De la violation des conditions de forme de licenciement " irréguliers "( Télécharger le fichier original )par Rémy BATOFOLE LOFELI Université libre de Kinshasa Matadi RDC - Licence en droit 2011 |
§2 Obligations du travailleur37(*)La définition même du contrat ainsi que son exécution révèlent l'existence d'un certain nombre d'obligations incombant au travailleur. Mais, l'obligation essentielle ou principale du salarié (travailleur) est d'exécuter la prestation de travail dans les conditions prévues par lui et l'employeur et cela sous la subordination ou la direction de l'employeur. Cette exécution doit être personnelle, consciencieuse et loyale.
A) EXECUTION PERSONNELLE
Le caractère personnel de l'obligation du travailleur découle de la notion même des relations de travail et de l'intuitu personae qui précède à la conclusion et à l'exécution du contrat de travail selon l'article 50 de la loi n° 015/2002 du 16 octobre 2002 portant code de travail, précise à cet effet que le travailleur a l'obligation d'exécuter personnellement son travail dans les conditions, au temps et au lieu convenus. Pour ce faire, le second alinéa de l'article 50 du code du travail ajoute que le travailleur doit agir conformément aux ordres qui lui sont donnés par l'employeur ou son préposé, en vue de l'exécution du contrat. Il doit respecter les règlements établis pour l'établissement, l'atelier ou le lieu dans lequel il doit exécuter son travail. Cette obligation apparaît naturellement comme la conséquence du principe général posé par l'article 135 du CCCL III en ces termes : « l'obligation de faire ne peut être exécutée par un tiers contre le gré du créancier, lorsque ce dernier a intérêt qu'elle soit remplie par le débiteur lui-même». Le travailleur ne peut donc dans l'exécution du contrat se substituer au tiers ou se faire aider par lui sans le consentement de son employeur. Il se rend sinon coupable d'une faute grave justifiant le licenciement sans préavis ni indemnités38(*). Notons que la convention collective peut violer l'article 50 du code du travail mais en prévoyant des conditions favorables au travailleur. Dans ce cas, les enfants exécutent leurs propres contrats et non ceux de leurs parents décédés dont les contrats se sont éteints par le décès. En cas d'inexécution du contrat du travail par le travailleur, l'employeur ne peut jamais recourir à l'exécution forcée, la sanction consistant simplement dans la résiliation du contrat et l'octroi éventuel de dommages-intérêts. Cette conséquence relève de l'application du principe civiliste d'après lequel toute obligation de faire ou de ne pas faire se résoud en dommages et intérêts, en cas d'inexécution de la part du débiteur39(*). B) EXECUTION CONSCIENCIEUSE
Il s'agit ici de déterminer comment la responsabilité du travailleur sera engagée. Dans le cadre de l'exécution consciencieuse du contrat, de travail par le travailleur, le législateur a consacré deux articles du code du travail pour expliciter le contenu de cette obligation. En effet, l'article 51 du code du travail stipule que « le travailleur doit s'abstenir de tout ce qui pouvait nuire soit à sa propre sécurité, soit à celle de ses compagnons ou des tiers. Il doit respecter les convenances et les bonnes moeurs pendant l'exécution du contrat et traiter avec équité les travailleurs placés sous ses ordres ». Pour ce faire, le travailleur doit respecter toutes les consignes de sécurité et de salubrité dans les lieux du travail, accepter tout contrôle médical imposé par l'employeur. Il doit éviter des grossièretés dans les lieux du travail et de manière générale, tout acte qui porterait atteinte à la moralité, notamment l'ivresse au bureau ou à l'atelier, la prostitution notoire dans le milieu du travail, le bavardage, la médisance. Dans le cas où le travailleur occupe un certain rang dans la hiérarchie de l'entreprise, il doit traiter avec justice tous ses subordonnés tout en respectant les droits de chacun. Il doit être guidé par le sentiment d'impartialité et éviter absolument les pratiques de tribalisme, de népotisme et de favoritisme. Il doit avoir le sens de servir et non de se servir. Par ailleurs, l'article 52 du code du travail indique que le travailleur a l'obligation de restituer en bon état à l'employeur les marchandises, produits, espèces, et, d'une façon générale, tout ce qui lui a été confié. C'est le cas notamment des agents de recouvrement des créances, des agents payeurs et caissiers pour les sommes d'argents mises à leur disposition, des maçons, plombiers, mécaniciens pour l'outillage leur confié, les chauffeurs pour les véhicules leur confié. Le travailleur n'est toutefois tenu responsable ni des détériorations ni de l'usure dues à l'usage normal des choses, ni de la perte fortuite. Il est évident que l'accomplissement matériel de la prestation de travail constitue normalement une obligation de faire. Mais, suivant quel critère précis décidera-t-on que tel fait ou telle omission intervenue en cours d'exécution est susceptible d'engager la responsabilité du travailleur, mises à part les détériorations et usure dues à l'usage normal de la chose ou la perte fortuite ? Selon quel critère doit-on apprécier la faute du travailleur ? Doit-on engager sa responsabilité pour simple négligence dans l'exécution de son travail ? Le problème est d'importance, compte tenu de la fréquence des fautes dommageables commises par le travailleur : malfaçons, détérioration du matériel confié, ou gaspillage des matières premières. Il semble ici qu'il faille se référer aux principes généraux du droit des obligations. Le travailleur comme tout débiteur, doit apporter à l'exécution de son travail, tous les soins d'un bon père de famille. C'est donc en principe à un type abstrait que l'on devrait comparer l'activité du travailleur dont l'employeur est en droit d'attendre une capacité professionnelle et une conscience moyenne40(*). Mais, ici, on ne doit pas tenir compte de toutes les fautes du travailleur, de la simple négligence à l'acte intentionnel nuisible. Seule la faute lourde ou grave serait susceptible d'être retenue à la charge du travailleur. C'est dans ce sens que la cour de cassation de France décide qu'un travailleur salarié ne peut être déclaré responsable pécuniairement que s'il a commis une faute lourde équivalente au dol41(*). La justification de cette prise de position réside dans le fait que l'employeur qui est à la tête de l'entreprise et qui en perçoit les profits, en assume les risques ; et les malfaçons involontaires lorsqu'elles résultent des négligences, des fautes légères dans l'exécution du travail, comptent parmi ces risques42(*). La cour de cassation française déclare d'ailleurs que l'ouvrier ne peut être tenu pour responsable du résultat défectueux de son travail que si sa façon de procéder révèle, par comparaison avec un ouvrier normalement diligent, non une simple erreur involontaire, mais une faute lourde, voire volontaire. Mais, vis à vis des tiers, l'ouvrier demeure responsable même de ses faute légères auquel cas, l'employeur pourra être condamné à réparer le dommage à titre de commettant43(*).
C) EXECUTION LOYALE Dans l'exécution du contrat du travail, le travailleur doit faire montre de droiture et probité. Il doit être honnête et correct dans tout ce qu'il fait à l'occasion du contrat de travail et cette attitude doit marquer toute sa vie professionnelle. L'article 52 alinéa 3 du code du travail prescrit le travailleur de garder les secrets de fabrication ou d'affaires de l'entreprise et de s'abstenir de se livrer ou de collaborer à tout acte de concurrence déloyale, même après expiration du contrat. En effet, le travailleur ne doit pas divulguer les secrets de l'entreprise. Il doit à ce titre observer une discrétion absolue dans les affaires de service qui par leur nature ou à la suite d'instructions données, revêtent un caractère confidentiel. Cette obligation s'étend aussi bien dans les rapports internes de service que dans les rapports avec les tiers. Nous allons examiner cette obligation, c'est-à-dire l'exécution loyale sur deux niveaux : en cous d'exécution d'un contrat et à son expiration.
1. En cours d'exécution du contrat Aux termes de l'art. 33 al. 3 du CCCL III, les conventions doivent être exécutées de bonne foi. Etant donné le caractère personnel de la relation du travail, pareille obligation s'impose avec force particulière. Le salarié doit exécuter correctement la prestation du travail et doit s'abstenir de tout acte de concurrence déloyale. (ord. Législative n° 41/63 du 24/2/1950). Il ne doit pas divulguer les secrets de fabrication (art. 52, al 3 du code du travail). 2. A l'expiration du contrat Certaines obligations subsistent sous certaines conditions évidemment. Il est vrai que l'art. 53 du code du travail en son al. 1er prévoit la nullité d'une clause de non concurrence, puisqu'il est ainsi conçu : « est nulle de plein droit, la clause interdisant au travailleur après la fin du contrat d'exploiter une entreprise personnelle, de s'associer en vue de l'exploitation d'une entreprise personnelle, de s'associer en vue de l'exploitation d'une entreprise ou de s'engager chez d'autres employeurs. En d'autres termes, le travail reprendra sa liberté, mais sera astreint au respect de cette obligation prévue dans le 2ème alinéa de cet article qui consiste en la licéité de la clause de la non-concurrence dans certains cas déterminés : - Résiliation du contrat à la suite d'une faute lourde du travailleur ; - Démission du salarié en l'absence d'une faute lourde de l'employeur ; - Activité spéciale du travailleur lui permettant de divulguer les secrets de fabrication ou d'exercer une activité concurrente. Enfin, et malgré les trois cas énoncés ci-haut, la clause de non-concurrence est limitée dans le temps ; un an à compter de la fin du contrat (art. 53 in fine) et l'interdiction ne se rapporter qu'aux activités que le travailleur exerçait chez l'employeur. Les parties peuvent de commun accord renoncer à la clause de non-concurrence soit en cours du contrat, soit après la rupture de celui-ci44(*).
* 37 Articles 50 à 54 du code du travail. * 38 LUWENYEMA LULE, op. cit., p. 145. * 39 Articles 40 du code civil congolais, livre III. * 40 CAMERLYNK, G-H., op. cit., p. 200. * 41 SOL. 19 mai 1958 (2 décisions) D. 1959. 20 noté R. Lindon, J.C.P. 1958 II, II 143. Note Brèthe de la Gressaye. * 42 C'est l'avis de l'avocat général R. Lindon dans le commentaire reporté D. 1958. 20. * 43 Voir note SAVATIER, J., J.C.P. 1965, II 14139 : soc 27 mai 1964, J.C.P. 1965, II, 14056, note CAMERLYNK, G-H. * 44 KUMBU-KI-NGIMBI, op. cit ., p. 22. |
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