B- La reconnaissance mutuelle des diplômes dans
les Etats de la Communauté
Il s'agit des diplômes marquant la fin de formation dans
les domaines de
l'enseignement, de la recherche et de la formation
professionnelle. Le législateur communautaire a pris la peine de
préciser cette consécration en des termes clairs lorsqu'il dit
que la politique commune en ces matières comporte « la
reconnaissance mutuelle des diplômes sanctionnant la formation
dispensée dans les institutions ».87 C'est une
consécration salutaire dans l'optique de la reconnaissance à
l'étranger d'origine communautaire d'une condition confortable dans tout
les pays de la Communauté. Ainsi, cette reconnaissance implique que les
diplômes obtenus au Gabon puissent servir au Tchad, ceux obtenus en RCA
puissent être utilisés en Guinée Equatoriale, sans qu'il ne
soit imposé une réadaptation ou toute autre condition requise au
titulaire. L'article 3 du règlement N°10/05 précité
va d'ailleurs dans le même sens en affirmant que la Conférence des
Recteurs et des Responsables des Organes de Recherche en Afrique Centrale doit
étudier les modalités de mise en oeuvre de « la
reconnaissance mutuelle des diplômes nationaux ».
La reconnaissance mutuelle des diplômes dans les
domaines de l'enseignement suppose que les diplômes sanctionnant
l'enseignement dans un pays donné puissent permettre à leur
titulaire de continuer leurs études dans un autre pays sur la base du
niveau d'étude constaté par ledit diplôme. Ainsi par
exemple, le titulaire du baccalauréat camerounais peut s'inscrire dans
une université congolaise sans aucune condition particulière.
C'est le lieu de saluer l'application de ce principe de reconnaissance mutuelle
des diplômes dans le domaine de l'enseignement par certains Etats de la
Communauté. C'est le cas du Cameroun où les diplômes
tchadiens de fin d'enseignement secondaire ouvrent la voie à
l'enseignement supérieur camerounais et vice versa.
D'autre part, cette reconnaissance revêt encore un
caractère plus important dans le domaine de la formation professionnelle
car entraîne l'acceptation d'un diplôme professionnel obtenu dans
un pays par un autre de la Communauté. Toute son importance
réside en ce qu'il
86 Cf. deuxième partie, chap. 1, section 1.
87 Article 29 para.1, alinéa 2 de la Convention
régissant l'UEAC.
s'agit « d'améliorer les possibilités
d'emploi des travailleurs dans le marché intérieur »88
commun. Ainsi, cette reconnaissance commande que le diplôme de
journalisme octroyé à un camerounais puisse lui permettre
d'accéder à une profession de journaliste en RCA, que le
congolais formé en science de l'éducation puisse enseigner au
Gabon, sur la base de son diplôme, (etc.) sous réserve des
restrictions de l'article 27 alinéa (a) para. 2 in
fine.89
La reconnaissance des diplômes au sein des pays de la
CEMAC demeure donc une priorité pour la Communauté et il faut
reconnaître qu'elle n'est pas facile à réaliser, puisque
cette reconnaissance ne peut se faire si les diplômes concernés
sont entièrement différents d'un pays à l'autre. C'est
pourquoi le législateur communautaire commande non pas l'harmonisation
des législations en matières d'organisation et de fonctionnement
des politiques d'enseignement, de recherche et de formation professionnelle -
ce qui est de la compétence exclusive des Etats-, mais une «
coordination des programmes d'enseignement, de recherche et de formation
professionnelle ».90 Un grand pas a été
franchi dans ce sens dans la Communauté à travers la mise sur
pied dans tous les Etats membres du système universitaire Licence-
Master- Doctorat (LMD) qui vise une certaine convergence dans les programmes
d'enseignement supérieur, afin que les diplômes les sanctionnant
soient proches, et par conséquent facilement reconnaissables à
travers tous les pays de la Communauté. La mise en place de ce
système LMD est saluée par un politologue camerounais qui,
à côté de l'uniformisation des diplômes obtenus dans
les universités précise que « cela fait qu'il y aura un
grand brassage des élites en formation et cela pourra faire naître
la conscience de l'esprit CEMAC et la conscience de l'appartenance à la
sous région ».91 Vu sous cet angle, la
reconnaissance des diplômes est une mesure qui peut fortement
conditionner la circulation des personnes dans la Communauté en ceci que
les personnes qui souhaitent se déplacer peuvent être
dissuadées si les titres dont ils sont titulaires ne sont pas reconnus
dans les pays d'accueil. On dira alors que la reconnaissance mutuelle des
diplômes est une modalité d'exercice de la libre circulation des
personnes en zone CEMAC, et plus particulièrement celle des
étudiants.
88 Article 123 du Traité UE.
89 Il s'agit des exceptions liées aux emplois
dans les secteurs public, parapublic et stratégique. Voir infra
2ème partie, chap.1 section 2.
90 Article 29 alinéa (c) de la Convention
régissant l'UEAC.
91 MPONDI (J-E), propos tirés d'une interview
accordée à la radio nationale camerounaise et publiée sur
le site Internet de xinhuanet.
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