I) Les incohérences des programmes d'aide au
retour
Le programme d'aide au retour humanitaire mis en place pour
les ressortissants roumains présente un manque de cohérence
politique, dû à l'hétérogénéité
des acteurs, et à leurs représentations différentes des
aides au retour et des aides à la réinsertion. En effet, certains
acteurs mettent en avant le caractère volontaire et humanitaire des
aides au retour, alors que d'autres acteurs les définissent comme
forcées. De plus, les aides à la réinsertion sont
très peu diffusées. Cela met en cause l'intérêt de
leur existence.
A) Des acteurs hétérogènes
Trois types d'acteurs sont concernés par ces programmes
d'aide au retour et de réinsertion en Roumanie. Les pouvoirs publics
sont les instigateurs de ces programmes de retour, mais peuvent
également proposer des alternatives. Les ONG et associations travaillent
avec les migrants en amont et en aval de ces retours. Les migrants profitent de
ces programmes ou les subissent.
1) Les pouvoirs publics
a) L'OFII
Le Service Social d'Aide aux Émigrants (SSAE) est
créé en 1926; il est reconnu d'utilité publique en 1932.
L'Office National d'Immigration (ONI) voit le jour en 1945 et devient l'Office
des Migrations Internationales (OMI) en 1988. Le Fond d'action sociale (FAS),
héritier du FAS algérien de 1958, il devient en 2001 le Fond
d'action et de soutien pour l'intégration et la lutte contre les
discriminations (Fasild). En janvier 2005, l'OMI absorbe le SSAE pour devenir
l'Agence Nationale d'Accueil des Étrangers et Migrants (ANAEM), (Le
Fasild a pu refuser la fusion, alors que le SSAE n'a pas été en
mesure de la refuser). Le but de cette Agence est d'être l'instrument
d'une nouvelle politique d'immigration, associant immigration, accueil et
intégration. Sylvain Chevron contextualise la création de
l'Agence. « Au coeur « d'un véritable programme politique
», la création de l'ANAEM par la loi de programmation du 18 janvier
2005 « s'inscrit donc dans un vaste mouvement de recomposition
institutionnelle » qui l'englobe et la dépasse.
»51 Sylvain Chevron explique que la collaboration entre
assistants sociaux et anciens fonctionnaires de l'OMI (auditeurs) peut
être complexe. En effet, leurs conceptions de « l'action sociale
» sont parfois bien
51 Chevron S., La réforme des structures en charge de
l'immigration. De l'ANAEM à l'OFII, L'Harmattan, Paris, 2009,
p.15.
25
différentes. Pour les assistants sociaux, l'action
sociale « implique un nécessaire accompagnement de la personne
qui peut parfois durer plusieurs mois. Pour les auditeurs, à partir du
moment où il y a contact avec le public, il y a action sociale.
»52 »
Le SSAE était l'une des vingt branches du Service
Social International. En vertu d'une convention d'affiliation du 8 juin 2007,
l'OFII a repris l'activité du SSI en France, en tant que bureau
affilié. Les relations avec le SSI mobilisaient six personnes au sein du
SSAE et ne mobilisent plus que deux personnes au sein de l'OFII. Le SSAE
était donc plus impliqué dans le SSI que ne l'est l'OFII. «
D'une manière plus générale, il semble que les «
partenaires traditionnels des assistants seraient plus méfiants envers
un établissement public qu'envers une association
»53. L'action sociale de l'OFII s'en trouve
défavorisée.
En 2006, le FASILD devient l'Agence nationale pour la
cohésion sociale et l'égalité des chances et le service
civil volontaire (Acsé). La réforme de ces institutions n'est pas
achevée. Le rapprochement de l'accueil et de l'intégration que
l'Agence devait opérer, n'est pas celui escompté. Ainsi par le
décret n°2009-331 du 25 mars 2009 de modernisation pour le logement
et la lutte contre l'expulsion, l'ANAEM absorbe une partie des
compétences de l'Acsé et devient l'Office français de
l'immigration et de l'intégration (OFII). Au sein de l'OFII les
assistants sociaux et les auditeurs ne s'accordent pas sur les missions de
l'Office. En effet, « l'action sociale » n'est pas
présentée dans le livret d'accueil que distribue l'Office et le
film diffusé aux nouveaux arrivants l'évoque simplement. Sylvain
Chevron affirme que « dans plusieurs directions territoriales,
certains assistants auraient eux-mêmes créé des plaquettes
de présentation. Mais le siège leur en a interdit la diffusion
[...]. »54 Ainsi le terme « action sociale » ne
signifie pas la même chose pour tous les travailleurs de l'Office. De
plus, tous n'y accordent pas la même importance.
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