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Chants de recueils et culte Protestant aujourd'hui à  Kinshasa. Effort pour la revalorisation des chants traditionnels

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par Maurice Mondengo Iyoka B
Université protestante au Congo - Diplome d'études approfondies en théologie 2008
  

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2.4.3 Appréciation théologique et spirituelle

Les musiciens, les hymnologues comme les théologiens qui s'intéressent au chant savent que le chant est un aide-mémoire de confiance. Il comporte des tonalités plus colorées qu'une parole ordinaire. Ses facultés de facilitateur dans la rétention sont légendaires. Dans le travail que fait l'Église dans le coeur des humains, il est connu que par le chant, comme le dit Decorvet que cite Nsumbu, le fidèle entre spirituellement dans la méditation et retient aussi facilement que possible le message de la foi parce qu'il peut le répéter plusieurs fois même tout seul. La mélodie et le rythme aident à retenir les paroles et les laissent en quelque sorte couler jusqu'au fond du coeur.558(*)

L'impact théologique et spirituel de l'héritage missionnaire peut se dégager clairement dans le contenu des recueils que dispose encore notre Église protestante au Congo. Les chants qu'on entonne dans nos cultes véhiculent une théologie, une foi, une manière de comprendre et de faire comprendre cette foi, bref de communiquer une manière d'être. Dans le questionnement de la manière d'être par rapport à la foi, d'aucuns savent que cela va de paire avec le questionnement de la convergence des faits autour de la participation ou non de la culture du peuple sur la terre de la Mission. C'est la problématique de la prise en compte ou non de la culture des peuples dans l'oeuvre missionnaire. Le problème ici est celui de toujours réfléchir sur les possibilités qui permettent un partenariat adéquat entre la Mission et la culture. Car, ce faisant, la conceptualisation claire de termes contextualisation ou inculturation théologique pourra aussi facilement se dégager. Qu'en est-il de l'hymnologie missionnaire ?

Si les missionnaires ont réussi à produire un travail remarquable dans l'élaboration des recueils de chants et même en nos langues congolaises ; si les recueils de chants sont encore protégés et utilisés bien qu'à degrés différents dans nos cultes ; si ces chants sont compris dans leur locution et même reproduits mentalement dans nos milieux les plus reculés là où les recueils ont disparu, nous pouvons nous permettre d'affirmer que c'est la vision théologique de l'inculturation qui a fait réussir cette entreprise missionnaire. En effet, Martin Luther sous les menaces de la hiérarchie catholique au XVIe siècle, se retira dans son milieu natal, et oeuvra pour le chant liturgique de l'assemblée en prière en allemand, sa langue maternelle et les allemands lui ont emboîté le pas durant toute la période de la Réforme. Oui, les peuples français et suisse avec Calvin et ses adjuvants, en produisant les recueils, l'ont fait en français, leur langue. Oui, c'est le même cas avec les néerlandais et les anglais qui ont suivi le pas de la Réforme.

Il faut relever le fait que le problème que nous tentons d'examiner ici, pour dégager l'impact théologique et spirituel de l'héritage hymnologique, n'est pas seulement celui de l'influence de la langue dans la création des chants mais aussi celui de l'influence du milieu et ses réalités dans le temps et dans l'espace, par rapport à la composition des chants missionnaires et pourquoi pas par rapport aux compositeurs eux-mêmes.

De la vérité historique qui indique qu'à chaque époque ses moeurs, nous pouvons déduire en rapport avec le domaine de l'évangélisation, qu'à chaque époque sa théologie. Plus haut, avec James Lyon et Edith Weber, nous avons pu traverser les siècles du protestantisme et retenu en gros ce qui suit :

1. Au XVIe siècle avec Luther et ceux qui l'ont suivi, c'est connu que c'était la théologie de la Réforme qui véhiculait et appelait au retour aux Saintes-Écritures. Toutes les compositions hymnologiques étaient à la solde de cette théologie de l'heure.

2. Après la disparition de Luther, c'était l'époque où la théologie transpirait sur les questionnements sur l'orthodoxie et de la mystique (1562-1618) avec la nouvelle expression de la piété (Frömmigkeitsbewegung). Ici encore l'apport de l'hymnologie en rapport avec cette théologie est très considérable. Nous sommes à la fin du XVIe siècle et au début du XVIIe siècle.

3. Au XVIIe siècle, deux faits marquants retiennent l'histoire théologique. Il s'agit de la guerre de Trente Ans (1618-1648) et de Temps des mutations (1648-1685). De la guerre de Trente Ans, la théologie, dans ces temps d'incertitudes et d'angoisses, forgera son discours sur la reconstruction morale et matérielle des populations touchées au plus profond d'elles-mêmes. Le Piétisme comme mouvement de la foi naît. Ici, on remarque une production extraordinaire des chants liturgiques que les auteurs, les poètes, les mélodistes, les compositeurs ont développé en réactions de ces temps sombres de l'histoire. C'est une sorte de sursaut qui tenait à garantir « la paix éternelle ». Du Temps des mutations, la théologie, au lendemain de la signature des Traités de Westphalie qui marquaient la fin de la guerre de Trente Ans, est celle de l'émergence de la Raison (Vernunft) face à la théologie abstraite qui préparera déjà l'Aufklärung. Le répertoire des cantiques subira des transformations théologiques et poétiques significatives pour accompagner ce combat théologique.

4. Au XVIIIe siècle, le fait marquant en théologie est celui d'un effort appuyé sur un biblicisme sobre qui réconcilie, à la fois, le réveil et l'éclosion de la raison, d'où la confrontation positive entre Aufklärung et Piétisme. La recherche de cet accord produira le répertoire des cantiques qui se basera sur une pédagogie sur le respect de la vie qui passe par la pratique chrétienne de l'amour agapé.

On peut ajouter sans le concours de l'ouvrage de James Lyon ce qui suit:

5. Au XIXe siècle, le fait marquant en théologie est que les théologiens sont unanimes pour le nommer siècle de la Mission. Les mouvements de réveil (baptiste, piétiste et méthodiste), les Églises issues de la Réforme saisiront l'importance de la Mission, et des milliers de chrétiens quitteront leurs familles, leurs Églises et leurs pays (en Europe et en Amérique) pour apporter la Bonne Nouvelle dans le monde. Le répertoire des chants accompagnant cette théologie est aussi celui de la Mission. Et les missionnaires l'ont démontré dans leur agir.

Il nous faut, à ce niveau, trouver un point de chute dans ce point de l'impact théologique et spirituel de l'héritage hymnologique missionnaire. Nous venons de faire en quelque sorte le survol des siècles. Nous y avons relevé les rapports incontournables qui lient la théologie de chaque époque à l'hymnologie de son temps. Fort de cela, nous pouvons indiquer en rapport de l'impact théologique et spirituel de l'héritage missionnaire au Congo ce qui suit :

1. Cet héritage a gardé une influence positive dans nos cultes qui se veulent encore protestants au Congo et à Kinshasa jusqu'aujourd'hui;

2. Son contenu est riche en typologies et remplit bien le rôle de la musique servante de la liturgie ;

3. La théologie de ce recueil est purement missionnaire ;

4. Ce recueil traduit le souci de l'évangélisation des âmes du peuple congolais et s'appuie sur la langue des autochtones ;

5. Les questions théologiques de la contextualisation559(*) ont été prises en compte car cela se traduit entre autres dans la traduction en langues congolaises des chants du protestantisme universel et on peut allonger la liste.

L'impact théologique et spirituel de l'oeuvre missionnaire dans l'hymnologie au Congo est certainement positif. Le chant liturgique occupe toujours une place importante dans le culte et garde valablement ses liens avec les autres éléments du culte, grâce à la théologie missionnaire et notre étude l'a démontré. Toutefois, si à côté de la Bible, les chants de recueils, comme langage théologique au temps de la Mission, ont véhiculé avec succès la théologie missionnaire qui oeuvrait pour l'expansion du Royaume de Dieu sur la terre et dans les coeurs des humains au Congo, il est aussi vrai qu'ils portent en eux quelques faiblesses. Ces faiblesses, il faut les trouver dans l'ignorance des contextes réels qui ont milité à leur création par leurs vrais auteurs, poètes, mélodistes et compositeurs. Si le peuple congolais qui a entonné ces chants dans le culte depuis plus d'un siècle a connu quelques traducteurs de ces chants de recueils, par contre il ne connaît pas assez sur les vrais auteurs de ces chants traduits dans nos langues. Aussi, si les facteurs théologiques à l'origine de la production cantiques peuvent effleurer sa préhension, par contre les facteurs historico-psychologiques et socioculturels pour beaucoup de Congolais demeurent un mystère.

* 558 Cf. NSUMBU Pezo N., Mémoire cité, p. 73.

* 559 N'KWIM, à la suite de nombreux auteurs, trouve en la contextualisation et inculturation l'une des stratégies de l'évangélisation missionnaire la mieux réussie. Car les missionnaires, soutient-il, ont trouvé en l'échec de la première évangélisation beaucoup de failles dont celles de la stratégie de l'acculturation ou d'accom-modation). Lire sa thèse citée, p. 72.

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