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L'activité culinaire des étudiants étrangers

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par Frédérique Giraud
Ens-Lsh - Master 1 de Sociologie 2006
  

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a) Deux types de produits

« Lorsque j 'étais parti en Erasmus, en Allemagne, mes parents m 'avaient amené en voiture et j 'avais pris trente kilos de pâtes » nous raconte Giovanni. Pour venir en France, où il allait rester six mois, il a amené quelques cinq kilos de pâte. Dans cette démarche c'est la logique économique qui est exhibée. En effet en France les pâtes sont trois à quatre fois plus chères qu'en Italie, il est donc économiquement avantageux d'acheter ses pâtes en Italie lorsqu'on en est un grand consommateur. D'autant plus que lorsque le produit est acheté dans son pays, ce sont les parents qui payent les achats. Ainsi acheter avant de partir de des denrées alimentaires permet d'économiser quelques dépenses. De plus, cela permet à l'étudiant de prendre un peu de temps une fois arrivé en France pour se renseigner sur les supermarchés autour de chez lui et de n'avoir pas tout de suite à aller faire des courses. Le début du séjour est ainsi accompagné par les parents, facilité. Le plus souvent en effet cette démarche d'achat avant le départ est prise en charge par le groupe, les parents, les amis de l'étudiant. Tsu Tsu Tuï n'avait pas pensé à acheter des produits en Chine, elle nous raconte que « Mes parents et mon mari ont acheté pour moi. Mais je m 'en fiche euh en fait, je préfère acheter ici, parce que c 'est pas très facile à apporter. ». Cela est net également dans le discours d'Abdelbaki qui emploie

105Nicole Cérani et Martine Camus, « Le budget des familles en 2001 », Insee Résultats, 2004

pour parler de la préparation du séj our en France la troisième personne du singulier « on avait pensé à ça » dit-il. L'étudiant se laisse une dernière fois prendre en charge avant la prise d'autonomie par le départ. Cela est tout à fait vrai pour Abdelbaki qui avant d'arriver en France n'avait jamais fait la cuisine, ni fait le ménage.

A chaque retour chez ses parents, trois fois en six mois, Giovanni ramène à nouveau des pâtes. En plus des pâtes, il a apporté au début de l'année et à chaque retour en France des conserves de poivrons produits par ses parents, du lard, des châtaignes...On voit ici se dessiner deux logiques : on ramène avec soi, à la fois des produits que l'on achète dans son pays, et des produits préparés par la famille, des fruits et légumes du jardin...

Le premier type de produit de conservation longue a vocation à durer quelque temps après le départ de chez les parents, les autres produits, périssables tels que les fruits et les légumes ont une autre vocation. Produits chez soi, ils ont une dimension affective forte, ils constituent un lien avec son pays mais plus avec sa famille. Ces produits se conserveront tout au plus une à deux semaines, ils permettent aux étudiants comme aux parents de maintenir un lien avec l'enfant, de ne pas s'en séparer tout de suite. Tant que les produits ne seront pas entièrement consommés, on sera encore un peu chez soi, pas encore autonome, dans un entre-deux réconfortant. Ils permettent de rendre la séparation plus douce. Ces aliments auront tendance à fonctionner comme des aliments de réconfort, on les mange en des circonstances particulières, notamment les jours de vague à l'âme. Le temps de leur consommation, on est encore un peu « fils ou fille de ».

Christina n'a apporté avec elle en septembre que des sucreries : des bonbons haribos, des chewing gum dont le parfum est si particulier qu'elle pense ne pas les trouver en France. Retournée chez elle pour les vacances de la Tousaint, de Noël et les vacances de février, elle rapporte à chacune de ces occasions des bonbons. Elle a en plus à Noël apporté du gouda allemand dont elle sait qu'elle ne le trouve pas en France. C'est pour elle aussi une logique de produits de réconfort qui est à l'oeuvre, mais ce ne sont pas les mêmes types de produits qu'elle ramène. Ils ne sont pas produits par sa famille, mais achetés, toutefois ils s'inscrivent dans le cadre de prises alimentaires mineures. Les bonbons, les chocolats ne relèvent pas des mêmes consommations que les pâtes... mais ils ont une vertu réconfortante.

Rares sont les étudiants qui peuvent se permettre de rentrer chez eux au cours du séjour, cela concerne uniquement les étudiants des pays limitrophes de la France. Si d'autres auraient le temps et les moyens financiers, ils préfèrent utiliser leurs vacances pour visiter l'Europe, plutôt que de rentrer chez eux.

Dès lors, tous ne sont pas non plus concernés par ces approvisionnements en nourriture de réconfort. Leurs stocks répondent plus à d'autres critères que la suite de ce chapitre va permettre d'élucider. Notons qu'une seconde voie médiane existe également pour l'approvisionnement en produits sucrés... via les colis familiaux. On demande à ses parents ou aux amis rendant visite de rapporter ce dont on manque. C'est une pratique peu répandue, mais que nous avons rencontré chez nos bloggeurs en Chine ou en Russie. Il en sera question dans le chapitre consacré à l'approvisionnement lors du paragraphe consacré à la place du réseau.

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"Piètre disciple, qui ne surpasse pas son maitre !"   Léonard de Vinci