3-3-7. La Charte pastorale :
Les OP ont plusieurs propositions à formuler concernant
la Charte pastorale. Leur première demande porte sur la promulgation
rapide de ses décrets d'application, qui sont attendus depuis son
adoption en 2001. Certains articles devraient en outre être
révisés :
(i) La gestion des
bourgoutières : Les articles s'y
référant (art. 33, 38, 39 et 40) prêtent à
confusion car la définition précise des termes
« communautaire et privé » n'est pas donnée.
Pour les bourgoutières privées, s'agit-il de bourgoutières
régénérées faisant l'objet d'un titre formel de
propriété, ou de bourgoutières où les Dioros ont
des droits d'usage quasi exclusifs ?
(ii) L'accès aux espaces pastoraux non
domaniaux : l'art. 42 de la Charte qui ordonne
l'ouverture des champs récoltés au profit des pasteurs n'est pas
réaliste. En effet, dans la pratique, les résidus de
récolte sont la propriété de l'exploitant qui peut en
disposer comme bon lui semble. Il aurait été plus
intéressant que la Charte renforce ici le principe habituel de la
négociation entre usagers (à travers par exemple les
contrats de fumure habituellement négociés entre agriculteurs et
pasteurs) dans le sens des orientations évoquées dans le
plaidoyer.
(iii) La gestion des
conflits : en matière de
prévention et de gestion des conflits, des ambiguïtés
existent entre les art. 71 à 76 de la Charte et les articles 45, 48, 52
et 72 de la loi 95-034 du code des collectivités territoriales. En effet
selon ce code, le maire est officier de police judiciaire (art.52). Ses
attributions sont, entre autres, la publication et l'exécution des lois
et règlements (art.45), la prévention ou la réparation des
dommages en cas de divagation des animaux (art. 48). En outre les conseillers
de village, de fraction et de quartier doivent obligatoirement être
consultés en ce qui concerne les litiges domaniaux et fonciers (art.72).
Au contraire, la Charte dévolue la gestion des conflits aux
« comités de gestion des conflits » que les
collectivités territoriales devront mettre en place. La coexistence de
ces différents niveaux de gestion peut conduire à des conflits de
compétence et aboutir à un imbroglio juridique sans issue.
3-3-8. Le cas spécifique de l'office du
Niger :
Dans l'euphorie de la nouvelle politique continentale du
NEPAD, l'État ouvre de plus en plus le marché foncier aux gros
investisseurs nationaux ou étrangers. La mise de l'Office du Niger dans
le panier du NEPAD, permet désormais à ces opérateurs
d'accéder à des milliers d'hectares sécurisés par
l'État, comme c'est le cas, entre autres, de la COVEC, une compagnie
chinoise qui bénéficie d'un bail emphytéotique sur une
superficie de 1000 ha ! La COVEC a aménagé les terres
pour faire une ferme expérimentale mécanisée avec la
volonté d'aménager plus tard 10 000 Ha. Mais en fait,
elle est incapable de les cultiver et elle sous-loue ses terrains à des
paysans. Non seulement c'est interdit, mais c'est injuste car les paysans
payent plus cher que si l'Office leur louait directement ces terres. L'exemple
est instructif pour l'État quant au modèle d'agriculture
à promouvoir : la mécanisation avec l'agro business n'est pas la
solution !
Pendant ce temps, l'Office ne garantit pas la
sécurité foncière des milliers d'exploitants familiaux qui
exploitent ces terres depuis des décennies. Quelle que soit la
durée d'établissement d'un exploitant sur les terres de l'Office,
il peut en être évincé totalement pour non paiement de la
totalité de la « redevance eau ». La situation de
cette campagne est l'illustration criarde de cette injustice que toutes les
organisations de producteurs dénoncent solidairement avec le SEX.AG.ON.
Cette menace permanente d'éviction, en plus d'être injuste,
représente un facteur de démotivation évidente des
producteurs : elle bloque l'investissement et empêche la modernisation de
l'exploitation familiale.
Cette situation contre productive doit cesser !
L'État doit cesser de soutenir de gros opérateurs privés
qui vont épuiser les ressources sans créer suffisamment de
richesses et d'emplois pour développer le monde rural. L'État
doit investir dans la modernisation de l'exploitation familiale. Pour cela, il
doit immédiatement engager une révision du décret de
gérance des terres. Il doit établir la transparence dans les
attributions de terrains. Pour répondre aux nombreuses demandes
d'attribution, des aménagements complémentaires de terres
irriguées devraient être réalisés à
destination des exploitants familiaux.
|