c- Les défaillances du plan « Villes sans
bidonvilles » :
Cinq ans après son lancement officiel, le programme
« Villes sans bidonvilles » piétine toujours dans les grands
centres urbains du Maroc. A la pénurie du foncier, s'ajoutent les
problèmes de gouvernance, la question du financement, et un
accompagnement social insuffisant.
Le bilan arrêté en novembre 2009, par le
Ministère de l'habitat, de l'urbanisme et de l'aménagement de
l'espace, n'est guère encourageant ; 37 villes sur 83,
déclarées officiellement « Villes sans bidonvilles
».
Si les opérations menées ont permis le
relogement de plusieurs milliers de ménages, les communes
concernées, sauf Agadir sont toutes de petites ou moyennes tailles.
Dans les grands centres urbains ou il y a la majeure partie
des bidonvilles, les retards s'accumulent.
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http://www.vsb.gov.ma/fr/
Siham BENSAID Les politiques urbaines d'intégration
sociale par le logement au Maroc
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L'échéance du programme a déjà
été reportée à 2012, mais pendant ce temps le
chômage et l'exode rural continuent de remplir les bidonvilles
existants.133
L'accès au programme VSB, est un réel
problème pour les ménages sans ressources ou à très
faible revenus. En moyenne selon les différentes études
réalisés sur le sujet, notamment celle de la banque mondiale,
seuls les 2/3 des bidonvillois peuvent se permettre l'achat d'un appartement ou
d'un lot.
Or le financement du programme s'articule autour de la
participation directe des ménages, auxquels l'Etat accorde une
subvention de 10 milliards de dirhams alors que le coût total du
programme est estimé à 25 milliards de dirhams.
Donc c'est pourquoi le fonds de garantie des prêts au
logement (FOGARIM) a été spécialement créé
afin que les banques aident les ménages non solvables.
«En matière d'accompagnement social, notre action
reste défaillante». 134
Tels ont été les propos du ministre
chargé de l'habitat et de l'urbanisme Ahmed Taoufiq Hejira.
Malgré les efforts fournis par les pouvoirs publics en matière de
politique de recasement, des dysfonctionnements ou des défaillances ont
vu le jour à cause des différents blocages qui touchent de
nombreux projets de réhabilitation urbaine aux quatre coins du Maroc.
On note dans de nombreux cas de figure, que malgré la
politique urbaine d'intégration sociale par le logement que le
gouvernement tente de mettre en place à travers le programme VSB, dans
bon nombre de villes telles que Fès et Mohammedia, les
bénéficiaires de programmes de relogement refusent de quitter
leurs bidonvilles, tout simplement parce que l'accompagnement social et la
communication a été défaillante, en général
ils ne sont pas bien préparés à ce changement radical de
logement. C'est en grande partie, la défaillance d'accompagnement social
des bidonvillois lors des transferts de propriété qui freine la
bonne conduite du programme VSB ; La Banque Mondiale, a fait ce constat
à l'occasion d'un rapport d'analyse de l'impact social et sur la
pauvreté du programme VSB, rapport rendu public en janvier
2007.135 L'urgence de l'achèvement du programme VSB semble
exacerber le niveau insuffisant de coordination institutionnelle ainsi que
l'attention des acteurs, qui est axée sur les aspects techniques
plutôt que sur l'accompagnement social et la participation, dont le
besoin se fait tellement ressentir.
133 Le Journal Hebdomadaire, « Villes sans bidonvilles,
les promesses non tenues », n°417 du 14 au 20 novembre 2009, par
C.GUGUEN, p 28-30
134 La Vie Economique, Article « Les défaillances du
plan VSB », Mai 2007
135 Banque mondiale, Programme « Villes sans bidonvilles
» du Maroc - Rapport de l'analyse d'impact social et sur la
pauvreté, Juin 2006
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sociale par le logement au Maroc
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Et de mettre en exergue l'insuffisance des incitations
actuellement en place pour déclencher la participation active des
habitants des bidonvilles, l'intervention des banques et des institutions de
micro finance pour fournir le crédit et la motivation des promoteurs
à s'engager dans la construction de logements.
L'absence d'accompagnement social des populations tout au long
du projet, pendant la mise en oeuvre des chantiers, le déplacement vers
les nouveaux sites de relogement, ou lorsque sont établis des programmes
de recouvrement financier, sont autant de facteurs qui freinent
considérablement les opérations.
C'est pourquoi, un accompagnement social mené
dès le début aurait justement été d'une grande aide
à ce niveau en préparant les populations et en répondant
à leurs préoccupations.136
La difficulté réside dans le fait qu'il s'agit
d'un traitement au cas par cas. Difficile de mettre en place un programme
d'action global et général et de le mettre en pratique sur
différents sites.
Il s'agit vraiment de suivi très personnalisé.
En définitive, l'accompagnement social que certains considèrent
comme secondaire peut, quand il existe, contribuer véritablement
à la réussite d'une opération. Et pour remédier
à ces défaillances, qu'il faut également et
parallèlement axer le travail sur la formation d'accompagnateurs sociaux
des bidonvillois.
Mais le succès du Programme VSB ne peut être
durable que si les marchés immobiliers locaux offrent des alternatives
aux ménages « cibles » de l'habitat insalubre, en
général, et des bidonvilles, en particulier.
Le Gouvernement, conscient de cette importante question de
prévention, a mis en place des programmes complémentaires dont
celui des 100.000 logements sociaux à réaliser annuellement,
appuyé par celui de l'aménagement foncier public; de même
qu'il a pris des mesures conséquentes dont celle liée à la
répression des abus en matière d'habitat et d'urbanisme (projet
de loi n° 04-04 portant modification en matière d'urbanisme et
d'habitat)137.
136 La Vie Economique, Article « Les défaillances du
plan VSB », Mai 2007
« [...] A Mohammedia, préfecture qui demeure
très touchée par les bidonvilles (plus de 24% de sa population
totale habite des baraques), les autorités ont mis en place, à
titre expérimental, un centre de qualification sociale
dédié à l'accompagnement des populations
vulnérables, confié à un réseau d'associations
locales. Mais ce n'est qu'après l'échec de plusieurs projets
auparavant que ce centre a été créé. »
137 Préparé dans l'urgence à la suite du
séisme qui a secoué la ville d'Al Hoceima en février 2004,
fortement contesté par les parlementaires qui y voyaient un
empiètement des gouverneurs et agences urbaines sur les
prérogatives des élus locaux, le projet de loi 04/04 portant
modification en matière d'urbanisme et d'habitat, est abandonné
après trois années tumultueuses mais la réforme fera quand
même son chemin. En effet, le ministère de l'habitat a
décidé d'intégrer les dispositions de ce texte de loi dans
le projet de code de l'urbanisme.
Siham BENSAID Les politiques urbaines d'intégration
sociale par le logement au Maroc
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Plusieurs projets d'aménagement et de construction
seront engagés par les opérateurs publics avec une part
importante de la consistance devra être des prix accessibles aux
ménages cibles ; lesquels produits sont appuyés par des
subventions directes (FSH, notamment), par les produits de la
péréquation et/ou par les fonds de garantie hypothécaire
mis en place.
A noter également que la participation du FSH dans le
préfinancement des infrastructures hors-site et principaux in-site des
grandes opérations prévues dans le cadre du programme
d'aménagement du foncier public.
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