De la protection du patrimoine dans une union libre: cas du concubinage( Télécharger le fichier original )par Nicole SIKUZANI ABANABO Université libre des pays des grands lacs RDC - Licence en droit 2010 |
Paragraphe 3. Effets des sociétés entre concubinsLa société, qu'elle soit régulière ou qu'elle n'existe qu'en fait, produit des effets entre associés et à l'égard des tiers. Entre associés, les conflits éventuels n'auront lieu dans la plupart des cas qu'à propos de la liquidation de la société, à l'égard des tiers, les conflits peuvent surgir tant au cours de la société qu'au moment de la dissolution. Seront seuls examinés les problèmes de liquidation soulevés à propos de la société de fait, que celle-ci ait été « créée de fait » en l'absence de convention ab initio ou qu'elle soit de fait en raison de l'irrégularité qui affecte son existence juridique (ex : absence d'écrit ou défaut de publication). S'il s'agit d'une société régulière (société en nom collectif, association en participation, société civile), il suffit de s'en référer aux effets reconnus aux sociétés de cette nature et cela tant à l'égard des associés qu'à l'égard des tiers. Les tiers sont tenus au même titre que les concubins de faire la preuve des éléments constitutifs du contrat de société au même titre que les associés sous réserve que l'absence d'un écrit ne pourra, en aucun cas, leur être opposée. La société de fait entre concubin ne diffère en principe pas de la société de fait en général. Ses effets ne devraient dès lors pas être différents. Toute fois, la nature des relations unissant les associés peuvent justifier certaines solutions spécifiques. Ainsi lorsqu'il s'agira d'interpréter la volonté des parties quant à leur part respective ou quand il faudra déterminer la consistance de l'actif social, le juge ne pourra dans son rôle d'interprète faire abstraction de la communauté de vie qui unit les parties. 1. La liquidation des sociétés entre concubins dans les rapports entre les associésChaque fois qu'il est possible de déceler la volonté des parties et notamment la mesure dans laquelle chacune d'elles a entendu participer aux bénéfices et aux pertes de la société, le juge doit ordonner la liquidation sur les bases ainsi établies et voulues par les concubins. La volonté des concubins peut se révéler, soit dans le pacte social avenu entre eux, ce pacte fût-il irrégulier, soit dans des propositions de liquidation intervenues durant l'existence de la société de fait sans susciter d'opposition particulière. La mesure de la participation des parties aux bénéfices et aux pertes pour être établie par toute voie de droit au même titre que leur volonté de participation. Elle peut notamment être établie par une disposition testamentaire sauf preuve contraire56(*). Lorsqu'il n'est pas possible de déceler la volonté des parties, le juge doit appliquer le principe énoncer par l'article 1853 du code civil français dispose que: « lorsque l'acte de société ne détermine point la part de chacun des associés dans le bénéfice ou parts, la part de chacun est en proportion de sa mise dans le fonds de la société ». Il faut bien entendu, considérer comme apports, non seulement les biens et l'argent mis en société mais également l'activité des associés qui constitue un apport en industrie (art 1833 CCFr). Chacun des concubins aura droit dans l'actif à une part proportionnelle à ce qu'il a apporté en biens, en argent ou en industrie. C'est à notre sens, la solution la plus équitable. Dans la pratique, il sera souvent difficile de déterminer avec précision l'étendue ou la valeur des apports respectifs, dans ce cas, le juge ordonnera un partage par moitié, solution arbitraire, nous le reconnaissons, mais qui trouve sa justification, par analogie, dans l'art 577 bis du code civil : « A défaut de convention et de dispositions spéciale, la propriété d'une chose qui appartient indivisément à plusieurs personnes est régie ainsi qu'il suit : les parts indivises sont présumées égales ». La jurisprudence a en général appliqué la règle du partage par moitié57(*). Il reste à déterminer l'actif de la société. Il n'y a guère de difficultés lorsqu'il s'agit d'une société universelle. S'agissant d'une société particulière, il faut se garder de confondre les biens sociaux de ceux qui ont été confondus par suite de la communauté de vie des concubins. Le juge aura donc, dans chaque cas, à déterminer l'actif social en recourant, les cas échéant, à des experts ou des liquidateurs. Les biens qui ne font pas partie de l'actif social, parce qu'ils n'ont pas été apportés en société ou qu'ils n'ont pas été acquis au moyen des bénéfices produit par la société, seront répartis suivant les principes applicables à la liquidation du patrimoine des concubins. Lorsqu'il s'agira d'évaluer l'actif de la société, certaines difficultés de preuve surgiront. Il arrivera souvent qu'un bien (meuble ou immeuble) acquis au moyen de deniers sociaux, apparaisse comme étant la propriété exclusive de l'un des concubins. Il faut décider qu'il appartient, à celui qui prétend que tel bien fait partie de l'actif social, d'en rapporter la preuve. Ici encore, il s'agit d'une question de fait soumise à l'appréciation des tribunaux dont il n'y a pas lieu ici de craindre l'arbitraire. En effet, l'existence de la société de fait étant admise, quelque soit l'hostilité du juge à l'égard du concubinage, celui-ci s'attachera à ne pas favoriser l'un au détriment de l'autre. Certaines décisions ont cependant renversé la charge de la preuve en présument que toute acquisition est faite avec les deniers sociaux sauf à celui qui s'en prétend le propriétaire exclusif de prouver la provenance des fonds ayant servi à l'acquisition. Il faut reconnaitre que les relations qui unissent les associés concubins créent, dans la plus part des cas, un climat de confiance qui peut expliquer que l'un des associés se soit montré moins vigilant que ne l'aurait été un associé ordinaire, lors de l'acquisition de certains biens au moyen des fonds sociaux. Le fait que qu'un bien ait été acquis au cours de la société au nom exclusif de l'un des associés ne constitue, dès lors, pas nécessairement la preuve qu'il ne fait pas partie de l'actif social. Lors de la liquidation de la société entre concubins, d'autres problèmes peuvent encore surgir, tel est le cas lorsque les fonds sociaux ont été utilisés à des fins personnelles aux associés ou lorsque des dettes sociales ont été acquittées au moyen de fonds propres aux associés. Il faudrait également se demander si l'actif à partager comprend les apports ou si chacun de concubins peut les reprendre à la dissolution. Ces problèmes ne sont cependant pas spécifique aux sociétés entre concubins mais se rencontrent à propos de la liquidation de toute société de fait. Il n'entre dès lors pas dans notre propos de les approfondir. * 56 Mazeaud H. et Mazeaud j, Leçon de Droit civil, Tome I, 4e édition, Mon chrétien, Paris 1967 P5 * 57 Nicole J. op.cit, p111 |
|