Etude comparee des droits humains et des libertes publiques dans la constitution( Télécharger le fichier original )par Nancy SHABANI AZIZA Université de Kinshasa - Licence en Droit (Bac+5) 2009 |
II. Les droits économiques, sociaux et culturelsLes droits économiques, sociaux et culturels ont acquis dans le monde actuel une place de choix. Ce positionnement tient essentiellement du fait que l'homme n'est vraiment libre que s'il se trouve dans des conditions matérielles satisfaisantes. Notons que l'exercice de ces droits suppose que l'Etat puisse honorer son obligation de pourvoir ». On en distingue deux sortes, d'après J-J- ISRAEL56(*), à savoir :
Parmi ces droits, on peut évoquer : · le droit à la propriété (art. 34) ; · le droit au travail (art. 36) ; · la liberté d'association (art. 37) ; · la liberté syndicale (art. 38) ; · le droit au mariage avec la personne de son choix (art. 40) ; · le droit à la protection de la famille (art. 40) ; · le droit à l'éducation (art. 43).
Tels sont les droits économiques, sociaux et culturels, abordons à présent les droits collectifs. III. Les droits collectifs (droits de solidarité ou communautaires)Quant aux droits que couvrent les droits appelés aussi « droits de solidarité »57(*) ou « droits communautaires »58(*), l'on peu notamment citer : · le droit à la paix et à la sécurité (art. 52); · le droit à un environnement sain (art. 53); · le droit au développement (art. 58); · le droit au patrimoine commun de l'humanité (art. 59)59(*).
Après avoir inventorié les différentes libertés publiques proclamées par la Constitution du 18 février 2006, il convient d'en détermine le régime juridique. §2. Analyse du régime juridique proprement dit Les libertés publiques sont proclamées et garanties par la Constitution du 18 février 2006. Toutefois, cette proclamation, à elle seule, ne peut suffire à assurer un exercice efficace des dites libertés. Ainsi, elles doivent être aménagées. En RDC, « l'aménagement des libertés fondamentales dans la Constitution fait ressortir les quatre régimes juridiques ci - après »60(*) :
I. Le régime d'intangibilité Certaines libertés apparaissent comme étant intouchables, même en période de crise. Ce caractère est soit posé d'une façon de principe, soit à travers les régimes d'organisation - ou de restriction - des droits et libertés pour ces périodes de troubles61(*). C'est ainsi que, malgré qu'il soit reconnu au Président de la République la faculté de restreindre, par la proclamation de l'état d'urgence ou de siège ou par la déclaration de guerre (articles 85 et 86 de la Constitution), l'exercice des libertés publiques, il ne sait en être tel pour toutes les libertés. Ce régime est affirmé par l'article 61 de la Constitution aux termes duquel, Il ne peut être dérogé aux droits et principes fondamentaux ci - après :
Il en est de même de l'interdiction du recours à la force, puisque toute tentative de renversement du régime constitutionnel constitue une infraction imprescriptible contre la nation et l'Etat. II. Le régime répressif Le régime répressif est plus libéral, car il autorise les individus à exercer leurs activités sans qu'aucun contrôle préalable ne soit requis. L'Etat n'intervenant que lorsque des violations auront été constatées. III. La déclaration préalable Elle consiste dans l'obligation faite aux personnes désireuses d'exercer certaines activités d'en informer au préalable la puissance publique grâce à une déclaration précisant l'objet et les modalités de l'activité envisagée en dehors de manifestation pacifique. Il en est ainsi, par exemple, de la liberté de manifestation. En effet, la Constitution stipule en son article 26 que « toute manifestation sur les voies publiques ou en plein air, impose aux organisateurs d'informer par écrit l'autorité administrative compétente ». Précisons qu'il s'agit d'informer l'autorité, et non pas de demander une autorisation. IV. Le principe d'une réglementation libérale La liberté est le principe, la réglementation l'exception. Il est pourvu un contrôle juridictionnel pour toutes les mesures administratives des libertés. Ainsi, par exemple, toutes les mesures d'urgence prises pendant l'état d'urgence ou de siège doivent être soumises au contrôle de la Cour constitutionnelle, toutes affaires cessantes, qui déclare si elles dérogent ou non à la Constitution. Tels sont les différents régimes juridiques des libertés publiques prévus par la Constitution du 18 février 2006. Rappelons que dans cette première partie, nous avons essayé d'analyser les notions de droits de l'humains et de libertés publiques, et d'en dégager les rapports, afin de nous permettre de saisir la valeur de la vie humaine qui justifie, en ces temps, la reconnaissance d'un certain nombre de prérogatives tant au niveau national qu'au niveau international. Ceci étant, nous pouvons à présent aborder la deuxième partie de notre étude portant sur le contentieux des droits humains et des libertés publiques. Seconde Partie : CONTENTIEUX DES DROITS HUMAINS ET DES LIBERTES PUBLIQUES La protection des droits droits humains et des libertés publiques, à la suite d'une procédure contentieuse, ne peut être effective et efficace que grâce à l'intervention du « juge ». C'est l'objet de cette deuxième partie de notre travail. Ainsi, aborderons-nous la problématique de leur protection en cas de contentieux tant sur le plan international que national. Nous analyserons, dans cette partie, tour à tour, le contentieux des droits humains (chapitre 1) et celui de libertés publiques (chapitre 2). Premier Chapitre LE CONTENTIEUX DES DROITS HUMAINS Les droits humains sont susceptibles d'être violés tant par les individus que par les Etats. Si sur le plan national il existe des mécanismes mis en place par les Etats pour régler le contentieux né de la violation des droits, il en est de même sur le plan international, quoi qu'avec certaines spécificités, tel que nous allons le relever ci-dessous.
En effet, la protection de la personne humaine va au-delà des limites territoriales, étant donné que la victime d'une violation peut avoir des difficultés à obtenir une réparation sur le plan interne notamment si les lois internes sont lacunaires ou virtuels, si le droit invoqué n'est pas reconnu sur le plan interne mais par des textes internationaux, si la violation est commise par l'Etat, d'une part ; et si la violation aurait été commise par un Etat tiers, d'autre part. Un tel contentieux doit être porté devant des structures internationales. Celles-ci sont organisées tant dans un cadre général tel les Nations Unies (Section I), que dans le cadre continental tel l'union africaine (Section II). Section I. Contentieux des droits humains dans le cadre des Nations Unies : cas du Comité des droits de l'homme Dans le cadre des Nations Unies, la prise de conscience, de la situation et de l'avenir de l'homme a fait qu'il soit adopté le 10 décembre 1948 de la Déclaration Universelle des droits de l'homme (DUDH). Certes elle n'a aucune force juridique contraignante vis-à-vis des membres. Cependant, « on peut (...) dire que la Déclaration constitue aujourd'hui la conscience de l'humanité, représentant effectivement, selon une de ses dispositions, la plus haute aspiration de l'homme et que c'est de son idéal contraignant, et non de sa valeur juridique formelle, qu'elle tire son autorité »62(*). En sus de la DUDH, il a été adopté d'autres textes généraux de base comme les Pactes internationaux relatifs aux droits de l'homme. Ces différents instruments ont institué des mécanismes de protection des droits de l'homme dont le Comité des droits de l'homme. En effet, ce Comité, mis en place en 1977, par l'article 38 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, est l'un des six organes créés en vertu d'instruments internationaux des Nations unies relatifs aux droits de l'homme. Il est composé de dix-huit membres ressortissants des Etats-parties qui doivent être des personnes de haute moralité, possédant une expérience reconnue dans le domaine des droits de l'homme et pour certains membres une expérience juridique, lesquels sont chargés de surveiller la mise en oeuvre des dispositions du Pacte international relatif aux droits civils et politiques de 1966 et des deux protocoles facultatifs qui s'y rapportent. Le Comité tient normalement trois sessions par an, deux à Genève et une à New York. Les trois fonctions du Comité sont : l'examen des rapports et des situations des Etats membres au regard des droits civils et politiques garantis par le Pacte, l'élaboration d'observations générales qui fixent la position du Comité sur l'application voire l'interprétation des dispositions conventionnelles et enfin l'examen des recours (communications) des particuliers63(*). Si nous exceptons le mécanisme des rapports des Etats parties, nous situant devant une situation contentieuse, il nous restera à examiner les mécanismes de communications (plaintes) interétatiques (§1) et les mécanismes de communications (plaintes) individuelles (§2). §1. Procédure d'examen des communications ou plaintes interétatiques Lorsqu'un Etat partie au Pacte relatif aux droits civils et politiques estime qu'un autre Etat partie viole une ou plusieurs dispositions conventionnelles se rapportant aux droits de l'homme, il lui est loisible de transmettre une plainte (communication) au Comité des droits de l'homme. L'examen des plaintes interétatiques est organisé en deux étapes : l'examen de leur recevabilité, d'une part, et l'examen de leur fondement, d'autre part. I. L'examen de la recevabilité des plaintes interétatiques Il existe de conditions de recevabilité, à savoir :
II. L'examen de fond des plaintes interétatiques Quant au fond, l'examen des plaintes interétatiques comprend aussi deux phases, à savoir : la phase de négociations bilatérales et celle de conciliation. 1. La phase de négociations bilatérales Lorsqu'un Etat estime qu'un autre n'applique pas les dispositions, il peut appeler l'attention de l'Etat en question en lui adressant une communication. L'Etat qui reçoit la communication doit répondre à son auteur dans un délai de trois mois en donnant des explications ou toutes les autres déclarations élucidant la question. Il fournira, dans la mesure du possible, des indications sur ses règles de procédure et sur les moyens de recours, soit déjà utilisés, soit en instance, soit encore ouverts. Si dans les six mois à compter de la date de réception de la communication originaire par l'Etat destinataire, la question n'est pas réglée à la satisfaction de deux Etats intéressés, n'importe lequel d'entre eux peut s'en référer au comité. La communication adressée au Comité sera aussi notifiée à l'autre Etat intéressé. Ainsi s'achève la phase de négociations et commence la phase de conciliation65(*) 2. La phase de conciliation Une fois saisi, le Comité des droits de l'homme met ses bons offices à la disposition des Etats parties intéressés afin de parvenir à une solution amiable. Il échet aussi de noter que « les séances du Comité au cours desquelles la communication est examinée se tiennent à huit clos. Les Etats peuvent s'y faire représenter et présenter des observations orales ou par écrit. Le comité a douze mois pour présenter son rapport qui doit contenir un bref exposé des faits et de la solution intervenue, si une solution est trouvée ; dans le cas contraire, il présente uniquement les faits avec les observations émises par les Etats intéressés. Le rapport est ensuite communiqué, par l'intermédiaire du Secrétaire général de l'ONU, aux parties intéressées »66(*). Outre cette procédure d'examen des communications interétatiques, les particuliers peuvent aussi saisir le comité à la condition qu'il y ait une violation des droits prévus par le pacte. §2. Procédure d'examen des communications plaintes individuelles Tout individu, victime d'un acte de violation des droits lui reconnus par le Pacte, de la part d'un Etat partie au Pacte relatif aux droits civils et politiques et qui relève de sa juridiction peut saisir le Comité des droits de l'homme par une plainte (communication). L'examen des plaintes individuelles est aussi organisé en deux étapes : l'examen de leur recevabilité, d'une part, et l'examen de leur fondement, d'autre part. I. L'examen de la recevabilité des plaintes individuelles Les conditions de recevabilité des plaintes individuelles par le Comité des droits de l'homme sont fixées par le Pacte ainsi que par le règlement intérieur du comité. En résumé, pour qu'une plainte individuelle soit recevable, « il faut :
Il sied de relever que durant cette étape, le Comité des droits de l'homme peut demander soit à l'auteur de la plainte, soit à l'Etat mis en cause des renseignements supplémentaires. Si après examen, il déclare la plainte recevable, il en informe les intéressés et traite la question de fond. II. L'examen de fond des plaintes individuelles Quant au fond, dans un délai de six mois (article 4.2 du Pacte), l'Etat accusé doit transmettre au Comité des droits de l'homme des explications et éclaircissements sur la question. En outre, il devra indiquer les mesures éventuelles prises pour remédier à la situation. Les explications de l'Etat sont communiquées à l'auteur de la communication qui peut y répondre en présentant des observations. Il peut aussi donner des nouveaux renseignements au Comité. Les séances au cours desquelles les communications individuelles sont examinées se tiennent à huis clos68(*). Après toutes ses échanges, une fois le comité éclairé, il formule ses constations (décisions). Christine CHANET relève que les décisions et
constatations du comité « sont construites sous forme
juridictionnelle et comportent, bien évidemment, des motifs et des
dispositifs. Rien ne distingue, du point de vue formel, les constatations des
décisions juridictionnelles. Après le visa ayant trait à
l'institution du Comité, à la date de sa réunion, à
la fin de l'examen de la communication, aux informations communiquées
par l'auteur, son conseil et l'Etat-partie, interviennent successivement le
rappel des faits présentés par l'auteur, la teneur de la plainte,
les observations de l'Etat-partie et le commentaire de l'auteur ou de son
Conseil. (...) les décisions ou les constatations (...) se terminent,
lorsqu'il y a violation de l'une des dispositions du Pacte,
généralement par ce qui suit : "Aux termes de l'article
2 du Pacte, l'Etat-partie s'est engagé à garantir à tous
les individus se trouvant sur son territoire et relevant de sa juridiction les
droits reconnus dans le Pacte et à assurer un recours utile et
exécutoire lorsqu'une violation a été établie. Le
Comité souhaite recevoir de l'Etat partie, dans un délai de 90
jours des renseignements sur les mesures prises pour donner effet ses
constatations"69(*). - Affaire Ortega (n° 481/1991), à la suite de constatations du Comité, le gouvernement de l'Equateur a conclu un accord avec le représentant de l'auteur dans lequel il reconnaissait sa responsabilité internationale pour la violation des articles 7 et 10 paragraphe 1. Il acceptait, en conséquence, de verser à la victime, dans un délai de 90 jours, 25 000 dollars américains de dommages-intérêts. L'Etat-partie a accepté, en outre, "d'engager des poursuites civiles et pénales et une procédure administrative à l'encontre des personnes qui avaient commis les violations et de prendre les dispositions nécessaires pour les déférer en justice, en se réservant le droit de leur réclamer le remboursement du montant versé à titre de dommages-intérêts.
Signalons, s'agissant de l'autorité attachée aux constatations, qu' « il ne s'agit pas, bien évidemment, de "l'autorité de la chose jugée" au sens classique du terme. Mais il reste indéniable, malgré cela, que le Comité participe à l'exercice d'une fonction juridictionnelle en tranchant des contestations sur la base du droit et c'est là l'essentiel de ce qui constitue l'acte juridictionnel. (...)Ainsi les décisions du Comité se sont, au fils du temps, imposées comme source de droit, aujourd'hui dans tous les continents et auprès des juridictions internationales»71(*). A l'instar des mécanismes mis en place par les Nations Unies, il existe aussi des mécanismes régionaux de protection des droits humains. Il en est ainsi des mécanismes mis en place par l'union Africaine. Section II. Contentieux des droits humains dans le cadre l'Union Africaine : cas de la Commission africaine des droits de l'homme et des peuples Dans le cadre de l'Union Africaine, des avancées significatives seront constatées, par rapport à la Déclaration Universelle des droits de l'homme et par rapport à la protection desdits droits par les instruments nationaux (Constitutions, etc.), avec l'adoption de la Charte Africaine des droits de l'homme et des peuples du 27 juin 1981 dont l'affirmation des droits des peuples et des devoirs de l'individu envers la famille et la communauté comme un tout en constitue une particularité. Celle-ci a une nature contraignante. Elle institue la Commission africaine des droits de l'homme et des peuples. La Commission a reçu pour mandat la promotion et la protection des droits garantis par la Charte. Elle « se compose de 11 membres élus par la Conférence des chefs d'État et de gouvernement de l'Union africaine (UA). À leur élection, les membres servent à titre individuel. L'article 36 de la Charte dit que les membres de la Commission sont élus pour six ans et peuvent être réélus. La Commission est assistée dans ses fonctions par un Secrétaire et un personnel nommés par le secrétaire général de l'UA. Le Secrétariat de la Commission est situé à Banjul, en Gambie; si la promotion est sa fonction principale, la protection est véritablement son « talon d'Achille »72(*). Celle-ci est consacrée par les articles 30 à 46 de la Charte. Dans sa mission de protection des droits de l'homme et des peuples, nous situant devant une situation contentieuse, la Commission est saisie par voie de communication, celle-ci pouvant émaner des Etats parties (§1) ou des individus et/ou d'autres organisations (§2). §1. Procédure d'examen des communications ou plaintes étatiques Lorsqu'un Etat partie à la Charte estime qu'un autre Etat partie viole une ou plusieurs dispositions de la Charte se rapportant aux droits de l'homme, il lui est loisible de transmettre une plainte (communication) à la Commission des droits de l'homme et des peuples. L'examen des plaintes étatiques par la Commission est organisé en deux étapes : l'examen de leur recevabilité, d'une part, et l'examen de leur fondement, d'autre part. I. L'examen de la recevabilité des plaintes étatiques Il existe de conditions de recevabilité, à savoir :
II. L'examen de fond des plaintes étatiques par la Commission (articles 47 à 54 de la Charte) Quant au fond, l'examen des plaintes étatiques comprend aussi deux phases, à savoir : la phase de négociation (communication-négociation) et celle de plainte (communication-plainte). 1. La communication - négociation Selon les dispositions de l'article 47 de la Charte, lorsqu'un Etat estime qu'un autre Etat partie à la Charte a violé les dispositions de celle-ci, il peut appeler l'attention de l'Etat en question en lui adressant une communication, en réservant copie au Secrétaire général de l'Union Africaine et au Président de la Commission. Précisons que cette procédure est facultative, car l'Etat «victime » peut directement saisir la Commission par une plainte. L'Etat qui reçoit la communication doit répondre à son auteur dans un délai de trois mois en donnant des explications ou toutes les autres déclarations élucidant la question. Il fournira, en sus, dans la mesure du possible, « des indications et mesures éventuelles prises pour mettre fin à la situation dénoncée ; des indications sur les lois et règlements de procédure applicables ou appliquées, ainsi que sur les voies de recours internes déjà épuisées, en instance, ou encore ouvertes »74(*). Si dans les trois mois à compter de la date de réception de la communication originaire par l'Etat destinataire, la question n'est pas réglée à la satisfaction de deux Etats intéressés, n'importe lequel d'entre eux peut s'en référer à la Commission. La communication adressée au Président la Commission sera aussi notifiée à l'autre Etat intéressé et au président de l'Union Africaine. Ainsi s'achève la phase de négociations et commence la phase de la communication - plainte. 2. La communication - plainte L'Etat qui estime qu'un autre Etat partie à la Charte a violé les dispositions de celle-ci, peut « saisir directement la Commission par une communication adressée à son Président, au Secrétaire général de l'Union Africaine et à l'Etat intéressé. On est alors en présence de ce que le règlement intérieur qualifie de « communication-plainte ». Alors que la « communication - négociation » suppose un dialogue entre l'Etat dénonciateur et l'Etat présumé violateur, la « communication-plainte » survient en cas d'échec de la négociation (art.48 de la Charte) ou en cas de saisine directe de la Commission par l'Etat dénonciateur (art.49 de la Charte)»75(*). Une fois saisi d'une plainte, la Commission des droits de l'homme et des peuples, l'examine quant au fond. Elle ne rendra, dans un délai raisonnable, son rapport qu' « après avoir obtenu toutes les informations estimées nécessaires et après avoir tenté de par tous les moyens appropriés d'aboutir à un règlement amiable fondé sur le respect des droits de l'homme et des peuples »76(*). Dans son rapport, la Commission reprend les faits de la cause ainsi que ses conclusions. Puis, le transmet aux Etats intéressés ainsi qu'à la conférence des Chefs d'Etat et de gouvernement. Outre cette procédure d'examen des communications étatiques, les particuliers ainsi que les organisations non gouvernementales peuvent aussi saisir la Commission à la condition qu'il y ait une violation des droits prévus par la Charte. §2. Procédure d'examen des communications ou plaintes individuelles et de celles émanant des ONG Tout individu, victime d'un acte de violation des droits lui reconnus par la Charte, de la part d'un Etat partie à cette dernière, ou toute organisation non gouvernementale (ONG) qui estime qu'un Etat partie à la Charte a violé les dispositions de celle-ci, peut saisir la Commission des droits de l'homme et des peuples par une plainte (communication). L'examen des plaintes émanant des individus et des organisations non gouvernementales est aussi organisé en deux étapes : l'examen de leur recevabilité, d'une part, et l'examen de leur fondement, d'autre part. I. L'examen de la recevabilité des plaintes individuelles et de celles émanant des ONG Les conditions de recevabilité des plaintes individuelles et des ONG par la Commission des droits de l'homme et des peuples sont fixées à l'article 56 de la Charte, comme suit :
Ces conditions restrictives visent à écarter les communications fantaisistes, manifestement abusives, futiles ou mal fondées. En tout état de cause, elles constituent un système de filtrage, à travers lequel nombreuses autres communications sont écartées77(*). Celles qui sont reçues sont examinées quant au fond, mais avant, le président de la Commission prend le soin de porter la communication à la connaissance de l'Etat intéressé. II. L'examen de fond des plaintes individuelles et des ONG Quant au fond, l'examen de la communication se déroule selon une procédure confidentielle (article 59 de la Charte), analyse les allégations du plaignant et la réponse de l'Etat mis en cause, en tenant dûment compte des dispositions de la Charte et des autres règles internationales des droits de l'homme. Au cours de la session, les parties sont libres de faire des présentations par écrit ou orales devant la Commission. Celle-ci peut, sur base de l'article 46 de la Charte, recourir à toute méthode d'investigation qu'elle juge appropriée Lorsqu'à la suite d'une délibération sur une communication donnée, la Commission constate des violations graves ou massives des droits garantis par la Charte, elle fait des recommandations à l'Etat Partie mis en cause. Les parties sont notifiées par le Secrétariat de la décision finale prise par la Commission. Toutefois, ces recommandations sont consignées dans les Rapports annuels d'activités de la Commission qui sont présentés à la Conférence des Chefs d'Etat et de Gouvernement de l'Union Africaine conformément à l'article 54 de la Charte. Ce n'est que lorsqu'elles sont adoptées, qu'elles deviennent des décisions obligatoires pour les Etats Parties et qu'elles peuvent ainsi être publiées. Il importe de relever qu'un des mérites de la procédure devant la Commission est l'admission de plaintes en provenance d'acteurs non étatique. En effet, celle-ci « a permis à la Commission de développer une solide étude de cas qui démontre le caractère extrêmement innovateur de son approche face à la Charte africaine au fil du temps. Cette approche a permis de mettre l'accent, en ce qui a trait aux plaintes soumises à la Commission, non plus sur des préoccupations relativement insignifiantes touchant l'admissibilité des plaintes, mais plutôt sur des préoccupations liées aux obligations des États envers les individus et les groupes »78(*). A titre d'illustration, la Commission africaine des droits de l'homme et des peuples a eu à dresser un rapport dans l'affaire suivante : « Communication 275/2003 - Article 19/Etat d'Erythrée » Résumé des faits: Observations du plaignant : Le 14 avril 2003, le Secrétariat de la Commission africaine a reçu une communication introduite par Article 19 à l'encontre de l'Etat d'Erythrée, Etat partie à la Charte africaine. Celui - ci allègue notamment :
* 56 ISRAEL (J.J), op. cit., p. 22. * 57ISRAEL (J-J), op. cit., p. 22. * 58 MAMPUYA KANUNK'a-TSHIABO, op. cit., p. 33. * 59 RIVERO (J.), cité in tunisieinfo, accessible sur : http : //www.tunisieinfo.com/documents/environnement/introduction.html ; et aussi ISRAEL (J-J), op. cit., p. 23. * 60 MPONGO BOKAKO (E.), art. cit, p.32 * 61 BREILLAT, op.cit, p.49 * 62 MAMPUYA KANUNK'a-TTSHIABO, « Le système onusien de protection des droits de l'homme : introduction générale », in séminaire cinquantenaire de la D.U.D.H., art. cit., p. 37. * 63 CHANET (C.), Comité des droits de l'homme des Nations Unies, in Bulletin d'information de la Cour de cassation, n° 619, 15 mai 2005, accessible sur : « http://www.droits-fondamentaux.prd.fr/codes/modules/articles/article.php?idElem=429496744 » * 64 MAZYAMBO MAKENGO, « Le système onusien de protection des droits de l'homme : les mécanismes conventionnelles », in séminaire cinquantenaire de la D.U.D.H., 18 Nov. 10 Déc. 1998, P.U.K., Kinshasa, 1999. p. 57 * 65 MAZYAMBO MAKENGO, art. cit., p. 57-58 * 66 Idem * 67 La jurisprudence du Comité des droits de l'homme des Nations unies (novembre 1991 - juillet 1993), in Annuaire français de droit international public, 1993, pp. 657-683, citée par MAZYAMBO MAKENGO, art.cit., pp. 60-61 * 68 Idem * 69 CHANET (C.), art. cit., accessible sur : « http://www.droits-fondamentaux.prd.fr/codes/modules/articles/article.php?idElem=429496744 » * 70 Idem * 71 CHANET (C.), art. cit., accessible sur : « http://www.droits-fondamentaux.prd.fr/codes/modules/articles/article.php?idElem=429496744 » * 72 SAKLE THOMPSON (S.), « Le système africain des droits humains : comparaisons, contexte et possibilités de croissance future », in Défendre les droits humains en Afrique. Points de vue sur la Commission africaine des droits de l'homme et des peuples, 2008, accessible sur : http://www.ichrdd.ca/site/publications/index.php?id=2862&lang=fr&page=5&subsection=catalogue * 73 MAZYAMBO MAKENGO, « Le système onusien de protection des droits de l'homme : les mécanismes conventionnelles », in séminaire cinquantenaire de la D.U.D.H., 18 Nov.- 10 Déc. 1998, P.U.K., Kinshasa, 1999. p. 57 * 74 NTUMBA LUABA, « Le système africain de promotion et de protection des droits de l'homme et des peuples », in séminaire cinquantenaire de la D.U.D.H., 18 Nov. - 10 Déc. 1998, P.U.K., Kinshasa, 1999. p. 122 * 75 Idem, p.123 * 76 NTUMBA LUABA, « Le système africain de promotion et de protection des droits de l'homme et des peuples », in séminaire cinquantenaire de la D.U.D.H., 18 Nov. - 10 Déc. 1998, P.U.K., Kinshasa, 1999. p. 123 * 77 NTUMBA LUABA, « Le système africain de promotion et de protection des droits de l'homme et des peuples », art cit, p. 123-124 * 78 NDIAGA LOUM, « Le système africain des droits humains : les mécanismes institutionnels et leurs interrelations », in Défendre les droits humains en Afrique. Points de vue sur la Commission africaine des droits de l'homme et des peuples,2008,accessiblesur : http://www.ichrdd.ca/site/publications/index.php?id=2862&lang=fr&page=5&subsection=catalogue.
|
|