Le contrôle de la société anonyme par les actionnaires( Télécharger le fichier original )par Jacques Derthal ALBAS Université de Lomé - DEA 2007 |
B- La mise en jeu de la responsabilité des dirigeants sociauxJanus à deux têtes, la responsabilité89 des dirigeants de droit ou de fait90 peut être engagée lors du contrôle interne, soit sur le plan civil, soit sur le plan pénal. 81C'est-a-dire toute personne physique ou morale qui assure la direction ou l'administration totale ou partielle, de droit ou de fait de la société. 82 Soc, 4 janvier 1974, RTDcom 1975, p. 114, obs. R. HOUIN. 83 Cass.com, 3 janvier 1996, n° 94-10.765 ; Cass. com. 26 avril 1994, Pesnelle c/société Autoliv Klippan cité par Paul LE CANNU, ibid., p. 441. 84 Alain LIENHARD, note sous Cass. com. 10 mai 2006, D 2006, Tome 2, p. 1533. 85 Claude CHAMPAUD et Didier DANET, note sous Paris, 25e ch., 7 juill. 2006 ; 3e ch. B, 13 oct. 2006 ; 3e ch. B, 6 juill. 2006, RTDcom 2007, n°8 ; V. en ce sens Roger HOUIN, note sous Cass. com. 21 juillet 1969, RTDcom 1970, p. 534, n° 8 ; Cass. com. 15 mai 2007, D 2007, A J, p. 1511, .Alain LIENHARD. 86 Cass. com. 27 mars 1990, JCP 1990. II. 21537, note Yves GUYON. 87 Maurice COZIAN et alii, Droit des sociétés, 17eme éd., LITEC, Paris, 2004, n° 450, p. 214. 88 Benoit LEBARS et Boris MARTOR, « Management et financement de la société anonyme de droit OHADA », JCP 2004, n°5, supplément a la Semaine Juridique n°44, p. 14. 89 La responsabilité est une obligation de répondre d'un dommage devant la justice et d'en assurer les conséquences civiles, pénales, disciplinaires etc. En matière civile, il s'agit de toute obligation, pour l'auteur d'un dommage causé a autrui, de le réparer. En matière pénale, c'est l'obligation de répondre des infractions commises et de subir la peine prévue par le texte qui le réprime. 90 Comme les dirigeants de droit, la jurisprudence retient la responsabilité pénale des dirigeants de fait, c'est-à-dire, des « personnes qui, sans titre, exercent sans entrave et sans indépendance une activité positive de direction des affaires sociales », Jacques MESTRE et Christine SEBASTIEN-BLANCHARD, ibid., n° 595. Sur le plan civil91, les dirigeants sociaux sont responsables, individuellement ou solidairement des infractions, commises envers les actionnaires ou les tiers, soit des infractions aux dispositions législatives ou règlementaires, soit des violations des statuts, soit des fautes commises dans leur gestion. Cette responsabilité est de nature contractuelle envers les actionnaires et la société et, de nature délictuelle envers les tiers. Pour que cette responsabilité soit mise en jeu, trois conditions doivent être réunies à savoir une faute, un dommage et un lien de causalité. Les dirigeants sociaux ne peuvent être déclarés responsables que sur la base d'une faute prouvée. Cette faute n'a pas à être dolosive ou lourde. On distingue plusieurs fautes : lors de la constitution de la société, de la cessation des fonctions, indépendamment de la gestion des dirigeants ou dans le cadre de la gestion de la société. Dans ce dernier cas, la faute réside dans la violation des lois et règlements. Il peut s'agir de la méconnaissance des exigences légales d'information concernant des actionnaires92, de la négligence des affaires sociales, du défaut de surveillance du personnel, du désintérêt pour la gestion ou le fait de concurrencer la société dirigée. Ensuite, il faut un dommage direct, certain et personnel, pour que la responsabilité civile des dirigeants soit retenue. Enfin, la responsabilité civile des dirigeants est subordonnée à la constatation par les juges que le préjudice subi par les actionnaires ou la société trouve sa source dans la faute du dirigeant poursuivi. Les actionnaires, qui ont subi un dommage personnel, peuvent engager la responsabilité individuelle ou collective des dirigeants. Il s'agit de l'action individuelle93. Lorsqu'ils se substituent aux organes sociaux défaillants, ils exercent l'action sociale ut singuli94. Toutefois, il faut souligner que les actionnaires ne sont guère enclins à exercer l'action sociale ut singuli car ils n'en tireront aucun avantage financier personnel, mais seulement la satisfaction d'avoir oeuvré pour le bien commun de la société et de ses associés95. Lorsque la société agit parce qu'elle a subi personnellement un préjudice dû à la faute du dirigeant, elle exerce l'action sociale96. Cette action est, lorsqu'elle est intentée, de la compétence des tribunaux de commerce dans le silence de la loi. Le dirigeant coupable sera condamné à des dommages-intérêts. Il faut aussi noter que le délai de prescription de ces deux actions est de trois (3) ans à compter du fait dommageable ou, s'il a été dissimulé, de sa révélation97. Cette prescription est de dix (10) ans pour les crimes98. La loi prévoit que les frais et honoraires de cette action sont à la charge de la société99. Sur le plan pénal, la responsabilité des dirigeants est engagée en cas d'infractions susceptibles d'être commises personnellement. Il s'agit d'infractions à la réglementation spéciale liée à l'activité propre de l'entreprise ou celles applicables à toute entreprise. Ainsi, en est-il de la présentation de bilans falsifiés pour obtenir des avances ou des prêts100, du délit d'abus de confiance, de la remise de fausses listes d'actionnaires101 ou de la publication des états financiers de synthèse ne donnant pas une image fidèle de la situation financière ou patrimoniale de la société102. Il en est de même des infractions relatives à l'émission des valeurs mobilières103 qu'à la négociation d'actions104. D'ailleurs, pour mieux lutter contre les comportements
susceptibles de nuire gravement à l'essor des activités de
l'entreprise, 91 L'article 1850 C. civ. est le texte general relatif a la responsabilité civile du dirigeant. 92 Cass. com. 17 mai 1965, n° 63-12347 cite par Jacques MESTRE et Christine SEBASTIEN-BLANCHARD, Lamy Sociétés Commerciales, ed. Lamy SA, Paris, 2001, n° 639, p. 284. 93 V. art.162 de l'AUSCGIE. 94 V. art.167 de l'AUSCGIE. 95 Maurice COZIAN et alii, Droit des sociétés, 17eme ed., LITEC, Paris, 2004, p. 127. 96 V. art.166 de l'AUSCGIE. 97 V. art.164 al 2 et 170 de l'AUSCGIE. 98 V. art. 164 in fine et 170 in fine de l'AUSCGIE. 99 V. art. 171 de l'AUSCGIE. 100 Cass. crim. 14 décembre 1981, n° 81-91.106. 101 V. art. 887 de l'AUSCGIE. 102 V. art. 890 de l'AUSCGIE. 103 V. art. 886 de l'AUSCGIE. 104 V. art. 888 de l'AUSCGIE. 105 V. art. 226 a 246 de l'AUSCGIE. A cet effet, l'article 313 du Code penal tchadien punit les banqueroutiers frauduleux d'un emprisonnement de cinq(5) a dix (10) ans et les banqueroutiers simples d'un emprisonnement d'un mois a deux ans. Seulement, la lenteur et les coûts de la justice sont de nature à fragiliser les droits des actionnaires. De plus, la plupart des actionnaires préfèrent avoir en main une action, une valeur mobilière qu'une action en responsabilité. Cependant, même si la mise en oeuvre du contrôle interne individuel paraît difficile pour les actionnaires et engendre de nombreux risques aussi bien à l'égard de la société que des dirigeants sociaux, plusieurs moyens de divers ordres permettent d'accroître de point en point son renforcement. |
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