III- RAISON DE LA CREATION DE LA SODERIZ
L'idée de créer une société pour
le développement de la riziculture est la conséquence de
plusieurs faits. En effet, la production du riz ne suffisait plus. L'Etat, dans
le souci d'atteindre l'autosuffisance en riz et endiguer les importations, y
compris l'exploitation rationnelle des potentialités rizicoles,
crée la Soderiz.
1- Atteindre l'autosuffisance alimentaire
Pendant la colonisation, l'objectif de l'autosuffisance
n'avait pas été atteint, car l'administration coloniale comblait
le besoin en riz de la colonie avec le riz importé d'Indochine.
L'autosuffisance fut donc l'une des principaux buts poursuivis par l'Etat car
il apparait primordial pour le développement du pays.
42
La réalisation de l'autosuffisance permettrait à
la Côte d'Ivoire d'investir les énormes devises utilisées
dans le cadre des importations de riz. Pour le président Félix
Houphouët Boigny, « il faut que le pays soit nourri au maximum
par nous même, les denrées nécessaires au marché
national, car notre but doit être de produire sur place tout ce qui est
nécessaire à notre consommation afin de réserver la plus
grande part de nos disponibilités financières à
l'acquisition de bien d'équipement »60. Bien plus,
cela devait passer par la mise en place d'une structure capable d'atteindre ces
objectifs. Le développement de la culture du riz devait aussi dans un
premier temps satisfaire les besoins intérieurs dans la limite des
débouchés existants.
En 1965, à cause de l'évolution
démographique, la Satmaci n'a pas pu couvrir les besoins de consommation
de la population en riz61. Pour les autorités, avec la
Soderiz, la perspective semble être prometteuse. En quelques
années, le pays devait pouvoir accéder à l'autonomie en
riz et pourrait même exporter son surplus de riz vers les autres pays de
la sous région. Ainsi la volonté du gouvernement était de
procéder à la mise sur pied d'une structure performante capable
de relever le défi de la production rizicole.
Tous ces objectifs ne pourraient être atteints sans une
politique gouvernementale efficace. C'est pourquoi, la Soderiz devait
être un organisme de production du riz bénéficiant de
l'appui permanent de l'Etat. Ainsi, la quête de l'autosuffisance allait
freiner les importations massives de riz.
2- Réduire les importations massives du riz
Malgré les nombreuses actions de production de riz,
lancées depuis la colonisation, la production locale n'a pas pu suivre
l'évolution de la consommation. Cela a entrainé un déficit
en riz et un développement considérable des importations de riz,
qui sont passées de 1900 tonnes en 1950 à
60 F, H, BOIGNY, op.cit, p 708
61 ADS : rapport annuel 1972, p 56
43
42 000 tonnes en 1960 et à 60 000 tonnes en
196562. Il ressort de ces données que l'accroissement de la
demande ivoirienne d'importation de riz suit un rythme qui correspond au
doublement soit 6% par an et qu'elle représentait en 1960 environ 40% du
besoin d'approvisionnement du pays63.
La Côte d'Ivoire se trouve donc fortement
dépendante pour son approvisionnement en une denrée
vivrière aussi essentielle. Ainsi, pour réduire ce flux
d'importation de riz, l'Etat décida de lancer l'opération
nationale de production massive de paddy à travers une institution
spécialisée pour la riziculture à savoir la Soderiz. Ainsi
le pays envisagea profiter des importantes potentialités rizicoles du
pays et mettre fin à la dépendance alimentaire. Il faut retenir
que la dépendance alimentaire a entrainé une sortie annuelle
d'environ 21 Milliards de francs CFA entre 1967 et 196964. Selon le
tableau n°5 (p 41), de 1960 à 1963 la Côte d'ivoire a
importé en moyenne 50 000 tonnes de riz par an. A partir de 1964 ce
chiffre atteint une évolution importante avec 104 700 tonnes et 122 000
tonnes en 1966. Un chiffre jamais atteint depuis l'indépendance. Cette
période se caractérise aussi par les premières
années de la section riz de la Satmaci.
De 1967 à 1969, on constate une diminution des
importations de riz en Côte d'Ivoire avec en moyenne 77 000 tonnes par
an. C'est le résultat des efforts consentis par la Satmaci pour
réduire les importations. En 1970, la remarque est pertinente avec la
reprise des importations de riz. C'est le signe des incohérences des
politiques de production de la Satmaci à savoir le mode de production
basé sur la riziculture pluviale suivi du vieillissement des usines. La
Soderiz devait arrêter cet important flux de riz en mettant en valeur les
nombreuses potentialités rizicoles dont regorge le pays.
62Ministère du plan et du
développement, Plan quinquennal de développement
socio-économique et culturel de la Côte
d'Ivoire 1971 - 1975, p 146
63 ADS : rapport de synthèse 1975 - 1978, p9
64 SGBCI : 1973, L'économie
Ivoirienne en 1972 - 1973, p 41
44
De 1960 à 1970, les importations de riz ont
évolué jusqu'à atteindre 107 000 tonnes en 1970. Le
tableau n°5 en témoigne de cette évolution
considérable. Cette croissance des importations s'expliquerait par la
forte démographie et d'urbanisation que connait le pays après
l'indépendance. La Soderiz devait alors arrêter les importations
et permettre une meilleure utilisation dans d'autres domaines, les ressources
allouées à l'importation de riz.
Tableau n°5: Evolution des importations de riz 1960 -
1970
Années
|
Quantité en tonnes
|
Estimation en Millions
|
1960
|
42 400
|
868
|
1961
|
50 500
|
1 008
|
1962
|
47 800
|
1 417
|
1963
|
56 000
|
1 045
|
1964
|
104 700
|
1 950
|
1965
|
98 000
|
2 122
|
1966
|
122 000
|
3 114
|
1967
|
71 000
|
875
|
1968
|
77 000
|
1 871
|
1969
|
83 000
|
1 875
|
1970
|
107 000
|
78 666
|
Source : Ministère du commerce :
statistiques douanières de Côte d'Ivoire 1980, p 50
140000 120000 100000 80000 60000 40000 20000
0
|
|
|
|
|
Importation
Année
|
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11
45
Graphique n°2 : Courbe d'évolution des
importations de riz 1960 - 1970
Source : Ministère du commerce : statistiques
douanières de Côte d'Ivoire 1980, p 50
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