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Asile et réfugiés en droit international

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par Cherif Ly DIA
Université Gaston Berger de Saint-Louis, Sénégal - Mémoire de maitrise en droit public 2012
  

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Section 2 - L'importance de la recherche de solutions durables pour les réfugiés

Même si le statut de réfugié octroie énormément d'avantages et qu'à la différence de l'asile, il est strictement règlementé et il n'en reste pas moins qu'il souffre d'énormes insuffisances de la part des Etats notamment qui n'appliquent pas toujours ce statut dans toute sa teneur relativement aux attributs dont devraient bénéficier les réfugiés. Parfois, des irrégularités sont notées autant dans la procédure de détermination du statut que dans la protection et l'assistance auxquelles ce statut renvoie. C'est ainsi qu'il peut être perfectionné.

Par ailleurs, aujourd'hui, l'image du réfugié est souvent associée aux migrants clandestins, et fait l'objet de la même suspicion et souvent du même traitement défavorable que ceux-ci. C'est pourquoi son image doit être réhabilitée.

Ainsi verrons-nous d'abord le possible perfectionnement du statut de réfugié (paragraphe premier) et ensuite la réhabilitation de l'image écorchée du réfugié (paragraphe second).

Paragraphe 1 - Le possible perfectionnement du statut de réfugié

Le statut de réfugié, consacré notamment par la définition internationale que la Convention de Genève a apportée du réfugié, constitue aujourd'hui la plus importance base juridique sur laquelle peut compter le réfugié. Toutefois, un élément important à améliorer constitue sans doute la catégorie des demandeurs d'asile.

En effet, les demandeurs d'asile constituent les individus qui arrivent aux frontières d'un pays d'accueil dont ils demandent l'asile c'est-à-dire un refuge et une protection, et dont leur demande n'a pas encore été définitivement traitée. Il apparait donc que de tels individus se trouvent dans une situation sensible et particulièrement précaire, et doivent bénéficier d'une certaine protection, même s'ils n'ont pas encore acquis le statut de réfugié, et peuvent naturellement être déboutés de leur demande. Toutefois, cette catégorie n'est pas autant réglementé que le réfugié.

C'est ainsi qu'on note aujourd'hui que les demandeurs d'asile sont particulièrement persécutés aux frontières. L'illustration la plus simple sera sans doute la notion de « faux demandeurs d'asile » souvent invoquée notamment dans les pays européens. Ainsi, certains requérants sont accusés d'être de faux demandeurs d'asile alors qu'il n'existe aucun critère objectif sur lequel les Etats se basent. Par ailleurs, ils ne sont souvent pas du tout distingués des autres catégories de migrants (migrants économiques).

L'Australie constitue sans doute l'exemple par excellence du pays où les droits élémentaires des demandeurs d'asile sont bafoués. En effet, « la société australienne, bâtie sur l'immigration, est aujourd'hui l'un des symboles des dérives en matière de gestion des demandeurs d'asile, concrétisées par leur enfermement hors du territoire national. »88(*) Depuis 1994, les demandeurs d'asile arrivant en Australie seront accueillis dans des « Immigration Reception and processing center » pour une durée illimitée jusqu'au traitement de leur demande de visa ; et depuis 1997, ces centres sont gérés par une compagnie de services pénitentiaires privée. Le système australien sera complété par le « Pacific Solution » (solution du Pacifique) qui fut une politique d'immigration australienne ayant existé entre 2001 et 2007 et qui consistait à reléguer en dehors du territoire australien des demandeurs d'asile arrivant par voie maritime et cherchant à immigrer en Australie. Cette politique fut provoquée par l' « Affaire Tampa » (le 26 aout 2001, au large de l'Océan indien, le navire MV Tampa porte secours à un bateau de pêche indonésien en détresse transportant 433 migrants afghans et irakiens en route pour l'Australie qui refusa de les recevoir et les envoya a Nauru). Ces demandeurs d'asile étaient donc détenus dans des centres de transit sur l'île de Nauru et dans une base navale en Papouasie-Nouvelle-Guinée dans l'attente du traitement de leur demande.

Même si cette politique prendra fin en 2007, il n'en reste pas moins que de telles dérives à l'encontre des demandeurs d'asile sont inacceptables, et appellent une plus grande réglementation en ce qui concerne les demandeurs d'asile qui font souvent l'objet d'abus. En effet, un texte d'une envergure telle que la Convention de Genève de 1951 ne règlemente nullement les demandeurs d'asile, car elle est centrée sur la question des réfugiés.

Par ailleurs, nous avons vu qu'en Europe, les diverses directives et autres qui étaient appliquées en matière d'asile, si elles se référaient souvent à la notion de demandeurs d'asile, le faisaient surtout dans le cadre des politiques restrictives de contrôle des flux migratoires. En effet, les demandeurs d'asile, en plus de faire face au net recul dans les chiffres en Europe concernant les reconnaissances officielles de réfugiés, étaient parfois traités de « faux demandeurs d'asile », pouvaient être retenus dans des centres de rétention administrative, ou même pis, pouvaient se voir ramener dans leurs pays ou dans des pays tiers au pays d'accueil, notamment par des charters ou dans le cadre d'accords de réadmission.

Tous ces facteurs font que la catégorie des demandeurs d'asile doit être réétudiée, et pourquoi ne pas tenter d'établir un statut ou un ensemble de règles juridiques claires et précises devant entourer la procédure de traitement de leurs demandes aux frontières. Il ne faut pas oublier que le statut de réfugié n'est que déclaratoire, il ne fonde pas le caractère de réfugié de manière intrinsèque, il ne fait que constater et reconnaitre qu'un tel individu est réfugié à partir d'un certain nombre de critères qui ont été dégagés auparavant. Parmi ces règles, notons que la proposition d'une distinction entre les demandeurs d'asile et les autres immigrants devrait occuper une place de choix. C'est d'ailleurs le sens du principe de non-refoulement, même si les conditions pratiques d'une telle distinction devront être mûrement et soigneusement définies.

Toutefois, il n y a pas que la question des demandeurs d'asile qui mérite réflexion dans le cadre d'un perfectionnement du statut de réfugié. En effet, depuis quelques années, on assiste à une problématique relative à l'admission de catégories spéciales de réfugiés. Il s'agit principalement des réfugiés climatiques ou écologiques (on parle même d' « éco réfugiés ») qui sont une catégorie de réfugiés environnementaux.

Il faut commencer par dire que du fait de l'absence de textes qui prévoient expressément au jour d'aujourd'hui une telle catégorie de réfugiés, apporter une définition satisfaisante ne sera pas chose aisée. Toutefois, il faut dire que l'intérêt naissant et grandissant relatif aux « réfugiés climatiques » a sans doute été précipité par les besoins urgents de protection de la nature, et notamment le vif débat autour du réchauffement climatique. Pour cela, les ONG ont joué un rôle primordial. C'est ainsi que depuis quelques années, le terme « réfugiés climatiques » apparait de façon récurrente.

Il faut dire que la dégradation progressive de notre environnement, qui a pendant ces dernières années atteint le paroxysme de la contestation et de la dénonciation, entraîne de graves conséquences qui ne sont pas uniquement à chercher directement sur l'environnement. En effet, un exemple pertinent constitue sans doute la fonte des glaces qui a entraîné la disparition d'îles, et qui aujourd'hui menace sérieusement l'île de Tuvalu. Cela entraine alors des migrations forcées, et sur ces migrations que porte aujourd'hui le débat autour des « réfugiés climatiques ». Mais il faut rappeler que les « réfugiés climatiques » n'ont pas encore été définis officiellement, et ne disposent pas non plus de statut. Pourtant, une brève analyse sur cette catégorie de migrant peut nous montrer toute l'urgence qui la caractérise.

En l'absence de définition textuelle, l'Organisation Internationale des Migrations (OIM) retient la définition suivante des réfugiés environnementaux définis comme : « les personnes ou groupes de personnes qui, essentiellement pour des raisons liées à un changement environnemental soudain ou progressif influant négativement sur leur vie ou leurs conditions de vie, sont contraintes de quitter leur foyer ou le quittent de leur propre initiative, temporairement ou définitivement, et qui, de ce fait, se déplacent à l'intérieur de leur pays ou en sortent.89(*) ». Alors que les Nations Unies les définit comme « ceux qui sont forcés de quitter leur lieu de vie temporairement ou de façon permanente à cause d'une rupture environnementale (d'origine naturelle ou humaine) qui a mis en péril leur existence ou sérieusement affecté leurs conditions de vie ».

Les changements climatiques touchent en effet beaucoup de vies. Et si ces catastrophes naturelles ne sont pas analogues à la notion de « persécution » qui caractérise et fonde le statut de réfugié de la Convention de Genève de 1951, on peut se poser la question de savoir s'il n'est pas venu le moment pour le Droit de s'intéresser à ces individus qui ne peuvent plus vivre dans leur habitat traditionnel du fait de catastrophes naturelles ou simplement de la cause de l'Homme qui n'a de cesse de détruire son environnement, jour après jour.

Selon un rapport de « Prospective » produit par l'Organisation humanitaire britannique Christian Aid, de 2000 à 2050, ce sont au moins un milliard de personnes qui devraient migrer de par le monde, dont plus de la moitié pour s'adapter au réchauffement climatique ou en fuir certaines conséquences90(*).

Les Nations Unies (ONU) évaluent à 50 millions le nombre d'habitants qui pourraient être contraints de quitter leur lieu de vie en raison des conséquences du changement climatique91(*) (avancée du désert de Gobi n Chine, qui s'agrandit de 10.OOO Km² par an / inondations au Bangladesh et dans le delta du Nil / submersions d'archipels comme les îles Tuvalu où 11.600 personnes sont menacées par l'élévation du niveau de la mer / ou encore des populations amérindiennes d'Alaska avec 213 communautés menacées par le recul des glaces et par le recul du trait de côte induit par la fonte du pergélisol et par la montée chaque année croissante du plus haut niveau des marées / l'érosion ou la désertification des sols menace les marges de l'Europe, dont la Turquie concernée par 160.000 Km² de sols cultivables dégradés par l'érosion et le manque d'eau / en Egypte 50 % des terres arables sont déjà touchées par la salinisation.92(*)

Un coup d'oeil à ces chiffres montre donc toute l'urgence à réfléchir sur un statut juridique et partant de là une protection adéquate, car on se rend compte que de jour en jour, la situation ne fait qu'empirer. Surtout si l'on sait que les politiques et accords permettant de réduire la pollution atmosphérique ne sont presque jamais signés et appliqués dans leur intégralité par les plus grands pollueurs de la planète tels les Etats-Unis et la Chine.

Toutefois, dans l'optique de l'adoption d'un statut sur les réfugiés climatiques, il faut néanmoins noter que ces causes de migrations pour des raisons climatiques ou environnementales sont diverses et variées, et peuvent se multiplier indéfiniment. C'est pourquoi il est important dans un premier temps que nos instances dirigeantes reconnaissent d'abord officiellement le problème avant de se consacrer aux considérations juridiques.

D'ailleurs, concernant la prise en compte de ce phénomène, les appels ne manquent pas, appels pouvant se traduire en conférences internationales, colloques, ou même jusqu'à des propositions concrètes d'exemple de texte portant statut pour les réfugiés climatiques.

Ainsi, un appel de Limoges sur les réfugiés climatiques du 23 juin 2005 stipulait : « considérant que la situation de l'environnement mondial est alarmante et qu'elle continue à se dégrader à un rythme croissant [...], les participants appellent les Etats, les organisations internationales et régionales, les organisations non-gouvernementales et les autres secteurs qui le voudraient (collectivités locales, entreprises, citoyens) à réfléchir aux propositions et les invitent à : la reconnaissance, l'élaboration et la proclamation d'un statut international des réfugiés écologiques permettant d'assurer la protection de cette catégorie à part entière de réfugiés (...) et à élaborer des politiques à long terme favorisant la protection des réfugiés écologiques par l'étude de l'élaboration d'un accord international spécifique relatif au statut protecteur des réfugiés écologiques. »

Cet exemple illustre tant bien que mal tout l'engouement autour des réfugiés écologiques.

En définitive, on peut dire que la réflexion relative à cette nouvelle ne ferait qu'enrichir le statut des réfugiés qui, par ailleurs, se heurte aujourd'hui à des difficultés que nous avons déjà analysées. Toutefois, cela a entrainé une détérioration progressive de l'image du réfugié. C'est ainsi que pour lutter pour la pérennité de la protection et de l'assistance pour les réfugiés, il convient sans doute de tenter de réhabiliter au plus vite l'image des réfugiés.

* 88 Quelle définition pour l'externalisation de l'asile au niveau de l'Union Européenne ? Le prisme des relations

entre associations et institutions en France, Mémoire de recherche présenté par Mlle Soline Aubé, IEP de

Toulouse, 2010, page 1

* 89 Aide-mémoire de l'OIM - Migrations, changements climatiques et environnement, 2009

* 90 Rapport de Christian Aid, intitulé Marée humaine : la véritable crise migratoire, relayé par des communiqués de l'Agence Reuters et un article du Nouvel Observateur

* 91 Rapport de l'Institut pour la sécurité environnementale et humaine (ISEH, Université des Nations Unies, Bonn), 11 Octobre 2005

* 92 Ibid.

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"Les esprits médiocres condamnent d'ordinaire tout ce qui passe leur portée"   François de la Rochefoucauld