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Analyse du développement de la zone commerciale de périphérie Avignon nord - étude de la stratégie des acteurs privés et du rôle des pouvoirs publics.

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par Laurent GIRARD
Institut d'urbanisme et d'aménagement régional d'Aix-en-Provence - Master 2 urbanisme et aménagement spécialité projet urbain et action opérationnelle 2011
  

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3.2 Le rôle des acteurs du développement routier et autoroutier

La sous-partie 3.1 nous a montré que la commune bénéficiait d'un développement économique lors de l'arrivée d'activités commerciales sur son territoire. Malgré les problèmes urbains engendrés, elle avait donc un certain intérêt à profiter du potentiel que représentait le commerce de périphérie.

Mais nous avons vu dans la partie 2 que ce potentiel était lié aux infrastructures routières. Il nous faut donc maintenant étudier la stratégie des acteurs publics du développement routier, en France et dans le Vaucluse.

3.2.1 Des théories du Corbusier au maillage routier

La théorie de la séparation des fonctions urbaines apparaît en 1917 avec l'idée de la Cité Industrielle de Tony Garnier. Ce zonage des fonctions nécessite un réseau de transports performant entre les différents secteurs de la ville. Le Corbusier poursuivra le raisonnement de Tony Garnier et publiera la Charte d'Athènes89. Dans cet ouvrage, il indique qu'il faut attribuer des secteurs à chacune des quatre fonctions de la ville : « habiter, travailler, se récréer (dans les heures libres) et circuler ». Les espaces de circulation occupent donc une fonction circulatoire uniquement. Ils ne sont pas considérés comme des lieux d'échanges et de rencontres. Dans les orientations de la Chartes d'Athènes, Le Corbusier estime que chaque quartier d'habitation doit contenir des espaces verts pour les loisirs (article 35) et que les zones industrielles doivent êtres contigües aux routes, canaux et voies ferrées. Entre ces deux zones, les espaces verts sont considérés comme des espaces « tampons ». Ces théories, formulées sur des villes importantes, prônaient une densité relativement importante sur les espaces d'habitation, de l'ordre de 300 habitants à l'hectare.

La séparation des fonctions urbaines a bien été réalisée en France. Mais elle s'est faite dans un contexte de rejet des grands ensembles construits dans les années 1960. Il n'y a donc pas eu de densité et les espaces verts prévus dans les quartiers d'habitation ont été remplacés par les jardins privatifs des lotissements pavillonnaires. Pour relier les secteurs résidentiels et les secteurs d'activités, seul le mode routier a été retenu. Le territoire a été structuré par les autoroutes, voies rapides, rocades et radiales qui ont formé des mailles de plusieurs centaines de mètres de large. Ces mailles se sont substituées au traditionnel îlot de cent mètres de côté90.

89 Les théories de Le CORBUSIER reprises dans MERLIN P. (2007), L'urbanisme.

90MANGIN D. (2005), Pour une ville passante et métisse, compte rendu du séminaire Vies collectives, 10p.

63

Le quadrillage du territoire français par le réseau routier et autoroutier a été très rapide. Le premier grand tronçon autoroutier a relié Paris au Nord de la France dans les années 1960 et aujourd'hui on compte plus de 11 000 kilomètres d'autoroutes91. Il est complété par près de 10 000 kilomètres de routes nationales, 378 000 kilomètres de routes départementales et 642 000 kilomètres de voiries communales.

Conjointement à ce développement autoroutier, le taux de motorisation des ménages augmente rapidement. En effet, la figure 26 nous montre que le nombre de ménages a fortement augmenté durant les années 196092. Il continue de croître plus légèrement depuis les années 1980.

10%

1980

69%

Taux de motorisation des ménages

1953

20%

1960

30%

40%

1964

1967

50%

58,60%

1971

1985

1990

76%

73%

0%

90%

80%

70%

60%

50%

40%

30%

20%

1995

78%

2000

80%

2007

82%

1950 1960 1970 1980 1990 2000 2010

Figure 26 : Des ménages qui s'équipent rapidement en automobile

(Conception Girard, 201.D'après Villeneuve A., 1971 pour les données de 1953 à 1971, INSEE de 1980 à 1990 et SOFRES de 1995 à 2007)

91 Insee, service d'études techniques des routes et autoroutes (SETRA) au 1er janvier 2010.

92 VILLENEUVE A. (1971), L'accoutumance à l'automobile, in Economie et statistique n°23, p.3-20. www.persee.fr

64

Il est difficile de dire si c'est l'importance du réseau routier qui a provoqué l'essor de l'automobile et qui l'a rendue indispensable ou l'inverse. Une chose est sûre, le développement routier s'est fait au détriment des autres modes de transports traditionnels. Les cheminements doux, qui existaient à l'intérieur des villes et des campagnes, ont été fragmentés par ce nouveau maillage à la fonction purement circulatoire. L'usage de la voiture est ainsi devenu de plus en plus indispensable.

L'Etat a longtemps encouragé le développement des infrastructures routières et autoroutières. Les schémas directeurs routiers nationaux étaient chargés de planifier et de hiérarchiser l'ensemble de ces grandes voies de liaison. La loi d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire du 4 février 1995, dite loi Pasqua, imposait même qu'en 2015, tout point du territoire se trouve à moins de 45 minutes en voiture, soit d'une autoroute, soit d'une route express à deux fois deux voies reliée au réseau national, soit d'une gare desservie par le réseau ferroviaire à grande vitesse. L'objectif énoncé était d'assurer une « desserte équilibrée et un désenclavement de l'ensemble du territoire, quels que soient les trafics constatés »93. Même si cette partie de la loi a été abrogée en 1999, elle montre le volontarisme de l'Etat en matière de développement routier.

A une échelle plus locale, les pouvoirs publics ont également investi pour améliorer la fluidité du trafic routier. L'exemple le plus frappant est celui du développement des carrefours giratoires. Le premier giratoire avec priorité aux personnes à l'intérieur de l'anneau est apparu en France en 198494. Ce système, qui permettait d'écouler plus rapidement le trafic qu'un système de feux tricolores, s'est rapidement développé. Le Certu estime qu'en 1984, le nombre de giratoires en France était probablement inférieur à 500. On en dénombrait plus de 12 000 en 1995 et environ 30 000 en 200595.

L'ensemble de ces dispositions pour favoriser le développement routier a eu un impact fort sur l'appareil commercial. Tout d'abord, l'évolution rapide des taux de motorisation a permis de développer un commerce basé sur l'accessibilité automobile. Comme nous l'avons vu, le temps d'accès est primordial dans le calcul de la zone de chalandise de la grande distribution. Les axes routiers associés à des échangeurs performants et à des systèmes de desserte fine, de type giratoires, ont permis de développer des magasins disposant d'une zone de chalandise étendue : les hypermarchés. David Mangin a constaté que le développement des

93www.legifrance.gouv.fr, Loi n°95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire.

94 Le premier giratoire daterait de 1906 avec l'aménagement de la place de l'Etoile à Paris, mais la priorité était donnée aux personnes venant de la droite. www.technicites.fr

95 GUICHET B. (2009), Les accidents dans les carrefours giratoires urbains, étude statistique de 1993 à 2005, Certu, 38p.

hypermarchés est concomitant avec la construction du réseau routier (cf. figure 27)96. Dans ce travail, il ne faut pas comprendre que les clients se rendent à l'hypermarché via l'autoroute, mais qu'il y a une corrélation entre la volonté politique de développer des transports routiers rapides et l'essor de la grande distribution.

Figure 27: Le développement simultané des hypermarchés et des autoroutes (Source : MANGIN D., 2004, La ville franchisée, p.76)

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96 Op. cit., MANGIN D. (2004)

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