L'obligation d'information du banquier( Télécharger le fichier original )par Laure Reine Betga Menguete Université de Douala - Cameroun - Master 2 recherche en droit des affaires 2008 |
II- L'étendue du secret bancaire au domaine extra contractuelLe secret bancaire loin de se cantonner dans le cadre de la relation entre l'établissement de crédit et son client va au-delà de celle-ci. En fait, il subsiste même en l'absence de relation contractuelle ou mieux encore à la fin de la relation liant la banque à son client. Le secret bancaire doit continuer à être respecté alors même que le préposé aurait quitté l'établissement de crédit, et que les informations à dévoiler intéresseraient des faits reculés dans le temps. Ainsi nul ne peut se prévaloir du fait qu'un employé ou mieux un préposé de la banque aurait quitté l'établissement de crédit pour espérer qu'il dévoile des informations dont il a eu connaissance alors qu'il était encore sous l'autorité de la banque84(*). Bien plus, le fait que ces informations concernent des faits éloignés dans le temps ne délie pas le préposé de l'établissement de crédit de l'obligation au secret bancaire auquel il reste lié. De même que la cessation des relations avec un client n'entraîne pas l'extinction du secret bancaire85(*), car les informations fournies par le client de la banque alors qu'il était encore en relation avec celle-ci demeurent couvertes par le secret bancaire. Le secret bancaire s'étend également à toute opération de banque quelconque nonobstant l'existence de tout lien contractuel entre la banque et le bénéficiaire de l'opération86(*). C'est justement le cas lors de l'escompte d'un effet de commerce, plus précisément le paiement ou le retrait d'un chèque. En effet, il est communément admis par la jurisprudence que le verso d'un chèque est couvert par le secret bancaire, ce qui permet au banquier de taire l'identité des principaux endossataires du chèque87(*). Le secret bancaire au lieu de se limiter dans le domaine contractuel, va au-delà de ce domaine et couvre même les relations extra contractuelles que la banque pourrait avoir avec un tiers88(*). Mais, qu'est-ce que le secret bancaire est sensé couvrir ou mieux protéger ? B- L'objet du secret bancaireQue l'on se place sur le plan civil ou commercial, le secret bancaire porte sur des actes, faits et informations concernant les clients de la banque et dont celle-ci a eu connaissance dans l'exercice de sa profession89(*). Ces actes, faits et informations sont le plus souvent regroupés sous le vocable « informations confidentielles »90(*). Constituent ainsi les informations confidentielles objet du secret bancaire, des informations précises et chiffrées (I) de même que les intérêts privés et moraux du client de la banque (II). I - Les informations précises et chiffrées, objet principal du secret bancaire Le secret bancaire est attaché aux opérations faites entre la banque et son client. Les informations, objet du secret bancaire sont généralement des opérations sur compte. Mais elles peuvent également être des opérations de caisse ou de portefeuille, des opérations sur titre, des opérations de crédit ou de souscription de garanties au profit de la banque. On parle d'informations précises parce qu'il s'agit de celles qui portent sur l'existence d'un compte, sa position, son mouvement et le détail de ses écritures ; ainsi que le contenu des documents comptables énumérés par le client91(*). Sont également considérées comme informations précises et en tant que telles couvertes par le secret bancaire, les informations en tant qu'elles relèvent du secret des affaires. Concrètement, il s'agit des informations relatives à l'organisation de l'entreprise, à ses procédés de fabrication ou d'invention ; ses projets d'extension, d'investissement dont l'établissement de crédit a pu avoir connaissance. Par informations chiffrées, on entend celles qui portent sur des opérations relatives aux comptes bancaires (les informations qui portent sur le substitut du découvert, le solde d'un compte, la teneur matérielle d'un compte), les opérations d'escompte, les fournitures de devises. Par ailleurs, les informations chiffrées peuvent porter sur les principales inscriptions sur un compte. Cependant, tout en reconnaissant que le secret bancaire porte sur des informations précises et chiffrées, il semble aisé de penser que les informations à caractère général peuvent être données par la banque ou par toute personne soumise au secret bancaire sans pour autant lui causer un préjudice.
II - Les intérêts privés et moraux, objet subsidiaire du secret bancaire Le secret bancaire a vocation à s'étendre également sur les intérêts privés et moraux du client92(*). Ces intérêts privés peuvent être soit le secret des fortunes93(*) ou même le secret des familles. En guise d'exemple, le versement périodique fait par un client à une tierce personne est couvert par le secret bancaire. Par ailleurs, la nature des relations du client avec le tiers reste également protégée par le secret bancaire. En effet, les informations de nature privée confiées au banquier sont couvertes par le secret bancaire. De même peuvent faire l'objet du secret bancaire protégé, des informations qui, par la loi sont couvertes par le secret professionnel. Ces informations peuvent porter sur des faits concernant un client, notamment en cas de procédure de règlement amiable. En effet, les informations afférentes à une procédure de règlement amiable d'un client de la banque sont couvertes par le secret bancaire. En outre, la cour d'appel de Versailles avait jugé que le secret bancaire couvre tous les renseignements d'ordre privé, en l'occurrence la situation médicale du client dans le cadre d'une convention de prêt. Par contre, il ne s'étend pas aux éléments purement factuels relatifs à la demande de prêt, ses modalités précises, et la réponse motivée donnée par la banque94(*). Jusqu'ici le secret bancaire n'a été exploré que dans son contenu. A présent, il convient de s'intéresser aux personnes concernées par le secret bancaire. * 84 Art 4 de la loi de 2003 relative au secret bancaire. * 85 CREDOT (J- F), le secret bancaire : son étendue et ses limites, la fourniture des renseignements commerciaux par la banque, Les petites affiches, 17 Février 1993, n° 21, p. 9. * 86 C'est notamment le cas des opérations de caisse qui se font le plus souvent dans les guichets de la banque. Ces opérations sont généralement dépourvues de base contractuelle. Elles constituent le plus souvent en des escomptes d'effets de commerce ou mieux en des opérations d'encaissement ou de décaissement. * 87 C'est ainsi que dans un arrêt du 08 juillet 2003 rendue par la chambre commerciale, la cour de cassation a eu à réitérer la protection du verso d'un chèque par le secret bancaire. * 88 Le tiers n'est pas forcement un client potentiel de la banque. * 89 Art. 3 de la loi de 2003 relative au secret bancaire. * 90 CREDOT. (J-F), op. cit. * 91 Le chiffre d'affaires d'un client personne physique, le chiffre d'affaires des personnes morales en revanche ne peut être couvert par le secret bancaire, car il est destiné à être rendu public. * 92 Il s'agit des intérêts qui touchent directement à la vie privée du client de la banque et dont le banquier a pu avoir connaissance lors de l'exercice de sa profession. * 93 Le secret des fortunes peut être rompu dans le cadre de la lutte contre le blanchiment des capitaux et du terrorisme (voir infra). * 94 Versailles, 23 Mars 1994, Dalloz 1994, sommet com., 328, observations VASSEUR. |
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