13 * 14 ANNAN, K.A., Op. Cit., p.103 * 15 Ibidem * 16 ONU, Op. Cit., p.14 * 17 Ibidem * 18 LAGRANGE, E., Op. Cit., p. 35 * 19L'invention du concept d'OMP date de la crise de suez de 1956. Le C.S était paralysé par le double veto de la France et du Royaume Uni, il ne pouvait de ce fait condamner leur intervention en Égypte ; l'affaire fut alors portée devant l'AG grâce au recours à la procédure dite « Acheson » sur cette base, L'Assemblée va d'abord demander un cessez-le-feu, puis adopté une résolution créant la FUNU chargée d'assurer et de surveiller la cessation des hostilités. Y, PETIT, Op.cit. p.39 * 20Ibidem * 21 Ibidem * 22 Cette expression fait généralement allusion au chapitre VII de la Charte * 23 FINCK, F., Op. Cit., p.342 * 24Voir la crise de suez de 1956 |
|