Section 2 Inclusion du droit d'auteur dans la
catégorie des droits de l'homme
Il est aujourd'hui fréquent que les auteurs
déclarent que le droit d'auteur doit être un droit de l'homme
ayant sa place très haut dans la hiérarchie des
normes77. La prépondérance de la
propriété intellectuelle dans l'économie mondiale
justifierait cette place de droit fondamental.
73 Philippe Malaurie, Laurent Aynès, « Les
biens », 2e éd. Defrénois
74 Mousseron, Raynard, Revêt, "De la
propriété comme modèle", Mélanges Colomer,
Litec 1993, p. 281.
75 Christophe Caron, op. cit., p. 1624
76 « Le droit d'auteur, un droit de l'homme ? », Revue
International du Droit d'Auteur, 174, octobre 1997
77 M. Vivant, Le droit d'auteur, un droit de l'homme ?
: RIDA oct. 1997, n°174, P61
L'article 27 de la Déclaration universelle des droits
de l'Homme du 10 décembre 1948 proclame que « chacun a le droit
à la protection des intérêts moraux et matériels
découlant de toute protection scientifique, littéraire ou
artistique dont il est l'auteur ». Le premier paragraphe de l'article
pose le principe selon lequel « toute personne a le droit de prendre
part librement à la vie culturelle de la communauté, de jouir des
arts et de participer au progrès scientifique et aux bienfaits qui en
résultent ». Les gouvernements doivent agir en
conséquence pour trouver les mesures nécessaires afin de faire
respecter cette norme universelle78. Le paragraphe 2 de cet article
fait directement référence aux droits patrimoniaux et moraux de
l'auteur ; le droit d'auteur serait sur « la liste des droits
fondamentaux79 ».
De même, l'article 15 du pacte international relatif aux
droits économiques, sociaux et culturels du 19 décembre 1966,
oblige les états membres à protéger les
intérêts moraux et matériels des auteurs et
créateurs. Le pacte est un traité imposant des obligations
juridiques aux États, partis au présent pacte qui «
reconnaît à chacun le droit de participer à la vie
culturelle, de bénéficier du progrès scientifique à
chacun le droit de participer à la vie culturelle, de
bénéficier du progrès scientifique et de ses applications,
de bénéficier de la protection des intérêts moraux
et matériels découlant de toute production scientifique,
littéraire ou artistique dont il est l'auteur ». Afin
d'assurer ces objectifs, les États doivent prendre « les mesures
nécessaires pour assurer le maintien, le développement et la
diffusion de la science et de la culture80 ». Ce pacte peut
être invoqué en justice.
La Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne
du 18 décembre 2000 visant la propriété intellectuelle
dispose que « toute personne a le droit de jouir de la
propriété des biens qu'elle a acquis légalement, de les
utiliser, d'en disposer et de les léguer... » et affirme que «
la propriété intellectuelle est protégée
».
Tous ces textes permettent au droit d'auteur de
bénéficier d'une « base théorique solide » lui
donnant une « position élevé et incontestable dans la
hiérarchie des normes81 ». Le droit d'auteur serait
ainsi un droit de l'homme, protégé constitutionnellement. Il est
par conséquent un droit fondamental placé au même rang que
les libertés fondamentales que sont par exemple la liberté
d'expression.
Ce droit fondamental que serait le droit d'auteur ne doit pas
être incompatible avec les autres droits fondamentaux qui sont tous
placés au même niveau dans la liste des droits de
l'homme82.
78 P. L. Torremans, op. cit., p. 176
79 Ibid. p. 177
80 Audrey R. Chapman, « La
propriété intellectuelle en tant que droit de l'homme
», Bulletin du droit d'auteur, Vol. XXXV n°3, juillet-septembre
2001, Éditions UNESCO
81 Christopher Geiger, « Droit d'auteur et
droit du public à l'information », préface de Michel
Vivant, collection droit des affaires, Litec, 2004, p. 48
82 P. L. Torremans, op. cit., p. 182
Une place au « panthéon des droits fondamentaux
européens » doit être réservée à la
propriété intellectuelle, comme le souligne C. Caron puisque
l'article 1 du protocole n°1 de la Convention européenne de
sauvegarde des droits de l'homme s'applique à la propriété
intellectuelle83. Cet article dispose que « chacun a droit
au respect de ses biens », et s'applique indifféremment aux
biens corporels et incorporels. Les titulaires d'un droit de
propriété intellectuelle bénéficie par
conséquent de cette protection. L'arrêt de la Cour
Européenne des Droits de l'Homme, dans sa décision du 11 janvier
2007, Anheurser-Busch. c/ Portugal, est venu conforté cette
position84.
En France, un arrêt du 13 novembre, de la cour de
cassation opposant France 2 à Fabris, tendait déjà en ce
sens. Il a été jugé que « le droit du public
à l'information et à la culture ne portait pas atteinte au
monopole légal de l'auteur sur son oeuvre qui est garanti au titre du
droit de toute personne physique ou morale au respect de ses
biens85 ». Il y'avait dans ce cas d'espèce deux
droits fondamentaux en balance : le droit à l'information du public et
le droit au respect de ses biens reconnu par le protocole n°1 de la
convention européenne.
Ces deux droits sont « d'égale valeur dans la
hiérarchie des normes ». Ce constat place le droit de
propriété intellectuelle au sommet de la hiérarchie des
normes.
Il est donc « nécessaire, pour la
communauté des droits de l'homme, de revendiquer le statut de droits de
l'homme pour les droits des auteurs, des créateurs et des inventeurs,
qu'il s'agisse d'individus, de groupes ou de communautés86
».
83 C. Caron, « La propriété
intellectuelle au panthéon des droits fondamentaux européens
», Communication Commerce Électronique, n°5, mai
2007, p. 31
84 Ibid.
85 C. Caron, « Droits de l'homme et droit
d'auteur : inquiétudes (provisoirement) dissipées »,
Communication Commerce Électronique, n°1, comm. 2, janvier
2004, p. 25
V. note V. Varet, « Droit d'auteur et droit du public
à l'information », Légipresse 2004, III, p. 23
86 Supra note 80 p.7
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