DEUXIEME PARTIE
REVISIONS CONSTITUTIONNELLES ET CONSTITUTIONNALISME
DANS L'HISTOIRE CONSTITUTIONNELLE ET POLITIQUE DE LA RDC
Cette partie essentielement pratique,
casuistique et contextualisée à la RDC. Ele
passe en revue l'histoire tant constitutionnele que politique
de la République Démocratique du Congo, laquele
histoire est émailée de nombreuses
réformes des textes fondamentaux qu'a connu le pays. Ces réformes
ont certes eu un impact soit positif soit négatif sur le
constitutionnalisme et de la démocratie. Peut-être la RDC, comme
un des pays africains pourrait faire exception.
C'est pourquoi cette partie aborde successivement les
différentes révisions constitutionnelles intervenues pendant la
première et la deuxième République (Chap. I), avant de
s'atteler sur la récente révision de la constitution dite de
troisième République (Chap. II).
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" Révisions constitutionnelles et leur
impact sur la promotion du constitutionnalisme et de la démocratie en
Afrique ~ Cas de la République démocratique du
Congo"
CHAPITRE PREMIER
REVISIONS CONSTITUTIONNELLES SOUS LA PREMIERE ET
DEUXIEME
REPUBLIQUE
Pour arriver à comprendre l'impact réel des
révisions constitutionnelles sur le constitutionnalisme et la
démocratie en RDC, il va falloir analyser les révisions qui ont
intervenues sous la Première République (Sect. I), ainsi que
celles qui ont accompagnés la Deuxième République,
période caractérisée par l'instabilité
constitutionnelle (Sect. II).
SECTION I : REVISIONS CONSTITUTIONNELLES SOUS LA
PREMIERE REPUBLIQUE
Cette première République qui commence au
lendemain de l'accession à la souveraineté nationale et
internationale par la RDC, était d'abord régie par la Loi
Fondamentale du I9 mai I960, ensuite par la constitution du Ier
Août I964 dite de « Luluabourg » .
Pour confirmer également l'hypothèse selon
laquelle la révision constitutionnelle est liée à
l'histoire de la République Démocratique du Congo, il suffit de
constater avec nous qu'à trois mois d'existence de l'Etat congolais,
intervenait la toute première révision, qui consacrait en fait
l'anéantissement de la Loi Fondamentale du I9 mai I960 .
En effet, les modifications subséquentes du texte
originel de la loi fondamentale sont matière à réflexion.
D'abord, il sied de noter que le texte de la loi fondamentale du I9 mai I960 ne
mentionne aucun titre relatif à la révision constitutionnelle.
Cependant, il y a lieu de dissiper cette lacune par un raisonnement par
analogie. Cas de l'article 4 dispose que le chef de l'Etat et les deux chambres
composent le pouvoir constituant. Ils sont les organes habilités
à élaborer la constitution. S'ils sont habilités à
élaborer la constitution, ils ne peuvent qu'être compétents
à modifier aussi le texte par eux élaboré et ce, en vertu
du principe de parallélisme de forme et de compétence et de la
théorie de l'acte contraire. De ce point de vue, la loi fondamentale
devait être modifiée par ces autorités agissant en concours
.I75
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I75 PUNGA KUMAKINGA, P ., Op.cit, pp . I06-I07
" Révisions constitutionnelles et leur
impact sur la promotion du constitutionnalisme et de la démocratie en
Afrique ~ Cas de la République démocratique du
Congo"
En clair, la loi fondamentale n'avait jamais été
révisée, mais elle n'a été que victime de
regrettables violations ou anéantissements, voire suspension, pendant
toute son existence. Il y a eu deux décret-loi constitutionnels qui ont
été pris dans des circonstances exceptionnelles, mais
curieusement, ces textes n'avaient pas pris le soin de suspendre la loi
fondamentale, ils ont tout simplement guidé une période où
au même moment la loi fondamentale était toujours en vigueur.
Alors cette pratique d'après nous était considérée
comme une forme de révision de la loi fondamentale.
§1 . SOUS LE REGIME DES COMMISSAIRES GENERAUX
Il convient de rappeler que dès l'indépendance
la RDC était régie par la Loi fondamentale du I9 mai I960
relative aux structures du Congo. NKULU KILOMBO signale que cette loi est issue
des Résolutions de la Table Ronde de Bruxelles à laquelle avait
participé les représentants du peuple congolais. Aussi, cette loi
demeurait techniquement un Acte du législateur belge appelé
à donner une base juridique aux structures politiques du Congo en
attendant que celui-ci élabore sa propre constitution .I76 D'où,
son caractère purement provisoire.
1*1* Contexte politique et changement
constitutionnel
Pour mémoire, après les sécessions du
Katanga (II juillet I960) et du Sud-Kasaï (Août I960) puis la
révocation du Premier Ministre Lumumba (05 septembre I960), l'atteinte
est portée à l'encontre de la loi fondamentale par la
création du Collège des Commissaires Généraux. Bien
que la révocation du Premier Ministre soit sujette à plusieurs
contestations sérieuses au regard des traditions propres au
régime parlementaire, aucun élément objectif n'a pu
justifier la création du collège des Commissaires
Généraux pratiquement une semaine après la
démission forcée du Gouvernement Lumumba. Le chef de l'Etat ayant
désigné Monsieur ILEO comme formateur, celui-ci,
conformément aux usages, allait procéder aux consultations des
principaux groupes et personnalités politiques en vue de réunir
une équipe ministérielle apte à obtenir la confiance du
Parlement. Mais comme la majorité parlementaire était favorable
à Lumumba, Monsieur ILEO allait au devant d'un échec certain. Le
défaut d'investiture parlementaire aurait contraint le chef de l'Etat
à la négociation avec les forces politiques qui soutenaient
Lumumba, puisqu'à deux reprises au cours d'une semaine, le Parlement
avait renouvelé sa confiance à Lumumba .I77
I76NKULU KILOMBO, Congo-Zaïre de la charte
coloniale à la constitution de la troisième
République, éd . SECCO, Kinshasa, I99I, p . 46 .
I77 ibid., p . 74 .
" Révisions constitutionnelles et leur
impact sur la promotion du constitutionnalisme et de la démocratie en
Afrique ~ Cas de la République démocratique du
Congo"
Dès lors, on constate que cette révision
entreprise par le chef de l'Etat Joseph KASA VUBU mettait déjà en
mal d'une part le principe de la séparation des pouvoirs et la classe
politique congolaise d'autre part. Partant de celle-ci, tous les pouvoirs
étaient concentrés entre la main d'un seul organe qui est le
Conseil des Commissaires Généraux, celui-ci conduisait la
politique générale de la nation. Tous les trois pouvoirs
classiques étaient unifiés ou exercés par ce dernier.
Cela est même l'esprit de ce décret qui disposait
que jusqu'à l'accomplissement de la mission du Conseil des Commissaires
Généraux, les chambres législatives étaient
ajournées, que le pouvoir législatif dévolu aux chambres
par la loi fondamentale était désormais exercé par le
conseil des commissaires généraux sous forme de décret-loi
contresigné par le Président du conseil et le commissaire
général intéressé et que le pouvoir exécutif
dévolu au Premier Ministre et aux ministres était exercé
respectivement par le Président du Collège et par les
commissaires généraux .I78
Nous disons qu'il y a eu dans ce régime, une confusion
des pouvoirs suite à l'existence du décret-loi constitutionnel du
29 septembre I960 qui consacrait de manière officielle la confusion des
pouvoirs au profit d'une institution. Car, désormais, les pouvoirs
législatif, et exécutif étaient confondus dans le chef de
la même institution, à l'occurrence le collège des
commissaires généraux, organe à la fois exécutif et
législatif.
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