§2. Conflit inhérent au principe
Il a été précédemment dit que le
principe de non-ingérence dans les affaires intérieures d'un Etat
constitue la conséquence nécessaire et directe des deux piliers
du droit des relations internationales, le principe de souveraineté et
celui de l'égalité des Etats qui en est l'indissociable
conséquence. Mais, il faudrait aussi avoir à l'esprit que
l'application de ce principe ne doit pas favoriser la violation d'autres
principes, parfois même jugés supérieurs notamment les
principes de la sauvegarde des droits fondamentaux de la personne.
Visant des matières dont la réglementation
dépend exclusivement du droit national de l'Etat en cause, la
règle de non-intervention a perdu aujourd'hui une bonne part de son
intérêt, car il en est peu qui ne soient plus, d'une
manière ou d'une autre, « internationalisées », comme
en témoigne par exemple le formidable développement contemporain
des droits de la personne33.
Cette conception se justifie par le fait que les peuples sont
titulaires originels de la souveraineté, et que de ce fait, il y a lieu
de redéfinir le
31 BOUCHET-SAULNIER Françoise, Op-cit,
p.309
32 SALMON Jean (dir.), Dictionnaire du droit
international public, Bruxelles, Bruylant, 2001, p.579 ; TABRIZI SALAH
Ben, Op-cit, p.32
33 VERHOEVEN Joe, Op-cit, p.145
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concept de souveraineté qui découle de la
théorie selon laquelle l'Etat n'est plus qu'une simple fiction juridique
qui ne peut être réifié, surtout dans un monde où
l'on assiste à la fin de son « tout politique
»34.
Pendant plusieurs années, les Etats et les forces
politiques focalisent leurs discours vers les libertés et sont critiques
à l'égard de la dictature et du totalitarisme35.
Ainsi, le principe de non-ingérence a représenté une sorte
de mur entre les agissements d'un Etat, contraires au respect des droits de
l'Homme, et le droit de regard des autres Etats. Pendant la
décolonisation, la non-ingérence a souvent été
invoquée par les métropoles pour s'opposer à toute
intervention des Nations Unies ou d'un Etat tiers dans les efforts
d'autodétermination de leurs colonies36.
La certitude est que les droits fondamentaux de la personne
méritent qu'on les fasse respecter, dans son propre Etat et même
dans un autre. C'est ainsi que pour trouver une issue à ce conflit,
certains doctrinaires tels que Mario BETTATI ou Bernard KOUCHNER ont
pensé à atténuer le principe de non-ingérence en y
opposant des exceptions.
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