2- Le circuit libanais.
La commercialisation du riz semblait ne plus être
l'affaire de la Soderiz, car elle ne détenait plus le monopole de la
production du riz. Le secteur rizicole était intégré et
dominé par des groupes privés parmi lesquels les libanais. A
partir de 1975, plusieurs rizeries privées essaimèrent à
travers le pays notamment à N'Douci, à Bongouanou, à Touba
etc.... 210. Ces rizeries à la différence du circuit officiel
avaient un grand marché de consommation, composé
particulièrement de citadin.
Outre le contrôle du marché de consommation, le
circuit libanais possédait des rizeries privées modernes servant
à décortiquer, avec des capacités de production comparable
à celle de la Soderiz. Ces machines étaient de marque chinoise et
dans la moindre mesure japonaise. Leurs capacités variaient dans
210 On retrouvait des rizeries privés à Man,
Tiassalé, Daloa, Dimbokro et Korhogo
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une large fourchette entre 2 et 15 tonnes de paddy
décortiqué par jours211. Ce circuit, pour la collecte
disposait souvent «des pisteurs« qui détournaient le paddy
destiné à la Soderiz au profit des micro-rizeries privées.
Les pisteurs sont des hommes chargés d'effectuer la collecte pour le
compte du commerçant libanais. Ce dernier se déplace avec sa
balance pour procéder à la pesée. Coulibaly Tiorna
riziculteur a Korhogo soutient que : « on était obligé
de vendre notre riz au jeunes qui achetaient pour le compte des libanais
»212. Pour la production du riz le circuit libanais tenait
compte des normes de qualité, tout comme le faisait par le passé
la Soderiz. Parfois les pisteurs faisaient des prix spéciaux pour le
paddy de qualité. Ces normes imposées leur permettaient non
seulement d'obtenir un rendement en riz blanc de meilleure qualité, mais
elles leur permettaient aussi de concurrencer le riz blanchi que la Soderiz
mettait sur le marché de consommation. Ainsi, les prix de ce riz
étaient abordables et accessibles à tous.
En 1976, plus de 500 000 tonnes de riz sorti du circuit
libanais ont été écoulées sur le marché,
rendant davantage très difficile l'évacuation du stock de riz de
la société rizicole213. Les prix du riz à la
consommation restèrent sensiblement voisins. La lutte pour le
contrôle de la commercialisation du riz était engagée.
Selon Jean pierre Dozon, à prix égal le réseau d'achat mis
au point par les marchands libanais est infiniment plus efficace que celui de
la Soderiz.214 Le circuit libanais était organisé de
sorte à réduire les actions de la Soderiz.
L'existence des circuits parallèles ont fortement
discrédité et perturbé le système de
commercialisation de la Soderiz. Cette perturbation a eu un impact sur le
réseau de distribution de la société en 1977.
211 A, MEUNIER, op. Cit p 68
212 Coulibaly Tiorna, riziculteur, entretien
réalisé le 23 novembre 2011 à Korhogo
213 L, BECKER, Y, N'GUESSAN, op.cit, p143
214 J, P, DOZON, Op.cit p63
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