B. La référence au plan comptable
général en vigueur au moment des faits
1. L'évolution des rubriques
énumérées dans l'article 1647 B sexies du CGI
Avec l'entrée en vigueur du Plan comptable
général de 1982 (ci-après : « PCG 1982 ») puis
de celui de 1999 (ci-après : « PCG 1999 »), le juge fiscal
s'est retrouvé confronté au constat que, d'un point de vue
comptable, l'énumération de l'article 1647 B sexies du
CGI reprenant des postes comptables du plan comptable général de
1957 pouvait évoluer. Les catégories ainsi retenues par le
législateur pouvaient donc changer de dénomination, de
périmètre, voire disparaître. Parallèlement, de
nouvelles catégories, dont le contenu pourrait reprendre tout ou partie
d'une catégorie énumérée par le Code
général des impôts (ci-après : « CGI »)
mais ne figurant pas dans cette énumération, pouvaient
apparaître. Le juge fiscal se trouvait, par conséquent,
confronté à la question de savoir s'il fallait se
référer à l'article 1647 B sexies du CGI dans sa
rédaction applicable à la date d'adoption de la loi fiscale ou au
cours de la période d'imposition. Ainsi, le Conseil d'Etat a
considéré, dans son arrêt min c/ CCI de Laval et de La
Mayenne, du 8 juillet 199865, que la délimitation des
rubriques conformément aux règles du plan comptable doit se faire
au vu du plan comptable en vigueur à la date des faits. Il s'est
fondé sur la définition des « subventions d'exploitation
» adoptée par le PCG 1982
64 Cf. RJF 8-9/87 n° 887.
65 CE 8 juillet 1998, n° 118 555, ministre c/ CCI de
Laval et de la Mayenne, RJF 10/08, n° 1134.
dans une affaire où le plan comptable applicable pour
les années en litige était celui de 1957. Il n'a donc pas suivi
le commissaire du gouvernement qui proposait de s'en tenir à la seule
référence connue du législateur de 1980.
Le Conseil d'Etat semblait s'être affranchi, pour
l'interprétation de chaque rubrique, de la référence au
plan comptable général. En effet, il a fondé sa solution
sur les règles comptables édictées par le PCG 1982, alors
que celles-ci n'étaient applicables pas aux cotisations de taxe
professionnelle dont le plafonnement était sollicité. La seule
explication valable était que la Haute Assemblée avait, pour la
première fois, fait application de l'article 1647 B sexies du
CGI en suivant un raisonnement fiscal autonome66. C'est cette
interprétation que le Commissaire du gouvernement J. COURTIAL donnait,
dans ses conclusions concernant l'affaire Ministre c/ SNCF du 29
décembre 200067.
Aussi, le juge fiscal paraissait avoir opté pour
référence « glissante » aux règles comptables,
et non figée.
2. La référence au plan comptable en
vigueur lors de l'année d'imposition concernée
Le Conseil d'Etat a transposé la solution
dégagée dans l'arrêt min c/ CCI de Laval et de La
Mayenne au cas de l'article 1647 B sexies du CGI, dans l'affaire
Sté Hyper Média du 30 décembre
200268. En l'espèce, la société
requérante avait bénéficié d'un abandon de
créance de la part de sa société mère afin de
compenser une insuffisance des produits d'exploitation due à la
faiblesse des prix de vente qu'elle pratiquait en vue de conquérir des
parts de marché. Le Conseil d'Etat a jugé que cet abandon de
créance constituait, au sens du 2 du II de l'article 1647 B
sexies du CGI, une subvention d'exploitation devant concourir à
la production de l'exercice de la société requérante, et
devait donc être prise en compte dans sa valeur ajoutée. Il a
repris la distinction, introduite par le PCG 1982 et confirmée par le
PCG 1999, entre les subventions d'exploitation et les subventions
d'équilibre qui constituent des produits exceptionnels exclus de la
valeur ajoutée. Il a ainsi interprété les
catégories
66 L. OLLEON, « Taxe professionnelle et subventions,
Attention, plafond haut ! », RJF 5/03, p. 395-398.
67 J. COURTIAL, « Traitement des subventions d'exploitation
pour le calcul du plafonnement de la taxe professionnelle », BDCF 3/01,
n° 40, p. 25-27.
68 G. GOULARD, « Qu'est-ce qu'une subvention d'exploitation
entrant dans le calcul de la valeur ajoutée, pour l'application du
plafonnement de la taxe professionnelle (art. 1647 B sexies) ? », BDCF
3/03, n° 37, p. 36-39.
énumérées à l'article 1647 B sexies
du CGI à la lumière non pas du PCG 1957 mais des normes
comptables en vigueur au cours des années d'imposition en litige.
Le juge fiscal a donc confirmé qu'il convenait toujours
de se référer au plan comptable général en vigueur
pour les années en litige pour définir le périmètre
de chaque rubrique. Cette position revient à admettre que le
périmètre de ces rubriques évoluerait avec le plan
comptable général lui-même. En effet, Guillaume Goulard,
concluant sur l'affaire Hyper Média69, indiquait qu'
« il est préférable, dans la mesure du possible, de retenir
la définition du plan comptable général applicable
à la date des faits (...) Car il faut, en opportunité,
éviter d'introduire des divergences entre les notions que les
entreprises doivent appliquer en comptabilité et celles qu'elles doivent
respecter dans leurs relations avec l'administration fiscale ». Il
préconisait donc de retenir les définitions du plan comptable
général applicable à la date des faits lors de la
détermination de la valeur ajoutée. Le Conseil d'Etat a donc
suivi son commissaire du gouvernement. Par contre, si cette solution avait
été appliquée à l'affaire min c/ CCI de Laval
et de La Mayenne, elle aurait conduit à une solution inverse de
celle qui fut adoptée70.
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