Les modalités d'applications des règles du droit économiques congolais dans la pratique du commerce en ligne( Télécharger le fichier original )par Espoir MATA MANIUKA Université de Kinshasa - Licence 2008 |
Chapitre II :Du commerce en ligne au regard de la législation en matière économique en R.D.C.Section 1 : L'exercice du commerce en droit congolaisL'action législative fait parti de l'arsenal des mesures destinées à améliorer la sécurité des transactions commerciales en générale et de celles passées en ligne en particulier. Les deux ordonnances présidentielles : · N°87-242 du 23 juillet 1987 portant création du service présidentiel d'études ; · N° 87-243 du 23 juillet 1987 portant réglementation de l'activité informatique en République du zaïre, régissant le domaine de l'informatique ne font pas allusion à l'activité commerciale qui aujourd'hui emprunte les voies de l'internet. Aux fins de mieux cerner le sujet à notre étude, nous allons dans un premier temps rappeler les dispositions juridiques générales prévues par le législateur congolais en matière d'exercice du commerce (section 1) et évoquerons pour clore la section, les modalités de régulation du prix, de la publicité et du paiement (section 2). §1. Les conditions d'exercice de la profession commerciale En accord avec Emile ARRIGHI de CASANOVA, les actes professionnels d'un commerçant ou d'un industriel sont, quelque soit sa branche d'activité (vente, transport, titre de paiement) innombrables, les uns et les autres, cependant ont besoin d'un environnement juridique assurant la sécurité de leur accomplissement dans un contexte social déterminé.53(*) Dans la même voie, l'accès à la profession commerciale en dépit de ce que MASAMBA MAKELA qualifie de "sacro-saint" principe de la liberté du commerce et de l'industrie (A), n'est pas véritablement libre. Les conditions et exceptions liées à la personne désireuse de pratiquer le commerce (B) et à l'accomplissement même des actes réputés commerciaux par la loi(C) constituent un préalable incontournable et sine qua none que nous analysons dans cette partie. A. Principe de la liberté commercialeTimidement consacré par notre constitution, l'accès aux activités commerciales est libre sous réserve toute fois du respect des textes légaux et réglementaires en la matière. Principe à valeur constitutionnelle, l'initiative privée(art.35 de la constitution de la 3e République) implique que toute personne physique ou morale puisse s'établir dans une activité commerciale sans autorisation préalable de l'autorité publique. Exception faite aux étrangers dont certains secteurs tel le petit commerce et autres sont interdits. Analysés dans ce paragraphe en trois modes, ce principe y sera étudié selon son fondement(A.1), son contenu(A.2) et son évolution(A.3) au sein du bassin du Congo. A.1. Fondement du principe Au Congo, l'accès aux activités commerciales est libre sous réserve toutes fois des textes légaux et réglementaires en la matière. L'article 35 de la constitution de la troisième république de la R.D.C. précise que : « l'Etat garantit le droit à l'initiative privée tant aux nationaux qu'aux étrangers. Il encourage l »exercice du petit commerce, de l'art et de l'artisanat par les congolais et veille à la protection et à la promotion de l'expertise et des compétences nationales. La loi fixe les modalités de ce droit ». Il en vient que ce principe est et reste la règle fondamentale pour l'exercice du commerce au Congo aussi bien par les nationaux que les étrangers. N'empêche par contre que le législateur organise son cadre d'exercice pratique en indiquant objectivement et subjectivement les différents cas de limitation et les conditions d'exercice. La loi n° 73/009 du 05 janvier 1973, en son article 5 exclut pour ce faire l'étranger de l'exercice du commerce d'importation, d'exportation, de transit de gros, de demi-gros, de détail,... A.2. Contenu du principe de libre entreprise Ce principe traduit une double réalité dans la mesure où il exclut le monopôle en garantissant d'une part à chaque citoyen le droit de s'adonner à l'exercice de toute industrie ou négoce de son gré et parallèlement, il confère à chaque commerçant le droit de concurrencer l'autre dans les limites de la loi. Ainsi, le dit KUMBU KI NGIMBI, la libre concurrence devient le corollaire obligé de la liberté du commerce et de l'industrie.54(*) Ce principe fort d'attribut, ouvre l'exercice du commerce ou industrie sur tous les biens qui sont dans le commerce, au seul choix du commerçant (national ou étranger) qui décide comme il l'entend soit de donner naissance à une activité commerciale, soit d'assurer la continuité d'une autre exploitation déjà existante. Les garanties de contracter les relations d'affaires avec les personnes de son gré, de s'établir où il estime mieux sur toute l'étendue de la R.D.Congo, de débuter son commerce et d'en mettre fin quand il le juge nécessaire et opportun, s'avèrent intactes, libres et respectées. Paradoxalement, la libre concurrence n'est pas consacrée dans la constitution, mais est reconnue à chaque commerçant comme les moyens suffisants et honnêtes de s'accaparer de la clientèle de son concurrent, censée n'appartenir à personne. Il a été prouvé que pratiquée dans le strict respect de la loi et de la capacité des intérêts en jeu, l'asphyxie de la libre concurrence reste licite quand bien qu'il est consacré des monopoles légaux à certaines entreprises publics (SNEL, REGIDESO,...). Une autre limitation licite de la libre concurrence est celle de restreindre le principe à une sphère de personnes réunissant les mêmes conditions d'accès à savoir la tenue de certains diplômes spécifiques(pharmaciens, etc.). A.3. Rétrospection évolutive du principe de liberté commerciale et de l'industrie dans le bassin du Congo depuis l'époque coloniale A.3.1. Pendant l'Etat Indépendant du Congo Soumis aux contingences spatio-temporelles en matière économique, le principe de la liberté commerciale et d'entreprise est de prime abord perçu comme le droit pour chacun de choisir librement son activité professionnelle, de créer et de gérer les entreprises de son choix. Il s'avère malencontreusement que ledit principe bute dans la pratique à des écueils beaucoup plus forts d'interventionnisme et de protectionnisme de la part de l'Etat régulateur. L'embouchure du Congo, porte sur le monde, n'offre pas seulement la plénitude de navigation au Congo, c'est une voie qui s'ouvre largement au commerce et qui confère un régime amplement favorable aux étrangers. Cette affirmation trouve application dans l'article 1er de l'Acte Général de Berlin du 26 février 1885 selon que : « le commerce de toutes les nations signataires jouira d'une complète liberté dans les limites du bassin géographique du Congo ». En vertu de l'article 5 de cet Acte, l'égalité et la liberté commerciale prônée au Congo, excluait de la part de toute puissance signataire le droit de concéder des monopôles en matière commerciale. Pour Jacques de BURLET cité par KUMBU KI NGIMBI, une clause affranchissant de tout droit d'entrée et de transit les marchandises importées dans le bassin conventionnel du Congo n'a su s'installer longuement et se perpétuer à cause de la mise en danger de la survie de l'E.I.C en voie de faillite. Cette clause bénéficie néanmoins par la déclaration de Bruxelles du 02 juillet 1890, d'un tempérament autorisant cette liberté d'exploitation sous certaines conditions, à savoir la taxation des marchandises importées, à concurrence de 10% de la valeur au port d'exploitation.55(*) Au fil du temps, un traité d'amitié sur le commerce et la navigation fut signé entre les Etats signataires de l'Acte de Berlin et l'E.I.C, lequel traité réaffirme la pleine liberté de commerce et de l'industrie d'établissement et de navigation entre les habitants et les citoyens de deux parties moyennant 10% de droits d'entrée. Mais, il sera abrogé en 1924. A.3.2. Sous l'Etat du Congo-Belge Consacré par la convention de Saint-Germain-en-Laye du 10 septembre 1919, en remplacement de l'Acte de Berlin du 26 février 1885 dont certaines clauses sont controversées dont son article 5, d'autres sont maintenues avec aménagement. Ainsi, son article 4 réaffirme le principe de l'interdiction des monopôles et privilèges édicté par l'article 5 de l'Acte de Berlin et innove en subordonnant l'égalité de traitement des nationaux et des étrangers aux nécessités de l'ordre et de la tranquillité publique.56(*)Aux impératifs de protection contre le péril de leur existence et leur tranquillité ainsi que les nécessités de développement de la colonie, cette convention conférait aux Etats possessionnés le droit de restreindre la liberté du commerce. Plus tard, la législation pénale voulant protéger ce principe, érigera en infraction des atteintes à la liberté du commerce et de la navigation. A.3.3. Pendant la R.D.Congo D'emblée, il sied de souligner que le principe de liberté commerciale et d'entreprise subit l'influence des mutations profondes qui ont succédées à l'indépendance, dans la politique et la forme du gouvernement. Certes, il n'est fait aucune mention expresse dudit principe dans la loi fondamentale du 17 juin 1960, l'article 44 de la constitution du1er par ailleurs, élucide exactement que : « L'exercice du commerce est garanti à tous les congolais sur le territoire de la république dans les conditions fixées par la loi nationale ». Cependant un ajout soucieux d'étendre l'exclusivité de ce principe aux étrangers fut apporté à l'article 46 selon que : « Tout étranger qui se trouve sur le territoire congolais jouit de la protection accordée aux nationaux, sauf exception établie par la loi nationale ». La constitution du 24 juin 1967 prévoyait en principe le maintient en vigueur des traités conclus par la Belgique avant le 30 juin 1960. Mais, partant du comportement habituel des Etats souverains et conformément à la quête de l'indépendance économique, il apparaît que les directives d'égalité et de liberté commerciale énoncées par la convention de Saint-Germain-en-Laye ne trouvèrent pas application. L'acte constitutionnel de transition du 09 avril 1994 vient rompre la défaveur et l'incrimination de l'étranger favorisées par les lois de 1974 et 1977 en proclamant de nouveau et expressément le principe de liberté du commerce et de l'industrie. Ce principe a été repris dans la constitution de la transition du 04 avril 2003 en ses articles 16 et 38 respectivement comme suit : « La R.D.Congo garantit l'exercice des droits et libertés individuelles et collectifs, notamment les libertés(...) d'entreprendre(...), sous réserve du respect de la loi, de l'ordre public et des bonnes moeurs » ; « L'exercice de l'art, du commerce et de l'industrie ainsi que la libre circulation des biens sont garantis à tous les congolais sur toute l'étendue du territoire de la République, dans les conditions fixées par la loi ». Soulignons pour clore ce paragraphe que ce principe n'est pas expressément consacré dans le texte de la constitution de la 3e République ; cependant, une allusion en est faite à l'article 35 qui en traduit quand même l'esprit : « L'Etat garantit le droit à l'initiative privée tant aux nationaux qu'aux étrangers. Il encourage l'exercice du petit commerce, de l'art, de l'artisanat par les congolais et veille à la protection et à la promotion de l'expertise et des compétences nationales. La loi fixe les modalités d'exercice de ce droit ». * 53 CASSANOVA E. A., "le commerce" in encyclopaedia universalis, p.173 * 54 KUMBU KI NGIMBI, cours de législation en matière économique, UNIKIN, faculté de Droit, année 2004, p.14 * 55 Bull off.1982, p.100 cité par KUMBU KI NGIMBI, op.cit., p.16 * 56 Idem |
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