SECTION II. CONSTITUTION DU 18 FEVRIER 2006 A L'EPREUVE
DE LA LOI
CONSTITUTIONNELLE n°11/002 DU 20 JANVIER
2011231
Après plus de quatre décennies de dictature, une
nouvelle constitution voulue démocratique et censée mettre en
place un nouvel ordre politique au Congo fut promulguée le I8
février 2006 . Pendant la transition, la question de
légitimité des institutions et de leurs animateurs devint
centrale, donnant lieu à un processus irréversible. Le consensus
issu du Dialogue Inter Congolais générateur de l'Accord Global et
Inclusif fait constitutionnel fait que ce document obtint un nombre maximal de
supports au sein de la population congolaise lors du référendum
organisé à cet effet. D'aucun succombent, aujourd'hui, au vertige
du mouvement révisionniste alors que
229 Extrait de l'exposé des motifs de la Constitution du
I8 février 2006, Op. cit. p . 8 .
230 HABERLE, P ., Op. cit, p . I2I .
231 Loi-constitutionnelle n° II/002 du 20 janvier 20II
portant révision de certains articles. ...Op. cit.
" Révisions constitutionnelles et leur
impact sur la promotion du constitutionnalisme et de la démocratie en
Afrique ~ Cas de la République démocratique du
Congo"
celui-ci contribue à faire installer l'idée que
la norme constitutionnelle serait devenue ineffective ou inefficace.
En réalité, la soumission du
révisionnisme aux contingences politiques et électorales fait
apparaitre sur le fond toute la difficulté d'un enracinement de
l'exercice démocratique et équilibré du pouvoir et
accentue le soupçon de fraude ou d'instrumentalisation de la
constitution.
Les amendements constitutionnels qui ont eu lieu n'avaient pas
tous recueilli l'assentiment d'un bon nombre de citoyens, du moins, les motifs
officiellement avancés. La plus controversée de ces
réformes étant, sans doute, celle relative au mode de scrutin
présidentiel. Pour beaucoup, du fait que cet amendement met en
évidence un personnage précis, le Président de la
République, il ne s'agit ni plus ni moins que d'une manipulation
constitutionnelle dont le but est d'assurer la conservation du pouvoir par
Monsieur KABILA .232 Ceci confirme également notre
hypothèse selon laquelle cette pratique est devenue un souffle de vie
pour les dirigeants politiques africains. Ce mécanisme constitutionnel
serait pour la plupart des Etats africains un moyen pour la conservation
éternelle du pouvoir.
Cet instrument juridique par le biais son pouvoir constituant
qui a tenté de mettre en place un mécanisme très
spécial en vue de contrer toute tendance révisionniste de la
constitution par le pouvoir qui autrefois, a amené le pays dans des
régimes autoritaires et a finalement cédé à des
crises généralisées dont les séquelles demeurent
jusqu'à ce jour. Fort malheureusement cette leçon historique n'a
rien intéressé le régime actuel. Ce dernier a jugé
selon lui l'opportunité de réviser certaines dispositions de la
loi fondamentale. Malgré la pertinence de cette réforme,
certaines matières intangibles y sont touchées d'une
manière indirecte voire astucieuse.
Grande fut la déception de nombre d'observateurs
lorsque dès 2007, cette constitution devait subir le premier choc du
mouvement révisionniste avec la tentative avortée, avant que la
majorité au pouvoir ne franchisse le Rubicon en janvier 20II et ce, de
la manière la plus cavalière qui soit.
En effet, jusqu'en 20I0, avant le retour au pays de l'opposant
historique Etienne Tshisekedi, on parlait allègrement de la victoire au
premier tour de Joseph Kabila. L'engouement et la liesse suscités par le
retour de ce leader qui venait ainsi brouiller les calculs de la
majorité ont déterminé les éminences grises
à réfléchir
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232 DIKEBELAYI, J .M ., Op. cit,
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" Révisions constitutionnelles et leur
impact sur la promotion du constitutionnalisme et de la démocratie en
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Congo"
autrement, notamment à entreprendre les tractations visant
à modifier la constitution. Mais courir leur forfaiture, il eut fallu
réviser plusieurs dispositions outre celle relative au mode de scrutin
qu'ils tenaient mordicus à changer.
Pour apprécier objectivement l'oeuvre révisionniste
ainsi accomplie, il convient de passe en revue les enjeux de cette
réforme (§I), ensuite les implications y afférentes seront
effleurées (§2) .
§1 . ENJEUX DE LA DERNIERE REVISION
CONSTITUTIONNELLE
Les enjeux de la récente réforme constitutionnelle
qu'a eu lieu en République Démocratique du Congo s'analysent de
deux en volets, d'une part les mobiles de cette révision et d'autre part
les matières faisant l'objet de la révision.
1*1* MOBILES DE CETTE REVISION
L'analyse se penche sur les mobiles qui ont poussé
à ce que certaines dispositions de la constitution du I8 février
2006 soient révisées. Ces mobiles sont de deux ordres, à
savoir le mobile technique et le mobile politique ou électoraliste.
1*1*1* Mobile technique
Celui-ci est envisagé lorsque certaines dispositions de
la constitution sont en contradiction avec les institutions ou avec la
prévision constitutionnelle, et par conséquent, elles demeurent
de manière inconstitutionnelle au sein même de la constitution au
cas où sa modification n'intervient pas au moment opportun.
C'est ainsi que le besoin technique s'est fait sentir que
l'article 226 de la constitution était pleinement entré dans
l'inconstitutionnalité s'est vu réviser en vue de sa
réadaptation au niveau des institutions de l'Etat congolais.
1*1*2* Mobile politique ou
électoraliste
Si le mobile technique facilite la réadaptation de
certains articles au sein de la constitution, il n'en est pas le cas pour le
mobile politique ou électoraliste. Ceci se montre à travers la
révision du 20 janvier 20II, qui autour cette réforme
constitutionnelle a caché sa vraie raison. Mais nous estimons que
c'était l'ambition politique ou électoraliste qui a poussé
la majorité présidentielle à revoir la constitution afin
que leur autorité morale ait la chance de briguer le second mandat.
Certes, l'enjeu électoral a réellement provoqué ladite
révision.
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impact sur la promotion du constitutionnalisme et de la démocratie en
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