Problématique de la structuration des organisations communautaires: cas de l'Association des Organisations Professionnelles Paysannes ( AOPP )( Télécharger le fichier original )par Mamadou Alpha COULIBALY Université de Bamako ( Mali ) - Maà®trise en sociologie 2003 |
3-3-5. « l'élaboration concertée de la politique Foncière » : Une première relecture des législations foncières en vigueur :En l'état actuel des choses, bien que ces textes ne soient pas toujours appliqués, les organisations paysannes ont effectué une première relecture des textes législatifs traitant de la question foncière : le Code Domanial et Foncier, la Charte Pastorale, ainsi que les textes de la décentralisation. Les cas spécifiques de la zone Office du Niger, des zones septentrionales, des zones transfrontalières et des zones d'exploitation des ressources minières sont également l'objet de propositions. Toutefois, l'intention véritable est d'ouvrir un débat qui devrait aboutir plus largement à la redéfinition concertée de la politique foncière du Mali. 3-3-6. Le Code Domanial et Foncier (CDF) :Au regard des exigences du contexte de décentralisation et des insuffisances constatées dans le CDF, les propositions suivantes ont été formulées : 4(*)0 (i) Le transfert de la gestion du foncier et des ressources naturelles aux collectivités territoriales décentralisées : Le transfert de compétence aux collectivités territoriales est stipulé par les textes de la décentralisation (loi n° 96 050 et ses articles 22 et 23 entre autres). Bien que les communes rurales aient été mises en place depuis 1997, ce transfert n'est pas effectif en 2004. Il s'avère en outre contradictoire avec le CDF qui désigne l'État comme propriétaire de toutes les terres non immatriculées du territoire national. Cette situation conduit au développement de conflits de compétences entre structures de l'État et collectivités territoriales, comme constaté par exemple à Bourem en 2000/2001. Les organisations paysannes soutiennent la décentralisation de la gestion du foncier, qui va dans le sens d'une gestion plus flexible, plus proche du terrain, prenant mieux en compte la diversité des règles locales. Pour les OP, le CDF doit être révisé ou abrogé et les textes de la décentralisation doivent s'appliquer pleinement. 4(*)1 (ii) La protection des terroirs villageois et des exploitations familiales contre la spéculation foncière : Les articles 13 à 25 du CDF précisent les conditions de conversion de droits d'usage provisoires en droits réels de propriété privée, à travers l'obtention d'un titre de concession rurale. La facilité de la procédure d'obtention de ce titre conduit à sa prolifération dans maints terroirs des régions de Koulikoro, Sikasso et Ségou. Ces ponctions, qui rétrécissent les réserves de terres agricoles, n'ont pratiquement pas de retombées économiques : les attributaires ont généralement des visées spéculatives et il est rare qu'ils exploitent leurs concessions. Ces articles du CDF représentent donc une menace sérieuse pour la sécurité foncière des ruraux et pour le développement des zones rurales. Les OP demandent une révision de cette législation afin de protéger les terroirs et les exploitations familiales de la spéculation foncière. Les procédures d'obtention de la concession doivent être revues : il faudrait prendre en compte la détention de droits « coutumiers » et l'accord des ayants droits ; préciser les procédures d'obtention de la terre de la part des détenteurs coutumiers et formaliser ces transactions. Des mesures doivent être prises pour que les concessionnaires déjà installés soient incités à exploiter ou à permettre l'exploitation de leurs terrains. Pour réduire la spéculation, le meilleur moyen est de toute évidence la mise en place d'un impôt foncier local adapté aux différents droits sur la terre (droits d'usage coutumiers, concession...). Plus le droit est sécurisé par l'État, plus la contrepartie, c'est-à-dire l'impôt, est élevée. (iii) L'examen des droits coutumiers au regard de critères d'équité : L'imprécision du Code Domanial et Foncier par rapport aux droits coutumiers prête à confusion. Le CDF stipule dans son article 43 que « Les droits coutumiers exercés collectivement ou individuellement sur les terres non immatriculées sont confirmés ». De quels droits s'agit-il ? Comment interpréter une telle législation dans un contexte dominé par la diversité des droits coutumiers dont certains se caractérisent par leur iniquité manifeste ? Faut-il confirmer des droits de propriété acquis à la suite de spoliations foncières opérées par les colonisateurs d'antan au profit de leurs alliés et au détriment de communautés entières ? Faut-il aussi confirmer des droits de propriétés acquis par suite d'une mauvaise interprétation du statut de gestionnaire traditionnel de terres communautaires dont certains chefs profitent pour brader des portions de terres collectives, louer des plans d'eau à des opérateurs allochtones, etc., au détriment du reste de leur communauté ? Certains droits « dits » coutumiers ont été dévoyés et ne garantissent plus un traitement équitable des membres de la communauté villageoise. 4(*)2 Les droits coutumiers doivent être l'objet d'un examen critique au regard de critères d'équité, à l'issue duquel pourra être décidée leur confirmation ou leur révision. Ceci s'avère d'autant plus urgent dans les régions du Nord (zones de Gao, Tombouctou) où le processus de développement de bien de localités est bloqué à cause d'inextricables problèmes fonciers, rendant impossible l'exploitation de milliers d'hectares ayant bénéficié d'investissements de plusieurs millions de Fcfa, ainsi que l'aménagement de multiples autres zones à fortes potentialités agricoles. L'État doit cesser d'ignorer ces problèmes et agir malgré les susceptibilités locales. * 40 4Proposition paysannes pour la gestion pacifique et durable des ressources foncières au Mali : AOPP * 41 Conflit entre les élus communaux et les responsables administratifs et techniques à propos d'une décision du Maire interdisant la capture des reptiles par des opérateurs privés sur le territoire communal, annulée par le préfet et le chef du service local de la conservation de la nature sous prétexte que la mairie n'était pas compétente en la matière. Grâce à cette confusion, les opérateurs ont ramassé tous les reptiles des communes de Bourem et Téméra et ils évoluaient toujours à l'intérieur du cercle dans les communes de Bamba et de Tarkint au moment du séjour de la mission d'enquête (août 2003). * 42 A titre d'illustration, le Projet d'Aménagement de Petits Périmètres Irrigués Villageois (PAPIV) est pratiquement paralysé à cause de revendications de droits formulées par des chefs de terre locaux après l'aménagement des périmètres ! Les petits exploitants sont très souvent sommés de déguerpir par ces derniers. Sur l'ensemble des PIV aménagés par le Projet (une trentaine environ), deux seulement sont exploités. |
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