Le plafonnement de la taxe professionnelle( Télécharger le fichier original )par Sophie Deligiannis Université de Strasbourg - Master 2 Recherche Droit public général 2009 |
Section 1 : Le problème relatif à la qualification de subventions d'exploitationLes subventions d'exploitation correspondent à un des éléments comptables compris dans la valeur ajoutée définie à l'article 1647 B sexies du CGI. La délimitation de cette notion est donc déterminante, pour les redevables, puisqu'elle peut faire varier le montant de la valeur ajoutée, servant de base au plafonnement de la taxe professionnelle (I). C'est pourquoi les subventions d'exploitation ont fait l'objet d'un important contentieux (II). 88 Rappelons que le l'énumération donnée par l'article 1647 B sexies du CGI afin de déterminer le montant de la valeur ajoutée servant de base au calcul du plafonnement se fonde sur le PCG 1957. I. La détermination de subvention d'exploitation
: une notion incluse dans Afin d'identifier les éléments à prendre en compte dans le calcul de la valeur ajoutée, il faut se référer aux définitions comptables. Le plan comptable général distingue trois catégories de subventions, à savoir les subventions d'exploitation, les subventions d'équilibre et les subventions d'investissement89. Les subventions constituent, d'une manière générale, des aides financières octroyées aux entreprises par l'Etat ou par des collectivités publiques, et de manière exceptionnelle, elles peuvent être accordées par une entreprise à une autre entreprise. La notion de subvention d'exploitation, telle qu'elle figure dans le plan comptable général de 1999, actuellement en vigueur, est définie comme une « subvention dont bénéficie l'entreprise pour lui permettre de compenser l'insuffisance de certains produits d'exploitation ou de faire face à certaines charges d'exploitation ». Elles se distinguent des subventions d'équipement et des subventions d'équilibre. En effet, les subventions d'équipement sont destinées à financer l'acquisition d'immobilisations, telles que les subventions pour la création d'installations antipollution. Sinon il s'agit de subventions d'investissement, lorsqu'elles financent des activités à long terme, telles que les primes de développement régional90. Quant aux subventions d'équilibre, le Commissaire du gouvernement G. GOU LARD rappelle, dans ses conclusions, leur distinction avec les subventions d'exploitation : « La subvention d'équilibre est celle qui compense un résultat d'ensemble négatif, défini comme la résultante des opérations courantes, des opérations financières et des opérations exceptionnelles. Mais lorsque la subvention reste au niveau des produits et charges de gestion courante, pour compenser une insuffisance de ces produits ou un excès de ces charges, il s'agit d'une subvention d'exploitation. »91. La subvention d'équilibre est donc destinée
à équilibrer le résultat d'ensemble d'une 89 Source : < http://bestofcompta.free.fr/comptagene/LES%20SUBVENTIONS.htm>. 90 Ibid. 91 G. GOULARD, « Qu'est-ce qu'une subvention d'exploitation entrant dans le calcul de la valeur ajoutée, pour l'application du plafonnement de la taxe professionnelle (art. 1647 B sexies) ? », BDCF 3/03, n° 37, p. 36-39. 92 Source : < http://bestofcompta.free.fr/comptagene/LES%20SUBVENTIONS.htm>. commissaire du gouvernement G. GOULARD relève, par ailleurs, que les auteurs du Mémento comptable F.LEFEBVRE précisent que « Toutefois, à notre avis, lorsque (les subventions d'équilibre) assurent l'équilibre du résultat d'exploitation, il s'agit, comptablement, de subventions d'exploitation »93. Cette précision fait référence, d'une part, à la subdivision des recettes entre produits de gestion courante, produits financiers et produits exceptionnels, et d'autre part, à la subdivision des charges entre charges de gestion courante, charges financières et charges exceptionnelles94. En définitive, lorsque la subvention compense des produits ou des charges de gestion courante, il s'agit d'une subvention d'exploitation. Ces trois catégories de subventions doivent être correctement identifiées, en particulier la différence entre subvention d'exploitation et subvention d'équilibre, puisqu'elles n'entraînent pas les mêmes conséquences en matière de plafonnement en fonction de la valeur ajoutée. Seules les subventions d'exploitation doivent être comprises dans la valeur ajoutée, définie à l'article 1647 B sexies du CGI. II. L'important contentieux concernant la qualification de subvention d'exploitation, au sens de l'article 1647 B sexies du CGI, par le juge de l'impôt Après l'entrée en vigueur du plan comptable général de 1982, le Conseil d'Etat a implicitement appliqué les nouvelles définitions comptables. Il a donc accepté de faire évoluer les notions contenues dans l'article 1647 B sexies du CGI, afin d'éviter les discordances entre les normes comptables et les normes fiscales (CE 8 juillet 1998, ministre c/ CCI de Laval et de la Mayenne ; CE 29 décembre 2000 n° 199296, ministre c/ SNCF). La première affaire portait sur des virements effectués par une chambre de commerce, entre deux sections de son propre budget, afin de combler le déficit d'exploitation de l'aérodrome qu'elle exploitait. La seconde affaire, quant à elle, concernait des subventions versées à la SNCF par l'Etat et des collectivités territoriales pour permettre la fixation du prix du 93 Cf. « Mémento comptable 2003 », coll. Mémento pratique, éd. Francis Lefèbvre, 2003, n° 2415, dans G. GOULARD, « Qu'est-ce qu'une subvention d'exploitation entrant dans le calcul de la valeur ajoutée, pour l'application du plafonnement de la taxe professionnelle (art. 1647 B sexies) ? », BDCF 3/03, n° 37, p. 36-39. 94 G. GOULARD, « Qu'est-ce qu'une subvention d'exploitation entrant dans le calcul de la valeur ajoutée, pour l'application du plafonnement de la taxe professionnelle (art. 1647 B sexies) ? », BDCF 3/03, n° 37, p. 36-39. transport à un montant inférieur à celui qu'auraient dû normalement acquitter les usagers et pour équilibrer les comptes d'exploitation des services de voyageurs d'intérêt régional. Dans les deux cas, le Conseil d'Etat a estimé que ces sommes représentaient des subventions d'exploitation95. Dans la décision ministre c/ CCI de Laval et de la Mayenne, il a adopté une conception plus large de la notion de subvention d'exploitation par rapport à celle retenue par le plan comptable général de 1957 mais compatible avec le plan comptable général de 1982, appliqué ici « par anticipation96 »97 . Cette position est confirmée dans l'arrêt ministre c/ SNCF, bien que, cette fois, le plan comptable général de 1982 était en vigueur à la date des subventions litigieuses. Par ailleurs, dans l'affaire Sté Hyper Média, la société mère imposait à l'une de ses filiales une politique de prix bas qui ne lui permettait pas de couvrir ses charges. A la fin de chaque exercice, la société mère devait lui verser une subvention permettant de rétablir l'équilibre de ses comptes. En pratique, ces subventions prenaient la forme d'avances, suivies d'abandons de créances. De plus, les versements consentis par la société mère étaient accompagnés d'une clause de retour à meilleure fortune, autrement dit, la filiale devra les rembourser, lorsqu'elle connaîtra des exercices bénéficiaires. La filiale soutient dans le cadre de sa demande de plafonnement de taxe professionnelle en fonction de la valeur ajoutée que ces versements sont des subventions d'équilibre. Par conséquent, elles ne font pas partie, contrairement aux subventions d'exploitation, aux éléments de la production qui sont compris dans le calcul de la valeur ajoutée98. Ainsi, il s'agit de déterminer si les aides que la société mère lui a consenties constituent ou non des subventions d'exploitation au sens de l'article 1647 B sexies du CGI. Le Conseil d'Etat devait choisir entre la qualification de subvention d'exploitation et celle de subvention d'équilibre. La subvention en cause est justifiée par la pratique d'une politique commerciale agressive se traduisant par des prix ne permettant pas de couvrir les charges d'exploitation99. Il a ainsi estimé qu'une subvention destinée à compenser des prix trop bas est une recette d'exploitation. Tel était également le cas, dans les affaires précitées, de l'aide 95 F. DONNEDIEU de VABRES, « Plafonnement en fonction de la valeur ajoutée : définition des subventions d'exploitation dans la valeur ajoutée », BGFE 2/03, p. 16-17. 96 En effet, le juge fiscal s'est référé aux définitions du plan comptable général de 1980, alors que c'était celui de 1957 qui était applicable ratione temporis. 97 G. GOULARD, « Qu'est-ce qu'une subvention d'exploitation entrant dans le calcul de la valeur ajoutée, pour l'application du plafonnement de la taxe professionnelle (art. 1647 B sexies) ? », BDCF 3/03, n° 37, p. 36-39. 98 Ibid. 99 Ibid. versée pour compenser le caractère insuffisant des recettes d'exploitation d'un aéroport ou de l'aide accordée à la SNCF pour compenser les prix bas appliqués sur certaines lignes. Il n'a pas fait de différence selon la forme de l'aide - subvention, virement interne ou avance suivie d'un abandon de créance - ou selon le caractère plus ou moins temporaire de l'aide100. Il a préféré, au contraire, faire prévaloir le réalisme fiscal101. La qualification de subvention d'exploitation présente un intérêt important pour les entreprises, puisqu'une autre qualification peut entraîner une baisse du montant de la valeur ajoutée, et donc une diminution du plafond de la taxe professionnelle. |
|