c) Le goût pour la cuisine chinoise
Les bloggeurs avec qui nous sommes rentrés eu contact
témoignent de la volonté de goûter toute la gastronomie
chinoise ou japonaise. C'est pourquoi les récits alimentaires sur leurs
blogs sont fréquents. Leur départ à l'étranger
était selon nous fortement lié à la volonté de
goûter à une vraie nourriture étrangère.
C'est cette envie de connaître la nourriture de l'autre
qui explique selon nous qu'absolument tous les bloggeurs contactés par
mail et à qui nous avions envoyé des questionnaires (version
aménagée de la grille d'entretien) ont répondu, et ce
très rapidement. Le plus long délai de réponse a
été trois jours. L'envie de faire partager la connaissance qu'ils
avaient de la nourriture de l'autre, qui anime la présentation des blogs
était fortement présente dans leurs réponses.
La plupart connaisse bien avant de partir la cuisine chinoise
et ou japonaise, pour s'être rendus dans des restaurant asiatiques en
France, tous tiennent à préciser que ces restaurants ont
modifié les plats pour qu'ils conviennent aux français.
On peut l'expliquer parce qu'un désir
d'authenticité anime le voyage, au-delà des apparences, lui aura
accès à la vraie nourriture chinoise et il faut qu'il transmette
à ceux qui restent en France le savoir.
S'ils sont partis c'est aussi parce que comme nous explique
Camille « j 'aime les cuisines de tous les pays, je n'ai jamais
mangé uniquement français en France, et mangeait
déjà souvent asiatique en France ».
Céline exprime bien cette volonté de
goûter « Quand je vais au supermarché, j 'essaie de
tester de nouvelles choses, des raviolis différents, des choses
surprenantes aussi (comme des tranches de fromage au chocolat). Au restaurant,
il m 'arrive de choisir un plat sans trop savoir ce que c 'est
exactement.
Ce qui me motive, c 'est de découvrir la culture
chinoise et voir vraiment comment ils mangent et ce qu 'ils aiment. Même
si après, je n 'aime pas, mais j 'aurais essayé. »
Elle conclut « Je n'ai eu aucun mal à m'adapter, j
'adore la cuisine chinoise ». Ce goût pour la cuisine chinoise
constitue le leitmotiv dans presque tous les entretiens.
Il correspond à des personnes ayant fait des
études, souvent des écoles de commerce. Les parents ne pas
toujours très diplômés. Les parents de Camille
(journaliste) sont avocat et médecin, ceux de Mickaël (Acheteur
junior ~ Master en management de la fonction Achats ~ ESIDEC de Metz (Groupe
ICN) ~ NTU of Taipei) sont artisans, la mère de Jennifer (ESC Lille) est
une personne qui aide à domicile les personnes âgées.
Ces personnes en France se rendaient
régulièrement dans des restaurants asiatiques. Seul M'barek, en
Chine pour rechercher un emploi, dont les deux parents sont chômeurs, ne
connaissait pas la gastronomie chinoise et ne cherche pas à la
connaître mais à manger au moins cher. Avant de partir, pour se
familiariser, il a goûté.
« Est-ce que tu connaissais déjà la
cuisine chinoise avant de partir?
Non absolument pas, même si j'ai fait une dizaine de
restaurants chinois avant de partir, mais ces restos étaient
adaptés aux goûts français »
Pour savoir la place de la nourriture dans le projet de
mobilité, on pourrait également s'interroger sur le retour en
France et/ou en Chine...Il faudrait alors s'interroger sur ce que le voyageur
rapporte de son voyage. Quelle est la place de l'expérience alimentaire
dans le souvenir. Les habitudes alimentaires en France sont-elles
modifiées ? Quels ustensiles rapporte-t-il et avec quelle
finalité ?
Dans un premier temps, nous avons montré ce que
signifiait faire une sociologie des migrations à travers l'alimentation
et en quoi consistait notre démarche.
Ce chapitre a permis de poser deux hypothèses
principales en tentant de démontrer leur pertinence sociologique pour
l'étude des faits alimentaires en situation de migration. Ces
hypothèses s'imbriquent et construisent un écheveau complexe.
C'est parce que l'alimentation est un fait social qui sert
d'élément identificateur pour les groupes sociaux à
l'échelle d'un pays ou d'une région, que la mobilité
géographique à long terme pose un certain nombre de
problèmes d'adaptation, aux habitudes alimentaires locales, aux mangeurs
itinérants.
On peut supposer que les jeunes mangeurs sont ouverts aux
découvertes culinaires et manifestent une volonté de goûter
à autre chose qu'à des aliments connus. On peut imaginer que
dès lors le projet migratoire ne sera pas étanche aux
découvertes culinaires et ne se manifestera pas par une réticence
aux nouveautés culinaires.
Le chapitre suivant est consacré aux dimensions plus
techniques de l'enquête, il est peut construit à la manière
d'un livre de cuisine, livrant les secrets de fabrication d'une recette de
recherche
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