Para. 2 : LES DROITS RECONNUS AUX ETRANGERS D'ORIGINE
COMMUNAUTAIRE EN MATIERES D'ENSEIGNEMENT, DE RECHERCHE ET DE FORMATION
PROFERSSIONNELLE
L'idée générale réside en ce qu'il
s'agit de cerner les contours des privilèges reconnus aux
étrangers ressortissants communautaires dans ces domaines. A cet effet,
on dira que le législateur communautaire a bien voulu en ces
matières conférer à ces étrangers une condition
privilégiée en leur reconnaissant les mêmes droits que les
nationaux. Ces droits vont de l'accès inconditionné dans des
établissements de tous les pays membres (A), à la reconnaissance
mutuelle des diplômes (C) en passant par la facilitation de la
mobilité de tous ceux qui interviennent en ces matières (B). La
consécration de tous ces droits a amené le Conseil des Ministres
à prendre un règlement en 200580 dont les objectifs
définis à son article 3 paragraphe 2 consistent à
« étudier toutes les questions relatives à
l'enseignement supérieur et à la recherche scientifique et
technologique » notamment en ce qui concerne les conditions de
mobilité des enseignants, chercheurs et étudiants, la
reconnaissance mutuelle des diplômes nationaux ainsi que les frais de
scolarité.
A- L'ouverture dans les mêmes conditions que les
nationaux des structures d'enseignement, de formation professionnelle et de
recherche
C'est une prescription de l'alinéa b de l'article 29 de
la Convention régissant l'UEAC qui dispose que les actions de la
Communauté en matière d'enseignement, de formation
professionnelle et de recherche impliquent « l'ouverture aux
mêmes conditions d'accès que les nationaux des
établissements d'enseignement à tous les ressortissants de
l'Union économique ». La formulation du texte semble
être restreinte et ne prendre en considération
80 Il s'agit du règlement N°10/05 portant
création d'une Conférence des Recteurs des Universités et
Responsables des Organismes de Recherche d'Afrique Centrale.
que les « établissements d'enseignement
». La question est de savoir si la notion «
établissements d'enseignement » doit être perçue
au sens restreint en exclusion des structures de formation professionnelle et
de recherche. A notre sens, cette notion doit être prise au sens large
pour englober les autres domaines afin de rendre plus dynamique le mouvement
d'intégration personnelle en toutes ces matières. Pourtant, le
règlement pris en application de ces dispositions est resté sur
les mêmes bases que l'article précité puisqu'il ne vise que
le domaine de l'enseignement supérieur en exclusion des domaines de
formation professionnelle et de recherche - notamment
appliquée.81 Ce règlement vise les structures
précises (1) et consacre des droits déterminés (2).
1- Les structures visées
Nous l'avons dit, le règlement N° 09/99
précité est un peu restrictif quant à son domaine car
l'article 1er ne vise que « les établissements
publics ou d'utilité publique d'enseignement supérieur »
des Etats membres. Deux conclusions sont alors tirées de ces
dispositions :
- D'abord, il est question des établissements
d'enseignement supérieur,
exclusivement. C'est dire que sont exclus du champ
d'application de ce règlement les établissements d'enseignement
primaire et secondaire, ceux de formation professionnelle ainsi que ceux
consacrés exclusivement à la recherche, c'est-à-dire les
organismes de recherche. Ceci est d'autant plus vrai que le règlement a
été pris en considérant « l'avis de la
Conférence ad hoc des ministres chargés de l'enseignement
supérieur réunis à Yaoundé en République du
Cameroun ».82 Et il est clair que la formation
professionnelle et la recherche - notamment appliquée - tout comme
l'éducation primaire et secondaire font l'objet dans tous les pays de la
CEMAC des ministères différents et distincts de ceux de
l'enseignement supérieur. Il s'agit pour nous d'une restriction
malheureuse qui concourt à restreindre le champ d'application des
libertés communautaires. Il serait louable que les structures exclues
soient prises en compte même sans prescriptions textuelles, en attendant
que la législation soit changée dans ce sens.
- Ensuite, il s'agit des établissements publics ou
d'utilité publique, puisque,
précise le règlement, « les
écoles à statut privé ne sont pas assujetties aux
dispositions du
81 Règlement N°09/99/UEAC-019-CM-02 du 8
août 1999 relatif au traitement national à accorder aux
étudiants étrangers ressortissants des pays membres de la
Communauté.
82 Préambule du règlement N°09/99
précité, para.4.
présent règlement ».83
C'est dire que ces dispositions ne sont appliquées qu'à
l'égard des établissements de l'Etat à l'instar des
universités, des centres universitaires et des structures
rattachées aux universités comme les Instituts Universitaires de
Technologie (IUT), etc. Ainsi, les établissements qui appartiennent
à des particuliers ne peuvent se voir imposer les dispositions de ce
règlement relatives aux droits qu'il consacre. L'exclusion des
écoles à statut privé nous semble contradictoire lorsqu'on
sait que les établissements d'utilité publique sont
concernés par cette disposition. En effet, il est clair que le statut
privé de certains établissements n'exclut pas pour autant qu'ils
puissent être d'utilité publique. C'est dire qu'à notre
sens, la seule condition d' «établissements publics ou
d'utilité publique » est suffisante.
2- Les droits consacrés
Le règlement a pour objet la reconnaissance aux
étudiants étrangers ressortissants communautaires d'une condition
comparable à celle des nationaux en matière de conditions de
scolarité. Et l'article 2 précise les domaines
concernés.
Il s'agit en premier des frais de scolarité. C'est dire
que ces frais de scolarité doivent être les mêmes pour les
étrangers et nationaux et interdiction est faite de prévoir un
traitement différentiel à leur égard à propos de
ces frais de scolarité. A ce sujet, la doctrine salue l'application
exemplaire du Cameroun en matière de droits universitaires. Le constat
fait est très positif en ce sens que les étudiants
étrangers ressortissants des Etats membres de la CEMAC ne paient que
50.000 (cinquante mille) FCFA de droits universitaires alors que les
étudiants étrangers non ressortissants de la CEMAC continuent de
payer au mois 300.000 (trois cents mille) FCFA selon le type
d'établissement universitaire fréquenté.84 A
cet égard, l'Université de N'Gaoundéré (dans
l'Adamaoua camerounais) a compté au cours de l'année
académique 2004/2005 1602 (mil six cent deux) étudiants tchadiens
sur un effectif total de 15.000 (quinze mille) apprenants.85
Il s'agit ensuite du bénéfice des oeuvres
universitaires qui doivent profiter aux étrangers dans les mêmes
conditions que les nationaux. Les oeuvres universitaires désignent
toutes les facilités et les programmes offerts par les
universités à tous leurs étudiants.
Il convient toutefois de mentionner que ces droits peuvent
être écartés au détriment des ressortissants des
autres pays membres par le pays d'accueil pour les raisons de protection
83 Article 3 du règlement N°09/99
précité.
84 ATEMENGUE (J. de N.) dans une interview
publiée sur le site Internet de xinhuanet.
85 Selon le journal d'informations N'Djamena Bi hebdo
N°955 du 6 juin 2006.
de l'ordre public, comme le reconnaît l'article 5 du
règlement. Ceci rentre dans le cadre plus large de la réserve
d'ordre public86.
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